Loire-Atlantique
Claude Robin (Groupe Amarris) : « Il faut être parfois fou pour entreprendre »
Interview Loire-Atlantique # Services aux entreprises

Claude Robin PDG fondateur du groupe Amarris Claude Robin (Groupe Amarris) : « Il faut être parfois fou pour entreprendre »

S'abonner

Ses victoires mais aussi ses échecs, la digitalisation du métier d’expert-comptable, ses relations parfois difficiles avec ses actionnaires et son associé… Claude Robin n’élude rien. Le PDG et fondateur nantais du groupe Amarris (13,5 M€ de CA, 220 salariés), raconte son aventure entrepreneuriale dans Itinéraire d’un entrepreneur bousculateur d’ordre établi aux éditions Publishroom Factory.

Claude Robin, fondateur et PDG du groupe Amarris, basé à Saint-Herblain. Il sort un livre racontant l'histoire de son groupe et son quotidien d'entrepreneur — Photo : JDE

Le Journal des Entreprises : Pourquoi avoir écrit ce livre Itinéraire d’un entrepreneur bousculateur d’ordre établi ?

Claude Robin : J’ai commencé à écrire il y a près de deux ans quand j’ai eu des relations difficiles avec mes actionnaires. Cela me permettait de raconter ce que je vivais, un peu comme une thérapie. J’écrivais aussi pour ne pas oublier l’histoire du groupe Amarris, que j’avais envie de partager avec mes collaborateurs. La parution de ce livre correspond également à un moment où le groupe Amarris a 20 ans et se prépare à se développer partout en France en franchise. Je l’enverrai donc à mes futurs collaborateurs afin qu’ils s’imprègnent de l’histoire de l’entreprise.

Vous revenez avec une grande franchise sur toute l’histoire de votre entreprise créée il y a 20 ans, notamment les relations tendues avec les actionnaires, ou encore la méfiance que vous inspiriez à l’Ordre des Experts-Comptables lors de la création de ECL Direct. Comment ça s’est passé ?

C. R. : Nous avons été convoqués au Conseil supérieur de l’ordre des Experts-Comptables qui s’inquiétait de l’offre en ligne que nous lancions avec ECL direct, un service d’expertise comptable en ligne qui compte 300 000 visites par jour. Quand on démarre de rien dans un marché assez codifié comme l’est celui de l’expertise comptable, et ce sans réseau, il faut sortir du cadre, être créatif, imaginer des offres pour que cela fonctionne. Je ne viens pas d’une famille d’entrepreneurs, mon père était ouvrier aux Chantiers de l’Atlantique. Il faut être parfois fou pour se lancer, c’est un peu ma devise… Mais aujourd’hui, nous sommes un groupe de 220 salariés avec un modèle économique nouveau basé sur la captation de contacts sur le net. C’est un schéma atypique sur un marché où 85 % des acteurs sont des cabinets d’experts-comptables de 8 salariés.

Pouvez-vous expliquer comment vous vous êtes lancé sur certains créneaux en tentant de vrais coups de poker ?

C. R. : Oui, on s’est par exemple lancé en 2008 dans la gestion de la fiscalité des loueurs de meublés, sans être un spécialiste du secteur. Depuis, nous sommes gérons plus de 6 000 clients et faisons partie des 10 cabinets français dans le secteur. On pénalise l’échec en France mais c’est inévitable quand on est créateur d’entreprises.

Vous racontez aussi votre quotidien de chef d’entreprise qui est, notamment, de chercher de la trésorerie auprès de fonds de capital-risque avec lesquels les relations ne sont pas toujours faciles. Pouvez-vous nous en dire plus ?

C. R. : Quand on est entrepreneur et qu'on vit en mode start-up, on vit au quotidien avec des problèmes de trésorerie. Il m’est arrivé de devoir chercher un million d’euros la veille pour le lendemain. C’est la vie des entreprises que l’on essaye d’épargner à ses collaborateurs. Dans le livre que j’ai écrit, j’appelle les comités d'actionnaires, où était présent entre autres le fonds de capital-risque, les « Yakafokon » parce qu’ils avaient beaucoup de reproches à faire et peu de bienveillance. C’est ce que j’ai ressenti, notamment lorsqu’on se retrouve dans des réunions où il faut constamment se justifier, rendre des comptes parce que l'on s'écarte du business plan.

Pouvez-vous nous raconter un épisode marquant que vous évoquez dans votre récit ?

C. R. : J’ai vécu un contrôle fiscal en 2016 comme une réelle injustice. L’administration a utilisé une jurisprudence qui datait de 1974 pour nous reprocher une démarche qui avait pourtant été validée par les commissaires aux comptes. Nous devions à l’origine payer un redressement de 350 000 €, somme qui a été réduite à 15 000 € après deux ans d’échanges entre avocats. L’administration ne se rend pas compte du stress que cela génère.

En 2017, vous hésitez à vendre votre entreprise et vous décidez finalement de reprendre les parts de votre associé et du fonds. Pourquoi ?

C. R. : Les relations que j’ai eues avec mon associé cofondateur d'ECL ont été l’élément déclencheur pour que je rachète ses parts et celles des autres actionnaires. Être associé, c’est comme un mariage. Les séparations provoquent les mêmes conséquences que dans la vie privée. Aujourd’hui, je détiens 53 % des parts, les fonds (Crédit Mutuel Arkea, Ouest Croissance, BNP Développement) en ont 25 % et le reste est détenu par 15 salariés. Il y a 15 managers associés mais seuls 3 sont des experts-comptables.

Comment voyez-vous l’avenir d’Amarris ?

C. R. : Nous venons de racheter Compta-Facile, un site qui génère 14 millions de visiteurs par an. ECL Direct apporte 300 000 visiteurs par mois. Nous visons les 15,5 M€ de CA l’an prochain en ouvrant un bureau à Lyon et en lançant des franchises. Dans 10 ans, on sera une société de services et il se peut que la comptabilité ne représente que 20 % de notre activité contre 50 % aujourd’hui de nos marges.


Livre Itinéraire d’un entrepreneur bousculateur d’ordre établi, Claude Robin, éditions Publishroom Factory.

Loire-Atlantique # Services aux entreprises