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Comment Kerlink entre dans une nouvelle ère des objets connectés
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Comment Kerlink entre dans une nouvelle ère des objets connectés

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Depuis 2004, Kerlink participe à la création d’un univers de l’internet des objets, grâce à ses antennes. L’entreprise bretillienne, installée à Thorigné-Fouillard, va entrer dans une nouvelle dimension, grâce au marché américain. Elle participe en effet au projet de l’opérateur Helium qui veut déployer un réseau communicant à l’échelle mondiale.

William Gouesbet, président cofondateur de Kerlink — Photo : Virginie Monvoisin

Kerlink est une entreprise bretillienne née dans le terreau technologique porteur de Rennes Atalante il y a bientôt dix-huit ans. "Nous allons atteindre la majorité, c’est une étape importante que nous allons célébrer !", s’amuse William Gouesbet, président et cofondateur de Kerlink avec Yannick Delibie. Une majorité, certes, mais surtout une croissance qui va se poursuivre bien au-delà de cette étape symbolique. Si l’entreprise a vécu quelques mois d’incertitudes entre 2019 et 2020, elle est en train de changer de modèle, doucement. Sa raison d’être est toutefois toujours la même : proposer des solutions d’infrastructures à des clients qui souhaitent déployer un réseau dédié à l’internet des objets (ou IoT en anglais). "Pour faire fonctionner les capteurs d’eau, les lampadaires, compter les places de parking par exemple, nous avons besoin d’une télégestion à distance pour que les objets soient fonctionnels et participent ainsi à la productivité des industriels", explique William Gouesbet. Sa société permet à tous ces objets de communiquer en radio. Pour cela, Kerlink développe et commercialise des antennes sur le territoire. Le réseau ainsi déployé avec ce matériel électronique est ensuite géré, piloté et maintenu en condition opérationnelle par Kerlink.

Des débuts auprès des opérateurs télécoms

L’entreprise bretillienne s’est d’abord adressée aux opérateurs télécoms, tels Orange en France ou Tata en Inde. "Nous avons développé là-bas le plus gros réseau de télécommunications", souligne William Gouesbet. Ses solutions permettent de relier des équipements fixes (compteurs d’énergie…) ou mobiles (bus de transport public, wagons…) avec les systèmes d’information des entreprises. Mais le déploiement vers les télécoms a commencé à stagner en 2018-2019. "Les opérateurs n’ont pas su démontrer de retour sur investissement assez rapide sur le développement de leur réseau, regrette le dirigeant breton, qui voit alors le chiffre d’affaires chuter de 24 % en 2019. Les coûts qu’ils proposaient aux industriels pour bénéficier de la technologie étaient trop élevés. Ils n’ont donc pas franchi le pas vers la connexion de leurs objets".

Vers les réseaux privés

Ce constat amène l’équipe dirigeante de Kerlink à revoir sa stratégie et à diversifier sa distribution, vers des réseaux privés. "Les industriels ont voulu déployer leurs propres réseaux, sans les opérateurs télécoms. C’est le cas de Suez ou Saur par exemple", cite William Gouesbet. Ils achètent désormais, sur fonds propres, les antennes Kerlink en direct, mais aussi la solution de gestion. Ce changement de cap s’est fait en passant par un plan de sauvegarde, en septembre 2019. Une histoire terminée aujourd’hui mais qui a contraint l’entreprise à se séparer de 20 collaborateurs. "Nous étions structurés pour développer les télécoms, et donc trop nombreux pour cette activité", analyse le président de l’entreprise, qui emploie aujourd’hui 83 collaborateurs. "Nous restons, depuis, prudents sur la charge de masse salariale."

