Le Furet du Nord et Decître font cause commune au sein de Nosoli
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Le Furet du Nord et Decître font cause commune au sein de Nosoli

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Alliées depuis 2019, les deux grandes chaînes de librairie indépendantes lilloise et lyonnaise le Furet du Nord et Decître travaillent à se créer une culture commune, symbolisée par la création de la holding Nosoli. Une gageure, en pleine pandémie.

De la Grand’Place de Lille à la place Bellecourt de Lyon, les livres font désormais un trait d’union. Réunies depuis le début 2019, et le rachat de l’emblématique librairie lyonnaise Decître par son homologue nordiste Le Furet du Nord, les équipes des deux libraires voient leurs liens encore renforcés par la création, début 2022, d’un nouveau groupe, Nosoli. Acronyme de Nous Sommes Libraires, cette holding basée à Tourcoing vient souligner les valeurs communes à l’ensemble de ses salariés, tout en appelant au rapprochement. "Nosoli veut aussi dire Nous Sommes Liés", insiste Pierre Coursières, le PDG du Furet du Nord, qui prend la présidence de Nosoli. "Ce nouveau nom ne vient en aucun cas remplacer nos marques commerciales, mais placer toutes les équipes sous le même statut, et signifier leur appartenance au même groupe, quels que soient leur enseigne d’origine et leur lieu de travail."

Faire culture commune

Car doubler de taille pour devenir le premier libraire multi-enseignes de France, avec 32 points de vente, 750 collaborateurs, et 150 millions d’euros de chiffre d’affaires, au beau milieu d’une pandémie mondiale, ne se fait pas en un tour de main. Pas plus, que de fusionner deux entreprises à la culture très forte, et aux implantations géographiques différentes, l’une historiquement ancrée dans le Nord, l’autre, autour de Lyon. "Cela n’a jamais été dans nos plans d’amener l’une de nos marques à évincer l’autre, nous voulons au contraire que chacune continue à s’épanouir. Cela peut prendre un peu de temps de construire le lien, mais nous y travaillons, et la création de ce groupe commun est une étape importante," poursuit Pierre Coursières. Le réseau de Nosoli est surtout implanté dans une moitié Est de la France. Le groupe est présent du nord jusqu’au sud du bassin parisien, où fleurissent 21 enseignes du Furet, dont deux en Wallonie, depuis 2018. La majorité des 11 librairies Decître se situent quant à elles en majorité dans le bassin Lyonnais.

"Historiquement, Decître a davantage misé sur la vente sur Internet que le Furet, qui a plutôt développé son réseau physique", précise Pierre Coursières.

Montée en puissance du web

Le contexte sanitaire n’a pas vraiment pas facilité les rapprochements du Nord au Sud ces deux dernières années. Tenues à distance les unes des autres, comme de leurs clients, les équipes ont néanmoins pu continuer à travailler tout au long de la pandémie, grâce à un report massif des ventes vers le web, qui ont permis au groupe de maintenir son chiffre d’affaires. "Je n’ai pour le moment pas de visibilité sur l’évolution du chiffre d’affaires de 2022, que nous espérons en croissance, après une bonne dynamique en 2020 et 2021, malgré les fermetures. Les gens se sont remis à la lecture, ça a été la bonne surprise de cette pandémie", se félicite Pierre Coursières.

Le groupe compte deux sites marchands en B to C, Decître.fr et Furet.com, qui ont connu une importante accélération depuis 2020. "Le site e-commerce a doublé de taille en 2020, ça a été la ruée, pas tant sur les livres électroniques, dont la part est restée stable, que sur la vente à distance. Au niveau du groupe, les ventes sur internet représentent à peu près 14 % du chiffre d’affaires réalisé sur le livre. Cela nous situe derrière la Fnac et Amazon, et à égalité avec Cultura. Nous avons bien entendu une stratégie de développement sur ce canal de vente, pour gagner des parts de marché. Nous sommes dans une logique d’amélioration permanente, avec des investissements pour améliorer nos outils, et bénéficier des dernières innovations techniques. Pour autant, nous n’ambitionnons pas de devenir Amazon, et nous restons très attachés au modèle de la librairie physique, qui a démontré sa solidité malgré la pandémie," affirme le président de Nosoli.

Rester prudent sur les ouvertures

Déclarées "commerces essentiels" pendant les confinements, les librairies restent chères au cœur des Français, malgré la concurrence des pure players du web. Pour autant, l’heure est davantage à la consolidation qu’à la conquête pour le dirigeant de Nosoli, qui reste très prudent quant à l’ouverture de nouveaux points de vente dans le contexte actuel. Mais si de grands projets ne sont pas à nouveau sur la table, rien n’est exclu. "À terme, nous ambitionnons d’étendre notre présence dans l’Hexagone. Mais nous n’avons pas d’objectif précis en termes de rythme d’ouverture ou de taille de notre réseau. Cela dépendra des opportunités, nous demeurons sur une stratégie d’agilité, pour nous ajuster à un contexte qui reste encore compliqué. Sur le parc existant, nous constatons un regain d’activité dans nos librairies de centres-villes, et plus de difficultés pour celles qui sont situées dans des zones commerciales".

"Si nouvelles ouvertures il devait y avoir, ce serait sans doute dans des centres de villes moyennes"

Cette tendance à contre-courant de celle observée depuis une vingtaine d’années donne des idées à Pierre Coursières. "À l’heure actuelle, si nouvelles ouvertures il devait y avoir, ce serait sans doute dans des centres de villes moyennes, où l’on sait que les librairies manquent, et créent toujours beaucoup de flux", s’avance le dirigeant. Pas question pour autant de renoncer aux magasins de zones commerciales, qui, s’ils sont moins nombreux que ceux de centre-ville, pèsent encore pour la moitié du chiffre d’affaires du groupe. À voir donc, comment vont s’inscrire dans la durée les nouveaux comportements des acheteurs, apparus pendant la pandémie.

Vers une diversification de l’offre

Pour nourrir l’envie de ses clients de revenir en magasin, Nosoli travaille à la diversification de son offre. Là encore, avec son cœur de métier pour boussole :

libraire avant tout, le groupe tire 82 % de son chiffre d’affaires de la vente de livres, en B to B et en B to C. Si la carterie, les petits objets de décoration et surtout, les jeux de société, sont venus ces dernières années remplacer peu à peu une offre de CD et DVD en perte de vitesse, les livres ne sont donc pas près de passer au second plan. "Nous resterons toujours libraires, même si nous réfléchissons à enrichir notre offre. Ces temps-ci, nos réflexions portent sur les services en magasins. Nous réfléchissons par exemple à proposer des ateliers lecture, ou écriture, en magasin. Ce type d’offre pourrait être mis en place dans les cinq ans à venir", se projette Pierre Coursières.

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