Coronavirus : Des experts-comptables et des banquiers très sollicités
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Coronavirus : Des experts-comptables et des banquiers très sollicités

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Experts-comptables ou banquiers, ils font partie des métiers qui ne chôment pas en cette période de crise liée à la propagation du coronavirus. En Loire-Atlantique et Vendée, ils sont très sollicités par des dirigeants encore dans le flou, que ce soit sur la gestion de leur trésorerie ou du chômage partiel. Tous ont dû s’adapter à la vague de demandes, tout en réorganisant leurs services. Témoignages de la Fédération Bancaire Française des Pays de la Loire, ainsi que des cabinets In Extenso et HLP Audit.

— Photo : BNP Paribas

Depuis maintenant plus de deux semaines, les métiers du chiffre doivent gérer un flux ininterrompu d’appels, de mails, et de questions toutes plus techniques et inédites les unes que les autres. « Nous recevons trois fois plus d’appels que d’habitude », note Vincent Goldie, expert-comptable et associé du cabinet nantais HLP Audit (100 salariés, 8 M€ de CA en 2019). Gestion du chômage partiel, demandes de Prêts Garantie par l’État, inquiétude sur la trésorerie, si les questions se ressemblent, les réponses divergent selon les dirigeants et les entreprises. Premiers retours d’expériences de banquiers et experts-comptables.

Redémarrage en cours

Comment rouvrir son entreprise ? « C’est la question du moment », confirme Vincent Goldie, expert-comptable et commissaire aux comptes au sein du cabinet nantais HLP Audit. Alors que quelques acteurs du BTP ont annoncé leur réouverture comme Réalités ainsi que des menuisiers comme Cetih ou K Line et des industriels tels qu’Airbus et ses sous-traitants, d’autres ont confirmé qu’ils restaient fermés jusqu’à mi-avril comme Manitou.

« Petit à petit, une reprise s’amorce dans plusieurs secteurs : l’industrie, le transport, les magasins de bricolage… Beaucoup de clients souhaitent reprendre le travail mais sont en attente de fiches métiers de la part de la direction du travail pour connaître les conditions dans lesquelles il est possible de faire retravailler leurs collaborateurs », note Laurent Guilbaud, président Grand Ouest chez In Extenso (300 salariés, 25 M€ de CA). « L’ensemble du dispositif est complexe », observe également Valérie Tamagny-Ferrier, présidente de la Fédération Bancaire Française en Pays de la Loire et directrice régionale de BNP Paribas. Elle échange régulièrement sur ce sujet notamment avec la Région, la préfecture mais aussi la CCI.

Chômage partiel : des dossiers en attente

« Dans la panique, beaucoup d’entreprises ont mis leurs salariés en chômage partiel (80 % de nos clients l’ont fait) mais la Direccte met du temps à répondre. Nous n’avons pas subi beaucoup de refus mais cela prend du temps avant que les dossiers soient examinés. Au-delà d’invoquer le Covid-19, chaque dossier doit être motivé. C’est notre travail actuellement de faire en sorte que les demandes de nos clients soient bien documentées et recevables », explique Laurent Guilbaud, président Grand Ouest chez In Extenso.

Angoisse générale sur la trésorerie

Mis en place le 25 mars, le Prêt Garanti par l’État qualifié par HLP Audit de « très bon dispositif », même « exceptionnel », selon Valérie Tamagny-Ferrier, présidente de la Fédération Bancaire Française des Pays de la Loire, pourrait pourtant ne pas être suffisant.

Valérie Tamagny-Ferrier (FBF Pays de la Loire) : « Je rappelle que c’est un prêt accordé par les banques et non par l’État, et que si l’État est garant à 90 %, les 10 % restants sont assumés par les banques. C’est donc à elles de faire l’analyse adaptée et proportionnée. Il est bien entendu toujours possible de faire appel à la médiation du crédit en cas de difficulté avec son établissement bancaire. »

« Je crains que certaines ne puissent pas payer leurs salariés fin avril »

Laurent Guilbaud (In Extenso Grand Ouest) : « En ce qui concerne la trésorerie, le problème est qu’il n’y a pas d’homogénéité entre ce qu’exigent l’État, Bpifrance, les banques pour monter les dossiers de financement. Certaines banques demandent un plan de trésorerie sur 6 mois, d’autres sur une plus longue durée. »

Vincent Goldie est expert-comptable et commissaire aux comptes chez le cabinet nantais ‎HLP AUDIT — Photo : Amandine Dubiez

Vincent Goldie (HLP Audit) : «  « Je redoute malheureusement des faillites d’entreprises dans les prochains mois. Il est à craindre que certaines ne puissent pas payer leurs salariés fin avril. Il y a donc une urgence pour certaines entreprises à mettre en place un PGE. Nous expliquons également aux entreprises qu’avec ce PGE, elles devront se remettre à jour des dettes créées dans la période actuelle, en régularisant les retards de règlement. Il faudra ensuite apprécier la durée adaptée pour rembourser ce prêt, immédiatement, ou probablement sur plusieurs années. A défaut, pour les situations trop compliquées, la mise en œuvre d’un mandat ad’hoc ou d’une conciliation sera probablement nécessaire pour traiter plus globalement les situations avec les partenaires bancaires. Je reçois aussi des appels de cédants qui comprennent qu’ils ne pourront pas revendre leur entreprise avant plusieurs mois. Il faut dans l’immédiat qu’ils empruntent et qu’ils attendent donc plusieurs mois avant de reprendre la vente. »

Télétravail et cybersécurité

Valerie_Tamagny-Ferrier est la directrice générale Ouest de BNP Paribas — Photo : BNP Paribas

Valérie Tamagny-Ferrier (FBF Pays de la Loire) : « Les banques sont considérées par l’État comme un opérateur d’importance vitale. Les agences restent ouvertes avec un système de rotation entre les équipes. Il y a une vraie solidarité entre les équipes. Concernant le télétravail, nous nous assurons que les collaborateurs peuvent réaliser les opérations demandées par nos clients en toute sécurité avec du matériel adapté et des consignes très précises. C’est un sujet très important, la sécurité des opérations est prioritaire dans la mise en place de ces nouveaux modes de travail. » Chez In Extenso et HLP Audit, les bureaux sont fermés. Chaque collaborateur travaille de chez lui avec son téléphone et son ordinateur.

Une période pas si profitable

Si les banquiers et cabinets d’expertise-comptable sont fortement sollicités, il n’est pourtant pas certain que cette période chargée leur soit profitable. « Nous avons par ailleurs stoppé toutes nos activités sur l’évaluation de l’entreprise, sur la transmission et tous les rendez-vous extérieurs », note Vincent Goldie. « Nous concentrons tous nos efforts à répondre aux situations d’urgence de nos clients dont le fameux PGE, décalant ainsi certains RDV moins urgents. », remarque Valérie Tamagny-Ferrier.

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