La stratégie derrière le rachat par Lyreco du breton AlgoPack
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David Coti président d'Algopack La stratégie derrière le rachat par Lyreco du breton AlgoPack

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David Coti, membre de la famille valenciennoise à la tête du géant français de la papeterie et équipements de bureaux Lyreco (10 000 salariés dont 2 000 en France, CA 2015 : 2 Md€) revient sur ses ambitions en Bretagne. Après avoir racheté la start-up AlgoPack en 2015 à Saint-Malo, le groupe nordiste indépendant vient d'acquérir une partie de l'ancienne usine Doux dans le Morbihan, pour y créer une usine de transformation d'algues en biomatériaux.

— Photo : Le Journal des Entreprises

Pourquoi cet intérêt pour les matériaux à base d'algues ?

Nos fournisseurs sont en permanence à la recherche d'innovations. Le bioplastique en fait partie. Nous travaillons sur des développements et applications concrètes, comme des classeurs ou des bouchons à base de ce biomatériau. Nous développons d'autres recettes pour le packaging. Lyreco et AlgoPack ont ce point commun : la matière. Hormis le papier, 80 % des articles de notre catalogue sont aujourd'hui en composants plastiques.

À quel horizon ces produits viendront-ils enrichir votre catalogue ?

C'est pour 2018 sans doute. Le marché est extrêmement demandeur... si ces solutions sont au même prix. Or, ces produits sont aujourd'hui 2,5 à 5 fois plus chers que la matrice de base. Nous pouvons faire la différence sur les gains énergétiques de production. Le travail d'un biomatériau nécessite 160°C quand celui d'un PET en réclame 220°C.

Pourquoi avoir racheté AlgoPack créée en 2010 à Saint-Malo ?

L'entreprise est pionnière en biomatériau 100 % algues. Ses concurrents sont agrosourcés, à base de maïs par exemple, qui consomment des terres agricoles, qui nécessitent beaucoup d'énergie... AlgoPack est détenteur d'un brevet déposé à l'échelle internationale. La société réalise à ce jour 50.000 euros de chiffre d'affaires, pour 500 000 euros de pertes. Elle préparait une levée de fonds en 2015 pour monter une unité de production industrielle. Nous nous sommes positionnés en tant que groupe familial et français. L'intérêt est de réaliser un " scale-up " industriel pour monter en puissance et pouvoir répondre aux commandes. C'est notre nouvelle société Algaé Innovation qui va porter la R&D et le bâtiment.

Vous venez d'acquérir une partie de l'ancien site Doux à Pleucadeuc (56), pourquoi ne pas être resté à Saint-Malo ou vous positionner sur la réindustrialisation du site rennais de PSA La Janais par exemple ?

Il était important pour nous de disposer d'un site avec de grandes capacités logistiques et de la visibilité, sans dimensionner tout de suite le projet. À 40 ? le m² dans la zone Atalante à Saint-Malo où était basée AlgoPack, il nous fallait deux millions d'euros pour quelque cinq hectares. Ce n'était pas viable économiquement pour assurer notre logistique. Nous avons aussi étudié le site de PSA à Rennes, mais il y avait 24 à 36 mois de délai... C'était trop long. À Pleucadeuc, nous avons obtenu le terrain de 4,5 hectares en liquidation pour 100.000 euros avec une base de bâtiment existante et un maire Alain Launay très volontaire. Je préfère utiliser les deux millions d'écart dans les emplois, les formations, les équipements industriels... Et Pleucadeuc est bien placé par rapport aux équipements portuaires de Nantes - Saint-Nazaire que nous pourrions utiliser.

Combien allez-vous investir ?

Nous n'avons pas encore de business plan, mais plusieurs dizaines de millions d'euros, c'est certain ! Le bâtiment fait 13 000 m² mais une partie est à déconstruire et il y a d'énormes travaux à prévoir. Nous allons occuper 2 000 à 3 000 m² d'ici à la fin de l'année, qui vont nous permettre de doubler nos capacités actuelles et de prendre des engagements quant à l'approvisionnement en matières premières. Les algues viennent de toutes les côtes bretonnes, mais aussi d'Europe et nous réalisons actuellement des tests sur les algues qui recouvrent les Antilles et les Caraïbes. À cinq ans, nous ambitionnons de valoriser jusqu'à 50 000 tonnes d'algues par an. Sachant qu'il faut dix tonnes pour une tonne exploitable.

Et en termes d'emplois, quelles sont vos perspectives ?

Algopack emploie aujourd'hui trois personnes. Je ne veux pas avancer de chiffres. À fin 2017, nous pourrions tripler ou quadrupler... Et si nous pouvons embaucher d'anciens salariés de Doux, pourquoi pas, mais il faudra étudier les compétences requises.

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