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Coronavirus - Aladom : « Je préfère me préparer au pire tout en espérant que la reprise sera rapide »
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Guillaume Thomas PDG fondateur d'Aladom Coronavirus - Aladom : « Je préfère me préparer au pire tout en espérant que la reprise sera rapide »

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Le spécialiste rennais dédié aux services à la personne Aladom (19 salariés, 1,2 M€ de CA en 2019), dont le modèle économique est orienté B to B, est touché de plein fouet par la crise du coronavirus. Son PDG, Guillaume Thomas, a pris toutes les mesures nécessaires pour sécuriser sa trésorerie et croise les doigts pour une reprise rapide, post-confinement. Ce fin connaisseur du monde des start-up s’attend par ailleurs à des dégâts importants dans le secteur.

Face à la crise du coronavirus qui impacte fortement l'activité de sa plateforme de services, Guillaume Thomas, PDG d'Aladom, a mis la moitié de son équipe au chômage partiel — Photo : © Aladom

Le Journal des Entreprises : Comment faites-vous face à la crise et comment votre entreprise est-elle organisée pour poursuivre son activité ?

Guillaume Thomas : La crise a été soudaine, on ne l’a pas vue arriver. Un jour, on apprend que les enfants ne vont plus aller à l’école et le lundi d’après, tout le monde part en confinement. En une semaine, on passe d’une activité qui va bien à un « shutdown » (terme anglais qui signifie littéralement « fermeture », NDLR). Il a fallu agir très vite. En organisant le télétravail, ce qui n’a pas été trop compliqué, les salariés étant tous équipés de portable. Et en prenant des décisions rapides.

Quel est l’impact immédiat de cette crise pour votre PME ?

Guillaume Thomas : Il est brutal. En une semaine, 80 % de mon chiffre d’affaires s’est envolé. Aladom met en contact ceux qui ont des besoins avec ceux qui proposent des services (entreprises ou particuliers). Dans notre modèle économique, ce sont essentiellement les entreprises qui nous rémunèrent. Or, les 16 et 17 mars, tous nos clients nous ont contactés pour nous dire qu’ils arrêtaient leurs services. Ça laisse entrevoir ce que seront les semaines à venir. Je préfère me préparer au pire tout en espérant que la reprise d’après-confinement sera rapide. Des mesures d’urgence ont été prises par l’État et Bpifrance pour sauver les entreprises. J’espère que les beaux discours seront tenus. Notre entreprise existe depuis 2008 mais nous sommes tout juste à l’équilibre. Ma crainte, c’est la défaillance de certains de nos clients. On a de quoi tenir 2 à 3 mois mais ensuite…

« Ma crainte, c’est la défaillance de certains de nos clients. »

Comment sécurisez-vous votre entreprise dans ces conditions ?

Guillaume Thomas : J’ai pris la décision il y a quelques jours, avec mon codir, de mettre en chômage partiel nos collaborateurs du centre d’appels et les commerciaux, soit la moitié de l’équipe. Seules nos équipes de développement et du marketing restent mobilisées. Dans le même temps, j’ai réduit des dépenses fournisseurs, activé un report de prêt bancaire avec 6 mois de glissement, et demandé un report de charges URSAFF. Je regarde aussi le loyer. On fera tout ce qu’il faut pour sécuriser la trésorerie. Ce qui est dur, c’est de ne pas savoir combien de temps la crise va durer.

Photo : © Aladom

Dans les difficultés du moment, votre plateforme joue cependant un rôle citoyen en favorisant la mise en relation entre particuliers…

Guillaume Thomas : Oui, nous avons fait le choix de rendre gratuit ce service dès le 13 mars. Nous répondons à un vrai besoin sur de l’aide aux personnes âgées ou isolées. On voit effectivement passer beaucoup de demandes de personnes qui, isolées à l’autre bout de la France, cherchent quelqu’un pour faire des courses ou dépanner au quotidien. C’est une manière pour nous de montrer notre solidarité.

« Ce qui est dur, c’est de ne pas savoir combien de temps la crise va durer… »

Vous êtes aussi l’ambassadeur à Rennes-Saint-Malo de l’association France Digitale, qui regroupe des entrepreneurs et des investisseurs du numérique. Vous connaissez bien cet écosystème (Guillaume Thomas est également associé de la start-up rennaise Cocoonr, NDLR). Quel impact cette crise aura-t-elle, selon vous, sur ces petites structures souvent à flux tendu de trésorerie ?

Guillaume Thomas : Je pense que ça risque d’être « violent » dans le secteur. Tout le monde essaye d’agir comme on le fait, c’est-à-dire de réduire ses dépenses au maximum pour sécuriser sa trésorerie. Je pense qu’il va y avoir une traversée du désert assez longue pour toutes les entreprises qui ont besoin de financement. Il y a eu beaucoup d’argent disponible dernièrement. Je ne crois pas qu’il y aura beaucoup de nouveaux tours de table dans les mois qui viennent. Les sources vont se tarir. Les entreprises qui réussiront à passer la crise avec un produit mur et un marché en face pourront se relever mais pour celles qui cherchent à se lancer sans avoir de modèle économique clair, ça va être compliqué.

Le plan gouvernemental annoncé le 25 mars pour aider les start-up est-il de nature à rassurer ?

Guillaume Thomas :
Il y a clairement une volonté de réduire la casse et d’encourager les sociétés à ne pas licencier. Les mesures annoncées fonctionneront si l’économie repart assez rapidement et c’est ce qu’on doit espérer. Les entreprises vont pouvoir emprunter facilement avec une caution de l’État mais il faudra être en mesure de rembourser ces emprunts et les sociétés devront donc avoir des clients et dégager du résultat pour ça.

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