Kerlink développe et commercialise des antennes destinées à piloter des objets connectés. Ici, l’installation d’une Wirnet iStation permet une agriculture connectée — Photo : Kerlink

4 filiales à l’étranger

Ce qui n’empêche pas Kerlink d’aller de projets en projets. Les réseaux privés se multiplient en France et à travers le monde, grâce à plusieurs filiales : Chicago (États-Unis, géré par le cofondateur de Kerlink, Yannick Delibie, 4 collaborateurs), Inde (2 personnes), Singapour (3 personnes) et Japon (2 personnes). "La zone Europe, Asie, Moyen-Orient est gérée depuis Thorigné-Fouillard", précise William Gouesbet. Kerlink a par exemple installé des antennes pour des élevages communicants, où l’agriculteur est prévenu en cas de vêlage imminent d’une vache. En Afrique, des capteurs ont été posés sur certains animaux pour lutter contre le braconnage. Les réseaux permettant la gestion des énergies se répandent également de plus en plus, pour la télérelève de compteurs en maison individuelle ou en bâtiment collectifs, pour l’allumage de l’éclairage urbain. En début d’année, Kerlink a également mis au point, avec le grenoblois Hydrao, un système de douche intelligente, vendu auprès d’une chaîne hôtelière américaine : elles indiquent en temps réel aux clients la quantité d’eau utilisée, grâce à des LEDs qui passent en rouge s’ils consomment trop.

Renforcement du rôle des distributeurs

La majorité du chiffre d’affaires de 11 millions d’euros est aujourd’hui réalisée avec ces réseaux privés, par de la vente directe ou indirecte. "Nous avons profité du confinement et du ralentissement de notre activité (-14 % de CA) pour multiplier par deux notre réseau de distributeurs (43 à fin 2020)", souligne William Gouesbet. Résultat, Kerlink est entré dans une bonne dynamique aux 3e et 4e trimestres 2020. Début juillet, l’entreprise a encore signé un nouveau contrat de distribution avec le fournisseur de réseaux et solutions chypriote CyRIC IoT.

Kerlink a mis au point, dès 2004, des antennes pour la communication des objets connectés — Photo : Kerlink

Déploiement d’un réseau mondial avec Helium

L’année 2021 se présente également sous les meilleurs auspices, avec un 1er trimestre marquant une hausse de 43 % du chiffre d’affaires par rapport au 1er trimestre 2020. "Notre seule incertitude repose sur la tension mondiale sur les composants électroniques. S’ils viennent à manquer, cela pourrait nous freiner", prévient William Gouesbet. Mais cette croissance retrouvée n’est pas seulement due au développement du réseau de distribution. "Nous avons constaté une forte dynamique de croissance dès fin 2020 sur la zone Amérique. Cela est dû notamment à un projet de déploiement mené par l’un de nos clients, Helium. L’entreprise américaine a décidé de lancer un réseau IoT à l’échelle mondiale, mais selon un modèle économique tout nouveau."

Et cela va impacter fortement et positivement l’activité de Kerlink. Le principe ? Helium veut agir comme un opérateur télécoms en installant des hotspots (antennes) pour créer une blockchain, mais en en faisant porter l’investissement par d’autres. Particuliers et entreprises peuvent ainsi investir dans ces antennes, et sont récompensés en cryptomonnaie HNT (Helium Network Token) selon leur utilisation. "Le retour sur investissement est ainsi plus rapide pour une entreprise, par exemple, qui peut à la fois utiliser en interne ce réseau, et en recevoir une valorisation par des HNT. Plus l’antenne est intéressante pour le réseau, plus elle rapporte", précise William Gouesbet.

Modèle Naas en devenir

On compte déjà 100 000 antennes Helium dans le monde, qui vont, à terme, permettre à des objets connectés de communiquer. Kerlink devient l’un des fournisseurs d’antennes pour Helium. "Ce qui est nouveau, c’est qu’il s’agit d’un projet mondial, et que nos antennes vont être vendues à des particuliers", indique le dirigeant. Un nouveau levier de développement pour l’entreprise bretonne, qui fait ainsi évoluer son modèle économique. "Nous allons également proposer une offre pour les industriels, en Network as a service (Naas) : nous pouvons leur louer des antennes et des services, s’ils ne souhaitent pas investir. Et cela nous rapportera des HNT. Le monde va être de plus en plus connecté avec des objets, ce qui est complémentaire à la 5G. On est au début de l’histoire !"

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