Ils se croisaient lors des réunions de cadres au sein de la banque Crédit Mutuel Arkéa, dans laquelle ils évoluaient chacun depuis près de quinze ans, l’un comme directeur d’agence, l’autre comme chargé de clientèle entreprise. Jusqu’à l’année 2015, où Arnaud Guilleux et Emmanuel Frattini ont quitté leur emploi et mis leur envie commune d’entreprendre. Autour d’une idée simple : créer une plateforme web qui permettrait à tout un chacun, en France, de devenir son propre courtier en crédit immobilier.
Courtier en dur et en ligne
« Nous avons commencé par créer Agef, un cabinet de courtage et de conseils en crédit immobilier qui emploie désormais 12 collaborateurs », explique Arnaud Guilleux, président fondateur de MonEmprunt.com. Siégeant à Rennes, Agef compte aussi des mandataires à Ploërmel, Vannes, Saint-Malo et Vitré. « De par notre expérience dans la banque, nous avions constaté que le courtage immobilier n’est pas simple, même pour les professionnels, et qu’aucun site ne proposait jusqu’ici un service entièrement dématérialisé. Or, la nouvelle génération est très friande de services numériques », ajoute Emmanuel Frattini, cofondateur et directeur général de MonEmprunt, jeune fintech rennaise qui compte, elle aussi, 12 salariés.
Simplifier l’accès au prêt
Deux ans après la création d'Agef, la première version du site est lancée en octobre 2017. Simulation de prêt, conseil personnalisé, montage du dossier, sélection des banques et négociation, scan des justificatifs via un smartphone… Le service est gratuit, MonEmprunt.com se rémunérant grâce aux banques, comme un courtier classique. « L’objectif est de faire sauter le verrou anxiogène que comporte une demande de prêt immobilier », résume le directeur général.
« Traditionnellement il faut deux mois pour obtenir une validation de prêt. Nous avons fait passer ce délai à trois semaines »
Après avoir rempli un rapide questionnaire, l’acquéreur potentiel obtient une liste restreinte des trois meilleures offres de crédit parmi 25 enseignes bancaires, dont les 13 enseignes nationales. « Ensuite, vous pouvez télécharger un tableau comparateur, où figure l’offre de votre propre banque, ainsi qu’un mandat pour aller plus loin », ajoute Arnaud Guilleux. Dans cette seconde étape, ils ont là encore apporté des solutions : « Traditionnellement il faut deux mois pour obtenir une validation de prêt. Nous avons fait passer ce délai à trois semaines », affirme Emmanuel Frattini.
10 000 dossiers gérés en un an
Après un an d’existence, le site a attiré plus de 100 000 visiteurs uniques et accompagné 10 000 dossiers jusqu’à la signature. « 80% de nos clients sont des primo-accédants, pour la plupart âgés entre 25 et 40 ans », détaille Arnaud Guilleux. Sur un marché français qui voit 200 milliards d'euros par an alloués en prêts immobiliers, la part des dossiers intermédiés par les courtiers a doublé en 10 ans, pour représenter près de 40% des dossiers aujourd’hui. Le courtage aussi évolue : « Il y a trois ans, 50% du marché du courtage était réalisé par de la renégociation de prêts mais cette vague est passée. Ce qui n’est pas inquiétant car lorsque les taux d’emprunts sont bas, cela augmente le nombre d’acquéreurs éligibles mais si demain le taux monte, vous aurez encore plus intérêt à faire appel à un courtier pour négocier le meilleur taux », estime Emmanuel Frattini.
1,5 M€ levés en novembre
Si les deux fondateurs ne communiquent pas encore leur chiffre d’affaires, ils annoncent une forte accélération du développement de la jeune fintech, afin d’atteindre, toujours depuis Rennes, « le top cinq des courtiers en ligne français », espère son président. Une première levée de fonds de 1,5 M€ opérée en novembre 2018 et à laquelle ont participé GoCapital, Sogescot (fonds issu du groupe rennais Secob) et Bpifrance, leur permettra de financer de la R&D, des recrutements (pour passer de 12 à 20 salariés d’ici à 2020) et une opération de communication sur le plan national.
Et après ?
« Il s’agirait ensuite d’aller à l’international », confient à l’unisson les dirigeants, en évoquant l’Angleterre, l’Allemagne ou l’Italie comme cibles potentielles. « Les règles bancaires sont les mêmes en Europe mais les démarches varient selon des pays. Il faudra donc d’abord se mettre au diapason. » Et sans doute trouver un nom en anglais.
Quant à l’idée d’une diversification vers d’autres types de crédits, les deux jeunes dirigeants écartent cette possibilité : « Nous y pensons mais c’est difficile. L’idée serait plutôt de rester sur l’immobilier tout en apportant de nouvelles solutions de financement au client, comme le crowdfunding, ou de développer des API pour les professionnels, comme nous l’avons fait pour le groupe Jeulin et Pierre & Vacances. »
