Rennes
Stade Rennais FC : « Quelle PME voit son travail autant médiatisé ? »
Interview Rennes # Services # Sport

Jacques Delanoë président du conseil d'administration du Stade Rennais FC Stade Rennais FC : « Quelle PME voit son travail autant médiatisé ? »

S'abonner

Le président du conseil d’administration du Stade Rennais Football Club (SRFC) vient de souffler sa première bougie à la tête d’un club qui est aussi une entreprise. Mais pas une entreprise comme les autres. Nouveau souffle, nouvelles ambitions, Jacques Delanoë revient sur son arrivée à la présidence du Stade Rennais.

— Photo : Pierre Gicquel

Le Journal des Entreprises : La présidence du Stade Rennais est assez atypique. Elle se fait en binôme avec Olivier Létang. Comment sont répartis les rôles ?

Jacques Delanoë : Je suis président du board, président non-exécutif du Stade Rennais, chairman comme disent les Anglo-Saxons, je n’ai donc pas vocation à en assumer la direction générale. C’est à Olivier Létang, en tant que président délégué, que revient cette tâche et il le fait très bien avec beaucoup de compétences et d’implication. Ma mission consiste à veiller à ce que l’organe de direction du club se porte bien, de permettre au conseil de tenir son rôle de contrôle et de faire en sorte que chacun ait les moyens de travailler dans les meilleures conditions.

« Travailler en binôme est, selon moi, le signe d’une bonne gouvernance : il y a plus d’esprit dans deux têtes que dans une seule. »

Pour en revenir à cette double présidence, travailler en binôme est, selon moi, le signe d’une bonne gouvernance. J’ai en effet tendance à croire qu’il y a plus d’esprit dans deux têtes que dans une seule. Dans l’attelage que nous formons avec Olivier, je serais bien incapable de faire tout ce qu’il fait, car il vient du football et il vit à 200 % pour le football.

Pour ma part, je suis un passionné du Stade Rennais, et du football en général. J’ai mené une belle carrière chez Euro RSCG, auprès de Jacques Séguéla, et le football n’est donc pas mon métier. À la demande de la famille Pinault je suis garant de l’institution et de son ancrage breton. Avec Olivier, nous nous challengeons mutuellement. Il m’associe à toutes ses réflexions et moi je l’aide à réfléchir et je lui ouvre les portes locales.

Est-ce que ce duo est une idée de François-Henri Pinault, propriétaire du club ?

J. D. : En effet, c’est un choix pensé par François-Henri Pinault, en accord avec son père. Car contrairement aux bruits infondés qui courent, ils ont une vision totalement partagée du Stade Rennais et de ce qu’ils veulent en faire.

« Si l’on m’avait demandé de présider un autre club, je n’aurais jamais accepté. Le Stade Rennais, c’est une histoire de cœur ! »

Je n’ai rencontré Olivier qu’une dizaine de jours avant notre prise de fonction. Heureusement nous partageons des valeurs communes et tout s’est passé très positivement. Si l’on m’avait demandé de présider un autre club, je n’aurais jamais accepté. Le Stade Rennais, c’est une histoire de cœur !

Le Roazhon Park, qui reçoit les matchs du Stade rennais, a l'un des meilleurs taux de remplissage du championnat. Il accueille aussi de nombreux évenements d'entreprises, comme les Rencontres du Grand Ouest où une trentaine de start-ups et de fonds d'investissements se sont rencontrés en octobre dans les loges — Photo : Pierre Gicquel

Un club de football professionnel est aussi une entreprise. Pouvez-vous nous présenter cette entreprise pas comme les autres ?

J. D. : Le Stade Rennais Football Club, ce sont 207 salariés en équivalent temps plein et plus de 500 collaborateurs les soirs de match. Notre budget, en croissance, est de 60 M€ sur la saison 2018-2019. Nos ressources sont divisées entre les droits TV, loin devant, suivis par le sponsoring, la billetterie et le merchandising. 80 % des maillots vendus en début de saison étaient floqués Ben Arfa. Avec une belle saison 2017-2018, où nous avons fini cinquième du championnat, nous avons le sentiment qu’un vrai souffle ne demande qu’à s’amplifier.

