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Comment LNA Santé soigne sa croissance
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Comment LNA Santé soigne sa croissance

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La crise sanitaire ne fait que conforter la stratégie ambitieuse de LNA Santé, sur un marché de la santé en pleine croissance. Le groupe familial nantais qui gère 72 établissements de soins dont 49 Ehpad vient de conclure la plus importante opération de son histoire avec la reprise du Groupe normand Clinique Développement.

— Photo : Franck Gallen

Depuis cet hiver et le début de l’épidémie de Covid-19 en France, plus d’un tiers des décès liés au coronavirus (30 000 morts) se sont déroulés en Ehpad. Face à cette situation inquiétante, le nantais LNA Santé ( ex Le Noble Age) était, comme tous les gestionnaires d’Ehpad, en première ligne pour gérer la crise sanitaire. Premier acteur du marché à confiner ses établissements, une semaine avant la décision ministérielle, LNA Santé est parvenu à maintenir un faible taux de surmortalité de 1,50 % (119 décès).

Une prudence qui permet au groupe gérant des établissements médicaux-sociaux et sanitaires (6 700 salariés, 473 M€ de CA exploitation en 2019) de ne pas remettre en question son ambitieuse stratégie. « Notre projet stratégique mis en place en 2017 sort conforté par la crise », affirme Willy Siret, directeur général délégué du groupe.

En juillet, le groupe a réussi, malgré la baisse d’activité enregistrée et un recul de son résultat de plus de 70 %, à présenter un chiffre d’affaires semestriel en hausse de 9,4 % à 252 millions d’euros, porté par ses acquisitions (+2,8 % à périmètre constant). Fin 2019, le groupe coté en Bourse avait dépassé ses objectifs en générant une croissance organique de 5,5 % et une marge Ebitda de 12,8 % supérieure à l’objectif de 12 %.

La plus importante opération de son histoire

Son plan stratégique baptisé « Grandir Ensemble 2022 » n’est donc pas remis en question. LNA Santé prévoit d’atteindre d’ici à 2022, son objectif fixé il y a quatre ans de gérer une centaine d’établissements avec 10 850 lits et une croissance organique annuelle de plus de 3,5 %. Le groupe nantais gère aujourd’hui 8 156 lits, dans 72 établissements (49 Ehpad en France et en Belgique, 15 cliniques de soins de suite et de réadaptation, 7 établissements d’Hospitalisation À Domicile (HAD), 1 clinique psychiatrique et 2 centres de santé.

Cette année, le groupe compte, par exemple, agrandir un Ehpad aux Sables d’Olonne, en reconstruire un à Pessac près de Bordeaux, sans oublier l’ouverture d'un établissement de soins et de réadaptation à Achères (Yvelines) et le projet de reconstruction du centre de réadaptation de l’Estuaire à Nantes. Mais la plus importante opération de l’année, et même de l’histoire du groupe LNA Santé vient d'aboutir. LNA Santé vient de reprendre le groupe normand Clinique Développement (76,6 M€ de CA, 1 000 salariés, 828 lits) et ses 6 établissements situés entre Granville et Alençon.

Si ses ambitions sont grandes, LNA santé fait pourtant figure de sage sur ce marché hyper concurrentiel de la gestion de maisons de retraite, dominé par les deux géants Orpéa (65 000 salariés) et Korian (47 000 salariés). Tous deux, affichent des chiffres d’affaires qui dépassent les 3,5 milliards d’euros avec respectivement 97 000 et 83 000 lits exploités partout en Europe.

4 millions de séniors en perte d’autonomie en 2050

LNA Santé gère 49 Ephad en France. — Photo : Franck Gallen

Tous trois ont le même plan de route : continuer de grandir, créer des lits et des nouveaux établissements par croissance externe. Car le marché de la gestion de la dépendance des personnes âgées est en plein boom, avec l’arrivée prochaine des papy-boomers. Le nombre de résidents en Ehpad devrait augmenter en moyenne de 2,2 % par an jusqu’en 2040, selon les données de l’Insee. À l’horizon 2050, 4 millions de seniors seront en perte d’autonomie, contre 2,5 millions aujourd’hui. Il faudrait ainsi augmenter de plus de 50 % le nombre de places en hébergement entre 2015 et 2045, d’après cette même étude de l’Insee.

Conscient de l’ampleur de la vague, le gouvernement a prévu des annonces fortes dans le cadre de la loi « Grand âge et autonomie ». Parmi les grandes mesures attendues : augmenter les financements dédiés à l’autonomie, actuellement éparpillés entre diverses administrations. Annoncée pour cette fin d’année, elle a finalement été reportée à 2021 à cause de la crise sanitaire.

