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Christian Guillemot : « Pour AMA, s'implanter en Asie est incontournable »
Interview Ille-et-Vilaine # Informatique

Christian Guillemot président d'AMA Christian Guillemot : « Pour AMA, s'implanter en Asie est incontournable »

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Société sœur d'Ubisoft, AMA (80 salariés) appartient à la constellation des sociétés de la famille Guillemot. Dirigée par Christian Guillemot depuis Rennes, elle fournit une solution de téléassistance et de télémaintenance avec lunettes connectées, pour la santé et l'industrie. Elle ouvre cette année deux nouvelles filiales en Asie.

Christian Guillemot, président d'AMA (groupe Guillemot) — Photo : © Virginie Monvoisin

Votre société AMA a créé une solution unique de téléassistance, XpertEye. Quels sont ses usages aujourd’hui ?

Christian Guillemot : Nous fournissons une solution de télémédecine, qui représente un tiers de notre activité. Le reste concerne la fourniture d’une solution de téléassistance et de télémaintenance avec aide connectée, pour l’industrie. Nos clients sont des groupes qui ont des activités à l’international et qui utilisent notre XpertEye pour de la réparation ou de la maintenance à distance. La vision de l’expert peut être transportée à tout moment et en temps réel pour intervenir. Parmi nos 180 clients (des grandes entreprises), nous comptons des sociétés comme Optel, le CHU de Nantes ou Air Liquide. Grâce à un partenariat avec Google, nous arrivons à rester à la pointe de la technologie.

Une technologie que vous exportez dans le monde entier depuis le début de l’aventure AMA ?

C.G. : Oui, si 100 % de notre R&D se passe à Rennes, nous commercialisons complètement à l’international. Nous avons d’ailleurs ouvert des filiales en Roumanie et aux États-Unis (2016) puis en Allemagne et au Royaume-Uni (2017). Cette année, nous allons ouvrir deux nouvelles filiales commerciales : à Hong Kong cet été et à Singapour à l’automne. Nos filiales à l’étranger représentent la moitié de notre chiffre d’affaires de 1,8 million d’euros. C’est pour nous rapprocher de nos clients potentiels que nous visons l’Asie. Jusqu’alors, nous vendions nos solutions en Chine via des clients européens ou américains qui y détenaient des filiales. Désormais, un commercial sera installé en Asie du Sud-Est et un autre en Chine pour cibler des entreprises asiatiques qui ont un rayonnement international. Nous avons déjà des serveurs en Asie : la structure informatique de nos solutions est déjà internationale depuis trois ans, car il nous faut une latence faible pour faire fonctionner nos solutions.

Pourquoi l’Asie ?

C.G. : L’objectif d’AMA est de devenir le leader mondial du marché asiatique. Les actionnaires (les cinq frères Guillemot : Claude, Yves, Michel, Christian et Gérard, rejoints par leurs enfants depuis mai 2019, NDLR) ont considéré que l’on ne peut pas atteindre cet objectif sans adresser le marché asiatique. Nous sommes tous passionnés de technologies. Nous aimons les découvrir le plus en amont possible, et parfois, nous faisons pivoter cette technologie vers de nouveaux métiers. Quand on peut apporter à un métier, alors on crée une entreprise et on investit beaucoup en R&D, avec toujours comme objectif de devenir le leader ! On l’a fait avec Ubisoft, avec Guillemot Corporation. C’est parce que les technologies ne sont pas encore connues qu’il y a des choses à faire. En tout cas, la courbe est exponentielle.

Votre concurrence est-elle forte ?

C.G. : Nos concurrents sont américains et allemands surtout, et ont, comme nous, fait partie de la sélection opérée par Google en 2014. Nous avons des développements similaires, une taille proche. Les Américains ont une plus grande capacité à se développer rapidement. Mais leur marché national est suffisant, ils vont donc moins sur la scène internationale que les Européens. Dans la course aux parts de marché, ceux qui vont aller le plus rapidement en Asie vont remporter le leadership du métier.

