Trois lettres. M-B-A qui se dessinent en bleu, rouge ou vert, dans la nuit, sur la façade d’un nouveau bâtiment cubique. Visibles de la rocade rennaise attenante. Cela va se savoir : à côté des Legendre, Duval, Crédit Agricole ou Altran, MBA Mutuelle (160 salariés, 54 M€ de CA en 2019) a pris possession de son nouveau siège, boulevard Jean Mermoz, dans le quartier d'affaires de La Courrouze. Le groupe mutualiste, propriétaire des lieux, a investi 10 millions d’euros pour ce pavillon de 3500 m² conçu par le promoteur rennais Lamotte. Une soixantaine de collaborateurs, dont les équipes support et le comité de direction (7 personnes) occupent ce nouvel écrin, qui abrite aussi l’agence de Rennes et son centre d’appels. Deux plateaux de 600 m², aux 1er et 2e étages, sont eux réservés à de futures entreprises locataires.
S’inscrire dans la vie de la cité
« Cela fait 70 ans que nous sommes sur la place rennaise avec, au cœur de notre métier, l’assurance complémentaire. Nous souhaitions pouvoir accueillir nos adhérents et nos partenaires dans un bâtiment totem. Nous nous installons dans une zone en devenir, avec l’intention de nous inscrire dans la vie de la cité », présente Stéphane Lebret, directeur général du groupe, à la barre de l’entreprise depuis 2006 après en avoir gravi tous les échelons (Sylvie Dubreuil en est la présidente, NDLR).
MBA Mutuelle qui était jusque-là installée dans des bureaux au pied des Horizons prend de la hauteur, dans un immeuble moderne, ultra-lumineux, avec terrasse et vue imprenable sur la capitale bretonne. Une occasion pour l’entreprise de se rendre bien visible et d’ouvrir une nouvelle page de son histoire.
« Attachement à l’Ouest »
MBA Mutuelle se veut résolument tournée vers le local. Car on n’y reprendra pas à deux fois le mutualiste rennais, créé par des artisans et commerçants en 1947, à vouloir frayer avec des groupes nationaux, échaudé par son expérience de 2013, lorsqu’il se nommait Radiance, et avait rejoint le groupe Humanis, absorbé depuis par Malakoff. « Cela ne nous convenait pas et nous coûtait de l’argent, tranche Stéphane Lebret. Contre toute attente, en 2016, on a donc décidé de partir. Finalement, ce bâtiment, il est né d’une crise… » Tatiana Violle, secrétaire générale de MBA Mutuelle et membre du "codir" poursuit : « à ce moment-là, il a fallu se construire une nouvelle marque. Ça n’était pas simple pour une entité de 150 salariés. Nous nous sommes réinventés sous la marque MBA pour Manche Bretagne Atlantique. C’est le symbole de notre attachement à l’Ouest. Notre objectif, aujourd’hui, est de retrouver la notoriété de Radiance, en en faisant plus et mieux. »
Consolider ses positions
Avec un réseau de 24 agences installées en Bretagne, en Normandie, dans les Pays de la Loire et en Nouvelle Aquitaine, MBA Mutuelle se positionne comme un acteur majeur du parcours de soins dans le Grand Ouest. Le groupe compte quelque 90 000 adhérents. Il répond aux besoins des particuliers (85 % de son activité) et des entreprises (des PME essentiellement) sur les questions de santé mais aussi d’assurance et de prévoyance.
À l’heure où la norme est aux rapprochements, MBA Mutuelle, issue elle-même du mariage de plusieurs mutuelles régionales à Vannes, Angoulême, Nantes et Alençon, affiche son intention de rester une entreprise de territoire et indépendante. « Avec 2 % de parts de marché au niveau national, nous sommes un petit Poucet (face à des géants comme Harmonie Mutuelle ou MGEN, NDLR). Mais cela suffit à notre bonheur. Notre volonté est de consolider nos positions et de rester à l’Ouest, en faisant de Rennes notre étendard », détaille Stéphane Lebret.
Un environnement réglementaire contraint
Pas d’ambition démesurée donc pour MBA Mutuelle, dont la croissance s’étiole quelque peu ces dernières années. La réglementation ANI, votée en 2016, qui oblige les employeurs du privé à fournir une mutuelle de santé collective à leurs salariés, n’a pas joué en faveur du rennais, davantage tourné vers les contrats individuels. Et la suppression du dispositif CMU/ACS, voulu par les pouvoirs publics, remplacée par la C2S (complémentaire santé solidaire) vient de se traduire pour le groupe par une perte de 2 000 adhérents. Conséquence : la mutuelle prévoit un chiffre d’affaires légèrement contracté en 2020, à 52 millions d’euros. « Il y a 30 ans, nous étions libres de sortir les garanties que l’on voulait. Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus standardisés, éclaire le directeur général. On s’adapte, mais ça nous amène à réfléchir à notre stratégie. La prévoyance, par exemple, est très consommatrice de fonds propres. Mais comme, dans le même temps, nous n’augmentons pas les cotisations, il est normal que notre chiffre d’affaires stagne. » À but non lucratif, les éventuels excédents de MBA Mutuelle ne rémunèrent pas d’actionnaires. Ils sont réinvestis dans de meilleurs remboursements de soins, dans la prise en charge de nouveaux traitements et dans l’action sociale envers les plus fragiles.
Aider les entreprises locales
Plus qu’une société d’assurance, MBA veut apparaître, aux yeux de tous, comme une entreprise de l’économie sociale et solidaire. Et dans sa volonté de marquer le territoire de son empreinte, le groupe, qui dispose de liquidités importantes, voit au-delà de son business. Depuis deux ans, le conseil d’administration a ainsi fait le choix d’aider au développement économique local. Cela se traduit par des investissements dans les entreprises, soit en apport de trésorerie, soit en prise de participation. Stéphane Lebret développe : « On est actionnaire aujourd’hui d’Office Santé, un promoteur qui fait des maisons de santé. Il y en aura une nouvelle à Rennes sur l’ancien Hôtel-Dieu. À Saint-Jacques-de-la-Lande, on a également mis de l’argent dans SLS France, fabricant de prothèses dentaire. Grâce à cela, elle va développer son business model. On est aussi au capital de Kangourou Kids, spécialiste rennais de la garde d’enfants à domicile. C’est une belle entreprise qui développe des micro-crèches ». En 2019, la part de patrimoine réinvesti dans les entreprises locales a représenté 10 % du chiffre d’affaires de la mutuelle, soit 5,4 millions d’euros. « Plutôt que d’aller mettre de l’argent en Asie ou dans les grosses boîtes du CAC 40, je préfère aller voir les dirigeants des PME locales. Je discute avec eux, ils me racontent leur histoire. On sait pourquoi et vers quoi on s’engage », réagit Stéphane Lebret. « C’est un risque calculé. Les pourcentages sont bien maîtrisés. Ça ne va pas mettre en péril notre activité principale », complète Tatiana Violle.
En lien avec son histoire de mutuelle de travailleur indépendant, le groupe a aussi lancé il y a deux ans le prix Entrepreneuriat. MBA Mutuelle valorise ainsi des initiatives entrepreneuriales, avec comme finalité l'économie des séniors ou silver économie et le développement durable. En 2019, c’est l’entreprise rennaise « Tout en vélo », spécialisée dans le transport de mobilier en vélo, qui a été plébiscitée.
