Quand l’entraide entre dirigeants mène à la réussite
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Quand l’entraide entre dirigeants mène à la réussite

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Terres de réseaux, les Hauts-de-France sont aussi une région où l’entraide entre dirigeants est particulièrement développée. Cet échange entre pairs revêt des formes variées, depuis le simple conseil jusqu’à l’entrée au capital, en passant par la location de locaux.

— Photo : Ineat Group

Comptant de nombreux réseaux dédiés à l’entrepreneuriat, la région est particulièrement bien équipée pour rompre la légendaire solitude du dirigeant. Les Hauts-de-France sont notamment le berceau du Réseau Entreprendre, qui permet à des entrepreneurs de réussir en s’appuyant sur l’expérience de dirigeants en activité. Cette entraide entre pairs fait de nombreux adeptes parmi les chefs d’entreprise, et se pratique souvent en dehors des réseaux officiels. « On m’a donné, donc je donne en retour », résume Yves Delnatte, co-dirigeant de la société lilloise Ineat (CA : 19 M€), qui réalise du conseil en transformation digitale. Un état d’esprit largement partagé, selon Yann Orpin, dirigeant de la société de nettoyage Cleaning bio (CA : 5 M€), et président de la CCI Grand Lille. « Nous sommes dans une région où les dirigeants sont solidaires. Je parle en tout cas pour le Grand Lille, que je connais bien. »

Une entraide à géométrie variable

Gauthier Vignon, co-dirigeant de la start-up roubaisienne Dagoma (CA : 3,1 M€), qui fabrique et vend des imprimantes 3D, pratique cette entraide sous forme de partage d’expérience. « J’accompagne trois entrepreneurs à titre personnel. Je leur pose les questions qu’on s’est nous-même posées et auxquelles on a dû répondre, sur le financement, la commercialisation, la propriété intellectuelle, la sous-traitance, etc. ».

Si, comme lui, beaucoup de dirigeants en accompagnent d’autres en mode conseils, à titre gracieux, certains ont choisi d’explorer d’autres voies. « Il y a quelques années, j’ai décidé de ne plus seulement accompagner d’autres entreprises de manière amicale, mais d’être aussi acteur de leur réussite, en prenant des participations minoritaires », explique Yann Orpin. Sa holding est ainsi entrée au capital de NER en 2014, Biom en 2015, Cozyair en 2017 et Manssio en février 2018. « Nous les accompagnons sur la stratégie et nous mettons à disposition nos compétences en compta, en RH, etc. Le dirigeant se concentre sur sa valeur ajoutée et nous prenons en charge le reste. Depuis 2014, NER a multiplié son chiffre d’affaires par 6, pour atteindre 1,2 M€ ».

Première entreprise à s’être installée à Euratechnologies, Ineat a de son côté mis en place un incubateur dans ses propres locaux. L’idée étant d’y accueillir des entreprises qui souhaitent intégrer Euratechnologies. « La start-up Pumpkin est passée par nos locaux. Nous avons aussi accueilli les start-up Ease, Strapdata ou Les Vieilles Choses, dans lesquelles nous avons pris des participations minoritaires, et qui ont ensuite intégré Euratechnologies ou La Plaine Images... ». Il ajoute en souriant : « On est le premier enfant et un peu le grand frère d’Euratechnologies ».

Donner du temps… pour en gagner

Plusieurs sollicitations par semaine pour Yann Orpin, une rencontre par mois et par entrepreneur accompagné pour Gauthier Vignon, des conférences ou de l’accompagnement via le Réseau Entreprendre pour Yves Delnatte… Dans un agenda bien rempli de dirigeant, cette entraide est gourmande en temps. Et pourtant, les chefs d’entreprise se rendent disponibles sans hésiter. Gauthier Vignon accorde ainsi du temps « du mardi au vendredi, en soirée ». Il explique : « J’étais à la place de ces entrepreneurs il y a encore 6 mois ou un an. Nous avons bénéficié d’accompagnement, nous aussi, et d’ailleurs ça continue ».

Outre l’aspect solidaire, les dirigeants considèrent que ces heures consacrées à en aider d’autres sont loin d’être perdues. « On prend du temps mais on en gagne aussi », souligne Yann Orpin, avant de préciser : « Aider d’autres entrepreneurs permet de voir comment l’écosystème économique évolue. Et quand nous accompagnons des start-up dans le digital, cela permet d’acculturer nos salariés ». Gauthier Vignon y trouve aussi un bénéfice à titre personnel : « Accompagner d’autres entrepreneurs, ça fait beaucoup de bien car l’énergie positive, c’est communicatif ». Il ajoute : « Les questions que je pose sur leur business ont aussi un effet miroir : elles me permettent de dresser un bilan. Et puis en voyant les erreurs des autres, on se rappelle les siennes et ça permet de garder la tête froide ! ».

Un accélérateur de business

Cette entraide fait également office d’accélérateur de business pour celui qui accompagne. Fondateur et dirigeant de la chaîne de restauration rapide Fresh Burritos (CA : 13 M€), Timothée Tronet en a fait l’expérience. Lors d’une conférence qu’il donnait à l’Edhec, deux élèves en dernière année sont venus lui présenter leur projet de chaîne de restauration, Canard Street. « Nous en avons discuté et j’ai investi très vite dans leur société. Aujourd’hui je prends une demi-journée par semaine pour les conseiller. Cet accompagnement me permet de répondre à un objectif : constituer un groupe avec différents concepts de restauration. On gagne du temps en démarrant avec un porteur de projet ».

À force d’évoluer parmi les start-up, Yves Delnatte a de son côté mis en place une offre d’accompagnement dédiée, La Fabrik : « Nous aidons des porteurs de projets depuis leur idée jusqu’à la commercialisation de leur produit. C’est une expérience enrichissante pour Ineat, car si nous sommes aujourd’hui une société de services, nous souhaitons un jour développer nos propres produits ».

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