Les développeurs d'AMA travaillent tous au siège, à Rennes — Photo : © AMA

À quels besoins répondez-vous à l’étranger ?

C.G. : Nous ne développons des logiciels pour l’industrie (automobile, ferroviaire, aéronautique, mécanique…) qu’à la demande d’une problématique de terrain. Chez AMA, nous essayons de ne pas avoir d’idées ! Seuls les clients peuvent être à l’origine d’un développement. À partir d’une problématique, nous avons 35 personnes qui peuvent travailler en R&D à Rennes. Toutes les demandes ont un point commun : résoudre une problématique de distance qui engendre des coûts importants et nécessite du temps. Notre solution permet de réparer en minutes ce qui était réparé en plusieurs jours par le passé ! Pour les entreprises, c’est un gain de temps, d’argent, et donc de productivité.

Quels sont les usages de votre solution en télémédecine ?

C.G. : Elle est utilisée pour de la téléconsultation. Les médecins peuvent voir à distance des plaies chroniques, soigner un AVC en permettant à un spécialiste de guider en urgence un confrère par exemple. Les équipes des véhicules d’urgences peuvent ainsi se connecter à l’hôpital pour un conseil de spécialiste immédiat, pour guider des gestes et anticiper davantage la filière de soin à contacter en fonction de l’état d’un patient. La solution permet également de transmettre des savoir-faire. Nous allons encore renforcer notre expertise sur les lunettes connectées dans le domaine médical grâce à la sortie de la nouvelle version des Google Glass (Google Glass Enterprise Edition 2), avec qui nous avons un partenariat (AMA est sélectionné par le programme Glass at Work de Google depuis 2015, NDLR).

Vous utilisez uniquement des lunettes Google ?

C.G. : Non, en fonction des besoins, nous pouvons utiliser différentes sortes de lunettes, dont les Google Glass. Il existe une cinquantaine de fabricants, dont une dizaine est industrialisable. En tant qu’intégrateur de solutions, nous fournissons les lunettes avec notre pack. Nous distribuons par exemple aussi des Ololens 2, qui viennent de sortir, et dernièrement des Iristick, lunettes de sécurité connectées pour le secteur industriel. Nous venons de signer un partenariat avec cette entreprise belge pour offrir une solution puissante de téléassistance, qui comporte un zoom optique x5, unique.

AMA a doublé son chiffre d’affaires tous les ans depuis 2016. Comment abordez-vous l’avenir ?

C.G. : L’objectif est de doubler encore dans les années qui viennent, pour atteindre la rentabilité en 2021, quand notre chiffre d’affaires sera supérieur à 15 millions d’euros. Nous serons alors une centaine de collaborateurs. Cette taille sera la bonne pour pouvoir assurer le développement d’AMA.

AMA a été distinguée Great place to work 2019. Que signifie ce label pour vous ?

C.G. : Nous avons participé au concours Great Place to Work France dans une démarche de ressources humaines. Que nous ayons ou non le trophée, cela allait nous faire progresser dans nos bonnes pratiques, puisqu’un audit questionnait l’ensemble des salariés sur leur appréciation de l’entreprise. Pour avoir les meilleures chances d’attirer et garder les talents dans l’entreprise, il faut avoir la démarche RH la plus attractive possible, c’est pour cela que nous avons concouru (catégories entreprises de 50 à 100 salariés). Nous sommes en effet convaincus que la ressource essentielle de nos activités d’entreprises technologiques est constituée par les talents. Ce concours était un test pour connaître nos points forts et nos points faibles. Recruter est difficile dans nos métiers, même si l’écosystème rennais est très dynamique. Nous devons avant tout être en phase avec l’évolution du marché, en recrutant à la bonne vitesse. Surtout si nous voulons devenir le leader mondial sur notre domaine, qui n’existait pas il y a encore cinq ans !

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