Rupture conventionnelle collective : pourquoi Pimkie a échoué
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Rupture conventionnelle collective : pourquoi Pimkie a échoué

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La filiale du groupe Mulliez a été la première à tenter de supprimer des postes en utilisant le nouveau mécanisme de la rupture conventionnelle collective. Les négociations entre la direction et les syndicats de Pimkie ont pourtant échoué et devraient déboucher sur l'ouverture d'un plan de sauvegarde de l'emploi.

Chez Pimkie, les négociations s'orientent désormais vers un PSE traditionnel, plus contraignant pour le groupe. — Photo : Pimkie

Elles parlent d'une "demi-victoire", puisque 208 postes sont toujours dans la balance, mais se disent soulagées. Mercredi 10 janvier, deux représentantes des salariés de l'enseigne de prêt-à-porter Pimkie ont tenu une conférence de presse conjointe avec Martine Aubry, la maire de Lille, qui leur a apporté son soutien dans les négociations entamées avec la direction du groupe. Marie-Annick Merceur (CFDT) et Valérie Pringuez (CGT) sont revenues sur les raisons qui ont poussé l'intersyndicale à rejeter la proposition de rupture conventionnelle collective (RCC) avancée par leur direction. Cette filiale du groupe Mulliez basée à Villeneuve-d'Ascq (Nord), déficitaire depuis 2015, emploie 1 900 personnes en France. Elle prévoit de supprimer 208 postes et de fermer 37 magasins en France. La direction du groupe n'a pas donné suite à nos sollicitations.

Vers un accord de méthode

"Les désavantages de ce qui nous était proposé étaient importants, et notamment, l'absence de reclassement et d'accompagnement des salariés sur le départ, " pointe Valérie Pringuez. "Pour nous, le motif économique ne tient pas. On fait payer aux salariés français l'absence de stratégie de Pimkie à l'international : le groupe est rentable en France, mais l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne plombent les résultats. Ils nous ont clairement dit qu'il fallait qu'ils récupèrent 47 millions d'euros d'ici à la fin mars, et qu'ils étaient prêts à tout pour cela, y compris à vendre les murs de magasins pourtant rentables. Le désarroi est très grand chez les salariés."

"Lundi matin (le 8 janvier, NDLR), nous étions dans l'attente des annonces ; lundi soir, nous avons décidé de rejoindre la CGT et FO au sein de l'intersyndicale. Apparemment, cela a fortement contrarié la direction, mais les termes de la rupture conventionnelle collective étaient nettement insuffisants, et très désavantageux pour les salariés à temps partiel, pourtant majoritaires dans l'entreprise", souligne Marie-Annick Merceur, ajoutant que les indemnités prévues tournaient autour de 3 000 euros par salarié.

Les négociations s'orientent désormais vers un plan de sauvegarde de l'emploi "traditionnel", plus contraignant pour le groupe. Un accord de méthode devait être signé dans la soirée du 10 janvier, censé poser les nouvelles bases des négociations, a priori sans modifier le périmètre du plan. Les deux parties doivent trouver un accord avant le 21 février.

Coup dur pour la rupture conventionnelle collective

Pimkie devait être le premier groupe français à mettre en place une rupture conventionnelle collective, une nouveauté permise par les ordonnances Macron réformant le code du travail. Selon ce dispositif, les entreprises peuvent se séparer de salariés sur la base du volontariat, sans motif économique, et peuvent réembaucher quasiment tout de suite après si elles estiment que leur situation s'est améliorée.

Une procédure identique a été enclenchée au sein du groupe PSA, où 1 300 postes pourraient être concernés. Mais, pour Martine Aubry, le revirement de situation chez Pimkie devrait sonner comme un avertissement pour les entreprises tentées de recourir à cette procédure. "Je me réjouis de ce qui s'est passé lundi, qui pourrait faire réfléchir quelques entreprises. J'ai toujours été très pragmatique sur les licenciements: il faut parfois s'y résoudre, mais il faut accompagner les salariés, leur donner le temps et les moyens de se reconvertir. La preuve est faite que la RCC ne protège pas les salariés, et je suis très choquée par les propos de Muriel Pénicaud, qui prétend que ce dispositif "évite le traumatisme du licenciement", on n'a pas le droit de dire ça quand on est ministre du Travail."

Quid des autres enseignes du groupe ?

A l'issue de la conférence de presse, les représentantes des salariés de Pimkie ont fait part de leur inquiétude concernant d'autres enseignes de la galaxie Mulliez, et notamment les marques de prêt-à-porter masculin Jules et Brice. "L'entreprise a mis en place exactement les mêmes mesures que chez Pimkie, avec l'intervention du même cabinet extérieur pour auditer et organiser des ateliers de réflexion avec les salariés autour de l'avenir de l'entreprise. On a vu ce que ça a donné chez Pimkie, on verra mi-février les résultats chez eux, mais pour les syndicats, il est clair que l'entreprise est engagée dans la même démarche. On verra s'ils osent poursuivre dans la même voie", conclut Valérie Pringuez.

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