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Coronavirus - Arnaud Guillet (A5Sys) : « Seul dans nos bureaux déserts, j'ai éprouvé une sensation de fin du monde »
Témoignage Nantes # Informatique

Coronavirus - Arnaud Guillet (A5Sys) : « Seul dans nos bureaux déserts, j'ai éprouvé une sensation de fin du monde »

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L'entreprise de services du numérique A5Sys, installée près de Nantes, a mis l'ensemble de ses 82 collaborateurs en télétravail le 16 mars. Son dirigeant Arnaud Guillet témoigne.

Arnaud Guillet, dirigeant d'A5Sys — Photo : DR

L'entreprise de services numériques A5Sys (82 salariés, 6 millions d'euros de chiffre d'affaires), installée à Saint-Herblain près de Nantes, s'est résolue le 16 mars à mettre l'ensemble de ses 82 collaborateurs en télétravail. Arnaud Guillet, son dirigeant, revient sur l'étrange moment où il s'est retrouvé seul dans les locaux désertés de son entreprise spécialisée dans le développement d’applications métiers sur mesure.

« Face à la montée en puissance de l’épidémie, nous avons d’abord éprouvé un sentiment d’incrédulité par rapport à ce qui se passait. Puis la réalité s’est imposée. Dès le lendemain de la première intervention d’Emmanuel Macron (le 13 mars, NDLR), nous avons réuni un comité de direction exceptionnel pour faire un point et envisager toutes les hypothèses. Nous avons également constitué une cellule de crise, étendue à tous nos managers pour être en mesure de présenter en toute transparence les mesures que nous aurions à prendre aux salariés. Nous les avons informés demi-journée par demi-journée en laissant de la place aux questions. Pour avoir une vision complète de la situation, nous avons adressé à l’ensemble du personnel différents formulaires pour recenser ceux qui avaient des problèmes de garde d’enfants, ceux qui étaient équipés d’outils permettant de travailler à distance… Tous ces renseignements ont été traités dans la journée du 13 mars. Cela nous a permis, dans un premier temps, de basculer la moitié de nos 82 salariés en télétravail en accordant la priorité à ceux qui avaient des enfants à garder.

Des situations de fragilité, des crises de larmes

Très rapidement, nous avons constaté que c’était insuffisant. Dès dimanche 15 mars, les cadres m’ont appelé spontanément en demandant à faire un point par Skype et nous avons pris la décision de placer 100 % des collaborateurs en télétravail.

Le lundi (16 mars, NDLR) a été une journée marathon. Nous avons examiné au cas par cas les situations individuelles pour détecter les situations de fragilité : par exemple, des salariés un peu esseulés, notamment des jeunes célibataires éloignés de leurs familles… Nous avons vécu des crises de larme. Il a fallu gérer ces aspects psychologiques. Je ne pouvais même pas prendre ces collaborateurs dans mes bras pour les réconforter. Il fallait garder de la distance et c’est difficile dans ces moments. Il a également fallu régler les problèmes techniques. Le service informatique a préparé 25 postes en 24 heures Une performance ! Nous nous demandions également si le système allait tenir mais cela a été le cas.

Maintenir le lien social

Pour maintenir le lien social, nous avons pris l’engagement d’envoyer un mail d’information par jour à l’ensemble des salariés. Chaque jour à 11 h 30, les managers font également un point par Skype avec leurs équipes, y compris les personnes que nous avons finalement dû nous résoudre à mettre en chômage technique en raison du report de certains projets. Cela concerne un quart de notre personnel. La direction se réunit tous les jours pour faire le point. En ces temps difficiles, nous avons besoin de collectif. L’entreprise est l’un des derniers liens avec la vie sociale.

Et puis mardi midi, j’ai vécu un moment étrange. Mon associé et moi, nous sommes déplacés dans nos locaux pour les sécuriser et accueillir les quelques salariés venus chercher des documents. En fin de matinée, je me suis retrouvé seul dans nos 1 500 m² de bureaux déserts avec une impression de fin du monde. Les seuls signes de vie étaient les signaux lumineux sur les écrans qui m’indiquaient que les salariés étaient en activité chez eux. »

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