« 80 % des maillots vendus en début de saison étaient floqués Ben Arfa. »

Mais le football est le football et la consolidation des progrès sportifs reste fragile et compliquée, elle demande constance et patience dans un monde qui en manque cruellement… Nous comptons plus de 11 000 abonnés (contre 9 000 la saison dernière) et le coefficient de remplissage du stade est passé de 79 % l’an dernier à 83 % cette année, avec près de 24 000 spectateurs par match en moyenne. Tout cela est encourageant mais je ne fais pas le malin, je sais que tout cela est très fragile.

Enfin, il ne faut pas oublier que le Stade Rennais c’est aussi un club qui compte 220 licenciés, encadrés par 40 bénévoles. C’est en effet une PME un peu particulière, hyper-médiatisée. Quelle autre PME voit son travail autant médiatisé ?

Après de nombreuses années de gestion plutôt sages, la belle saison 2017-2018 réalisée par le club et des recrutements ambitieux opérés cet été sont-ils le signe que le Stade nourrit de nouvelles ambitions ?

J. D. : L’ambition n’exclut pas la sagesse ! Si l’on regarde les recrutements de Clément Grenier, Hatem Ben Arfa, ou Ismaïla Saar avant notre arrivée, le club, avec le soutien de la famille Pinault, a prouvé depuis longtemps qu’il savait prendre des décisions porteuses d’ambition. Nous veillons cependant également à avoir une gestion saine du club. Nous ne sommes ni dispendieux ni frileux et comme dans n’importe quelle entreprise, nous veillons à optimiser chaque euro.

On voit en ce moment les clubs européens essayer de développer leur image de marque en Chine ou aux États-Unis. Est-ce que le Stade Rennais nourrit ce genre d’ambition à l’international ?

J. D. : Nous sommes une marque sportive, et en tant que telle notre image est profondément liée à nos résultats sportifs. Quand on gagne, tout va bien. Quand on perd, tout va mal. C’est binaire ! Toute la difficulté d’un club de football réside dans le fait de construire dans la durée, à partir d’objectifs sportifs souvent à très court terme.

« Il faut rester humble, le Stade Rennais n’est ni le Barça, ni le Milan AC ! »

Cette saison, nous avons la chance de jouer l’Europa League, ce qui nous permet d’exister sur le plan international. Mais il faut rester humble, le Stade Rennais n’est ni le Barça, ni le Milan AC ! Cependant, la marque SRFC a été créée en 1901. Je rappelle d’ailleurs que nous sommes le 4e club professionnel français le plus ancien, c’est donc bien ce que l’on appelle une marque patrimoniale, avec un attachement qui va au-delà des générations, qui est populaire dans le sens où, dans les gradins, on fait fi des classes sociales. Avec 62 ans de présence en Ligue 1, notre marque est reconnue et tout particulièrement pour sa formation.

Samsic a resigné pour cinq ans avec le Stade rennais, un record de longévité dans le sponsoring sportif. De gauche à droite : Thierry Geffroy (PDG de Samsic RH), Olivier Létang (président exécutif du Stade rennais FC), Christian Roulleau (président fondateur du groupe Samsic) et Jacques Delanoë (président du conseil d'administration du SRFC) — Photo : Baptiste Coupin

Une autre longévité remarquable, c’est celle de votre sponsor maillot, le groupe rennais Samsic, qui vient de signer à nouveau pour cinq ans. Vous continuez à jouer la carte du local ?

J. D. : Le partenariat avec le groupe Samsic est exemplaire et il est en passe de battre le record de longévité en L1. Nous en sommes très fiers comme nous sommes très fiers d’avoir des partenaires qui sont à la fois des groupes internationaux, mais aussi des groupes du cru. Samsic, Del Arte, Blot, Launay, Convivio, sans oublier la Ville de Rennes. Cela participe à l’ancrage local du club. Nous n’avons pas qu’une vision économique du partenariat, nous en avons également une vision sociétale de partage. C’est ainsi que nous comptons 800 entreprises partenaires.

Ces partenaires sont regroupés au sein du Klub Affaires. De quoi s’agit-il et que s’y passe-t-il ?

J. D. : Le football et le Stade Rennais sont un vecteur de lien social inimaginable. Contrairement aux idées reçues, le Klub Affaires n’est pas un endroit où l’on signe un contrat, où l’on sort son carnet de chèques. C’est un endroit où l’on se parle, où l’on partage joies et peines. Quand on vient à chaque match, cela crée des liens. Et de manière indirecte ensuite cela peut générer des relations commerciales, du business.

Rennes # Services # Sport