Pêche : Opération lobbying contre la réforme
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Pêche : Opération lobbying contre la réforme

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FILIÈRE PêCHE C'est au cours d'un déplacement des professionnels de la pêche à Bruxelles qu'a été présentée l'association européenne de défense des intérêts de la filière. Blue Fish entend bien répondre aux accusations des ONG.
— Photo : Le Journal des Entreprises

Alors que le réglement de base de la prochaine politique commune de la pêche doit être votée en juin prochain par la Commission Européenne, les élus et professionnels lorientais de la filière, très inquiets, poursuivent leur lobbying. Cette fois ils sont rejoints par les élus et professionnels de Boulogne-sur-Mer, premier port de pêche français, avec qui a été créée l'association Blue Fish. Pour la promotion d'une pêche durable et responsable.




Zéro rejet, mais quels contrôles ?

La priorité de ces prochaines semaines sera de trouver des points d'ajustement, des compromis entre le Parlement Européen et la Commission de la Pêche pour que la réforme soit applicable et praticable dès le 1er janvier 2014, en théorie. « La question prioritaire porte sur le zéro rejet », indique Jean-Noël Ladois, conseiller pêche à la délégation permanente de la France à Bruxelles. « Car les enjeux de la réforme sont d'assurer une bonne gestion de la pêche en Europe. Avec un stock halieutique maximum grâce à une exploitation optimale. » L'idée est de pouvoir prélever le maximum de ressources sans remettre en cause le stock. Et surtout d'éviter le gaspillage alors que seulement 10 à 20 % des poissons capturés ont des chances de survie une fois rejetés en mer en raison des quotas. Pour certaines ONG justement, 40 à 50 % de ces rejets pourraient être valorisés. Seulement cela implique des espaces nécessaires sur les bateaux de pêche. « Or les marins pêcheurs sont déjà freinés dans leurs investissements pour la modernisation de la flotille », poursuit Jean-Noël Ladois, faisant référence à une autre contrainte de la politique commune de la pêche. Lassés par ce casse-tête chinois, les professionnels remarquent surtout que la nouvelle réglementation risque fort d'être compliquée à mettre en place. Notamment en ce qui concerne les contrôles. « Quelle perte de temps de se battre sur des choses qui seront impossibles à mettre en pratique, incontrôlables et ingérables », lance Yves Foëzon, directeur de l'organisation de producteurs Pêcheurs de Bretagne.




Une étude d'impact sur la pêche en eaux profondes

Autre point clé de ce réglement de base : la pêche en eaux profondes. Qui impacte directement le port de Lorient. D'ailleurs, la première action de Blue Fish concerne justement l'étude socio-économique de la pêche en eaux profondes et de ses impacts. Une étude réalisée par PriceWaterhouseCoopers-Fish Pass qui sera présentée à Edinburg le 16 mai prochain. « Inverser la tendance sera difficile mais nous ne nous laisserons pas faire », assure Claude Allan, premier adjoint de Boulogne-sur-Mer et premier vice-président de la Communauté du Boulonnais en charge de la mer. « Avec Blue Fish nous allons faire adhérer un maximum de professionnels européens pour contrebalancer l'action des ONG environnementales ». Premier constat : les quotas de pêche européens ne sont jamais atteints. Dans l'Atlantique Nord Est, la pêche d'espèces de grands fonds représente moins de 50 % des quotas, avec 40.000 tonnes par an. En dix ans, la pêche de grenadier et de lingue a fortement diminué pour parvenir à une relative stabilisation. Parallèlement, la production française a chuté de moitié, parvenant à moins de 10.000 tonnes par an quand elle pêchait plus de 20.000 tonnes en 2002. « Une tonne de produit pêchés représente 36 heures de travail pour une personne », calcule Maurice Benoish, directeur de la SEM Lorient Keroman. « Chaque fois qu'on réduit d'une tonne la pêche en eaux profondes, on met une personne au chômage pendant une semaine. » Dans un marché pourtant en pleine croissance, les poissons consommés en Europe sont importés à 60 %.




Préserver l'emploi

D'ailleurs, la mission première de Blue Fish est bien celle-là : préserver les emplois et la filière. Filière qui compte 270 entreprises et 3.000 emplois directs à Lorient. « Avec un coefficient multiplicateur de 4,2 en termes d'emplois indirects et induits », indique Nicolas Teisseire, chargé de mission à Bruxelles pour l'Audélor. En effet, derrière les marins pêcheurs se cachent des chantiers de construction et de réparation navales, des marayeurs, des distributeurs... « Et des emplois bénéficiant d'un pouvoir d'achat sur leurs territoires », poursuit Nicolas Teisseire. « L'étude que mène PwC doit confirmer ce taux multiplicateur, qui peut aller jusqu'à 12, en fonction des zones de pêche en Europe. »

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