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La start-up Athéna produit de l’hydrogène à partir des déchets de l’industrie agroalimentaire
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La start-up Athéna produit de l’hydrogène à partir des déchets de l’industrie agroalimentaire

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La start-up nantaise Athéna produit de l’hydrogène grâce à des bactéries à partir de déchets de l’agroalimentaire. Après six années de recherche et développement, la jeune pousse passe en phase de pré-industrialisation. Elle prépare notamment une levée de fonds de 1,5 million d’euros.

L’équipe d’Athéna Recherche et Innovation dans le laboratoire de l’IMT Atlantique, à Nantes — Photo : David Pouilloux

Au sein de l’incubateur de start-up de l’IMT Atlantique, l’une des pépites les plus prometteuses et les plus originales porte le nom de la déesse grecque des sciences Athéna. De son vrai nom Athéna Recherche et Innovation, la jeune pousse est née en 2017 de la volonté de son président, Ludovic Briand, de produire de l’hydrogène à partir de déchets de l’agroalimentaire. "On sait produire de l’hydrogène à partir de l’électrolyse de l’eau, mais cela demande beaucoup d’électricité, rappelle l’ingénieur et fondateur de la start-up. Notre concept consiste à utiliser comme ressource des déchets de l’agroalimentaire : des eaux de lavages ou de cuisson, qui sont chargées en sucres, lipides, protéines, et qui vont être consommées par des bactéries capables de produire de l’hydrogène."

De l’énergie à partir de déchets

Dans l’industrie agroalimentaire, des milliers d’entreprises doivent se débarrasser de millions de litres d’eaux usées et d’eaux de cuisson via un système d’épuration coûteux. Or ces effluents sont bourrés de matières organiques dont sont friands les micro-organismes triés sur le volet par l’équipe de chercheurs d’Athéna. "Cet hydrogène peut servir à alimenter des véhicules, comme des camions. Notre idée est que cet hydrogène soit consommé sur place par la flotte de véhicules de l’usine où nous l’implanterons. C’est de l’économie circulaire, une boucle bas carbone", indique Ludovic Briand.

"Niveau développement, nous avons passé le premier stade de maturité, explique Romain Irague, le directeur technique d’Athéna. Notre concept fonctionne en laboratoire dans un bioréacteur de petite dimension. Nous sommes désormais sur la phase préindustrielle avec la conception d’un réacteur quatre mille fois plus grand, soit d’un mètre cube." Ce réacteur sera opérationnel début 2023, tandis que l’unité de 30 m3, sera, elle, prête à la fin de cette même année. "Ce sont des étapes nécessaires, prévient Romain Irague, avant la véritable première usine prévue pour fin 2025 avec un réacteur biologique de 300 m3."

Des économies de gaz et d’électricité

"Nous avons plusieurs pistes de partenariats avec de gros industriels de l’agroalimentaire, notamment dans le secteur laitier, note Ludovic Briand. Pour un industriel, avoir une usine de ce type lui permettra de faire des économies d’énergie, de gaz et d’électricité, puisqu’il n’aura pas à traiter ses déchets notamment sur le plan thermique. Il pourra, par ailleurs, acheter et utiliser l’énergie produite sur place pour sa flotte interne."

Pour cette start-up de dix salariés, les investissements sont en route au moment où le projet vit une forte accélération. "La Région Pays de la Loire nous a apporté un fort soutien, pour un montant d’aide globale d’environ 450 000 euros, dont 350 000 via les fonds européens Feder, qui vient de tomber, rapporte le dirigeant. Par ailleurs, nous avons récolté près de 400 000 euros de subventions de la part de l’industrie, dont TotalEnergies et Technip Energies. Nous avons candidaté pour d’autres subventions, notamment auprès de Bpifrance, et c’est en bonne voie. Enfin, nous préparons une levée de fonds imminente d’un million et demi d’euros." En tout, 2,7 millions d’euros devraient bientôt soutenir le développement du projet.

Romain Irague, directeur technique, et Ludovic Briand, président et fondateur d’Athéna Recherche et Innovation — Photo : David Pouilloux

De l’hydrogène, du CO2 et du biochar

Le modèle économique sera le suivant : l’industriel partenaire n’aura pas à investir dans l’usine de production d’hydrogène. Il fournira gratuitement ses déchets. "Chaque usine sera une société indépendante, et Athéna en sera actionnaire, précise Ludovic Briand, avec d’autres investisseurs. La société trouvera sa rentabilité par la vente de l’hydrogène, mais aussi du CO2 produit en même temps que l’hydrogène par les bactéries et récupéré en parallèle." Ce CO2 peut en effet être vendu aux producteurs de boissons gazeuses. La France en consomme plus d’un million de tonnes par an. Autre vertu de ces bioréacteurs : les milliards de bactéries mortes après avoir produit de l’hydrogène peuvent servir de produits de base pour fabriquer du biochar, du charbon biologique, qu’il sera possible de commercialiser. "C’est une matière carbonée stable qui peut être utilisée en agriculture, détaille Romain Irague. C’est un support qui retient les engrais et améliore la vie biologique des sols."

Car l’équation économique ne peut reposer uniquement sur l’hydrogène. "La rentabilité de chaque usine, qui produira 80 à 120 tonnes d’hydrogène par an, reposera sur la valorisation de tous les produits", souligne Ludovic Briand.

L’ambition de la start-up ? "100 000 tonnes d’hydrogène par an en 2040", se fixe Ludovic Briand. L’objectif du plan hydrogène décarbonée du gouvernement à cette échéance se situe entre 2,7 et 3,3 millions de tonnes par an. Les bactéries d’Athéna n’auront pas le temps de souffler.

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