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Après 140 ans, la famille fondatrice du groupe Lemer passe la main
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Après 140 ans, la famille fondatrice du groupe Lemer passe la main

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Laurent Lécole vient de prendre les commandes du groupe Lemer. Il aura fallu près de huit ans au directeur général pour parvenir à convaincre la famille Lemer de lui céder la fonderie de plomb créée il y a 140 ans.

— Photo : Le Journal des Entreprises

Pour la première fois de sa longue histoire, le groupe Lemer est dirigé par un patron qui n’est pas un membre de la famille Lemer. Laurent Lécole, jusqu’ici directeur général de la Fonderie Lemer et de la Fonderie Dejoie, aura mis près de 8 ans à convaincre la famille fondatrice de son projet de reprise.

Le dernier P-dg des fonderies Lemer et Dejoie, c’était Jacques Lemer, décédé en 2008. Il avait dirigé l’entreprise de Carquefou pendant 50 ans, jusqu’à sa mort en 2008, à 79 ans. Laurent Lécole était déjà directeur général. « Avec lui, on parlait en francs et en ancien francs. Mais il était toujours très jeune dans sa tête, très clairvoyant sur la stratégie», se rappelle-t-il. C’est pour poursuivre son œuvre qu’il souhaite reprendre l’entreprise après sa mort. Mais la famille n’est pas d’accord. Il revient à la charge, sans succès. « Pendant des mois, j’ai dû faire visiter l’entreprise à mes concurrents intéressés par une reprise, cela a été très dur à vivre», se souvient-il.

Le nouveau patron reste minoritaire au capital

Il parvient finalement à convaincre la famille il y a quelques mois. Laurent Lécole reste minoritaire puisqu’il ne détient que 7% du capital. « Je ne l’ai pas fait pour des raisons financières. Je suis tout simplement très attaché à cette entreprise et aux salariés que je connais depuis 12 ans, je les vois même le week-end pour certains», raconte-t-il. Ce sont finalement ses clients, en quelque sorte, qui détiennent le capital de l’entreprise. DCNS, STX, Airbus ont en effet souscrit au fonds Atalaya d’ACE Management, qui apporte 60% du capital, en collaboration avec Ouest Croissance, la société de capital investissement de la Banque Populaire du Grand Ouest, et Litto Invest, la société de capital-risque. Les salariés ont aussi contribué à hauteur de 10% et Pascaline Lemer, une des filles de Jacques Lemer a investi 25%, « pour faire perdurer l’œuvre de son père », précise Laurent Lécole.

Premier sur les plombs de pêche, quille de bateau, et pièces de batterie

Car Jacques Lemer, près de 10 ans après son décès, marque encore l’entreprise et ses 59 salariés. « Son bureau est devenu une salle des réunions. Mais certains ouvriers qui ont 30 ans d’ancienneté, refusent toujours d’y entrer, encore très marqués par l’aura du patron », explique Laurent Lécole. Il affirme qu’il ne changera pas la stratégie de l’entreprise élaborée il y a des années. « La fonderie est rentable, nous sommes les premiers sur le marché des plombs de pêche, premier sur les pièces de batterie et premier sur les quilles de bateau », indique-t-il.

La quille du bateau d'Armel Le Cléac'h

C’est la fonderie Lemer qui a fourni la quille du bateau d’Armel Le Cleac'h, vainqueur du Vendée Globe. C’est aussi le groupe Lemer qui livre chaque année à Décathlon 2,5 millions de plombs de pêche ou qui fabrique pour le groupe La Poste les boites aux lettres. Le groupe Lemer réalise 11 millions d’euros de chiffre d’affaires. « L’objectif c’est de l’augmenter de 5 à 7% chaque année pendant 4 ans », précise Laurent Lécole.

L'immense marché du démantèlement de centrales nucléaires

Il compte pour cela en partie sur le marché du démantèlement d’équipement nucléaire. Le plomb est en effet le seul rempart pour protéger les personnes et les biens de la radioactivité. Les enjeux sont considérables. Le démantèlement de la centrale de Fessenheim, par exemple, pourrait nécessiter l’utilisation de 300 à 500 tonnes de plomb. Sur ce marché de la radioprotection, le groupe Lemer doit faire face à de solides concurrents.

Il doit aussi jongler avec une forte volatilité des prix du plomb. « Il a pris plus de 50% depuis juillet », constate Laurent Lécole. Il doit donc jouer sur la logistique et les stocks pour continuer à livrer les clients sans sacrifier les prix, tout en continuant d'investir dans un laboratoire de recherche et développement pour rester au top de l'innovation. « On reste sûr d’une chose, c’est que rien n’est sûr », commente le nouveau P-dg.

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