En attendant les détails de ce plan, chaque groupe a choisi une stratégie différente. Si Korian et Orpéa se dépêchent de poser leurs pions en Europe, LNA santé préfère rester prudent et pragmatique et choisit de densifier son maillage en France, dans le grand ouest, l’Île-de-France et le sud-est. Une différence d’approche qui s’explique par la gouvernance des entreprises. Contrairement aux deux leaders du secteur, LNA Santé reste un groupe familial. Jean-Paul Siret a créé Le Noble Age à Vertou en 1992. Son fils, Willy Siret est l’actuel directeur général délégué aux opérations. Au capital, la famille Siret et les autres familles fondatrices du groupe (non connues) détiennent 30 % des parts au sein d’un pacte d’actionnaires qui rassemble également des dirigeants actionnaires et des fonds d'investissements.

Loin de la « folie » des fonds d’investissement

LNA Santé avait confiné ses établissements une semaine avant les prérogatives du gouvernement. — Photo : Franck Gallen

Un modèle de gouvernance qui amène LNA Santé à rester sage dans sa croissance. « Nous n’irons pas dans des niveaux de prix d’acquisition que l’on peut voir avec certains fonds d’investissement », explique Willy Siret, estimant que ces prix atteignent « une folie ». « Nos opportunités de croissance vont rester sur des segments moins travaillés que d’autres », poursuit le directeur général délégué.

Le groupe familial basé à Vertou s’intéresse notamment à la reprise d’établissements publics ou associatifs. « Nous avons déjà réalisé 15 reprises de ce type, nous avons une culture compatible et un savoir-faire », estime le dirigeant.

Chaque acquisition amène ensuite à une restructuration. C’est là que LNA Santé consolide ses marges. À chaque reprise, le groupe restructure les locaux en essayant de construire des bâtiments neufs adaptés et suffisamment grands pour proposer un nombre important de lits et places et réaliser des économies d’échelle. Toute la maîtrise d’œuvre et la maîtrise d’ouvrage se font en interne, avant la vente des murs à des investisseurs. Il faut en moyenne entre trois et cinq ans pour que les établissements atteignent ce que le groupe appelle « un régime de croisière ».

Viser l’économie d’échelle

C’est justement cette bonne organisation architecturale et managériale qui a permis à LNA Santé de traverser la crise sanitaire sans trop d’encombres. « Nos établissements sont de plus grande taille et sous-divisés en petit collectif de 20 à 30. Ce qui a permis d’avoir un confinement progressif. On a pu sous diviser », détaille Willy Siret.

La grande taille des établissements permet aussi de mutualiser les savoir-faire en ayant au même endroit à disposition des équipes transverses, (médecins, IDE, thérapeutes, restauration, hôtellerie) et d’avoir aussi un encadrement soignant de proximité. LNA Santé investit également dans la télémédecine. À Strasbourg, l’entreprise s’apprête à lancer l’Institut prévention Santé Diabète Grand Est. Objectif : permettre le suivi continu de patients diabétiques en présentiel et à distance grâce à un centre de santé et à une application.

Parallèlement, LNA Santé se positionne sur les services d’Hospitalisations à domicile (HAD), un créneau plébiscité par le gouvernement et qui devrait monter en puissance dans les prochaines années. LNA Santé s’est lancé dans cette activité il y a 10 ans et enregistre déjà de belles performances. Là encore, la crise sanitaire a validé ce modèle de soin. Sur le premier semestre, le groupe de Vertou présente une croissance de 15,6 % en HAD. Les performances du nantais sont en tout cas saluées en Bourse. Alors que les géants européens, Orpea et Korian ont regagné respectivement 44 % et 23 % en Bourse depuis le point bas du marché en mars, LNA Santé a bondi de 51 % sur cette période.

ENCADRé :

Coronavirus : un surcoût de près de 13 millions d’euros

LNA Santé (6 700 salariés, 473 M€ de CA exploitation en 2019) a estimé à 12,8 millions d’euros les impacts économiques de la crise sanitaire au 30 juin 2020, incluant les primes exceptionnelles versées aux salariés, les renforts de soignants, le surcoût des équipements individuels de protection ainsi que les pertes d’activité (restrictions d’entrée en EHPAD, déficit d’admissions en soins de suite et réadaptation…), non compensés par l’État. Le groupe coté en Bourse dirigé par Jean-Paul Siret présente un résultat net semestriel en recul de 70 % à 3 millions d’euros. Ces impacts devraient être moins marqués au second semestre, estime le groupe. Depuis la propagation du coronavirus en France, il a mis en place « une cellule de crise décisionnelle » qui, chaque jour, informe le personnel de ses 71 établissements des mises à jour du protocole pour prévenir les contaminations.

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