La filière automobile toujours en inertie dans les Hauts-de-France
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La filière automobile toujours en inertie dans les Hauts-de-France

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Depuis le déconfinement, de nombreux acteurs de la filière automobile dans les Hauts-de-France tournent encore au ralenti. Et face au plan de soutien dévoilé par l'Etat ce mardi 26 mai, les réactions sont mitigées.

— Photo : ©Julien Cresp

Dès le début du confinement lié au coronavirus Covid-19, les sept sites de constructeurs automobile présents dans les Hauts-de-France se sont mis totalement à l’arrêt. Une situation inédite et lourde de conséquences pour la filière, qui peine à présent à redémarrer. « J’espère que l’État et les grands donneurs d’ordres vont mettre en place un plan de relance. La suspension temporaire de l’activité économique, ce n’est pas comme une voiture en panne, il ne suffit pas de mettre de l’essence pour que ça redémarre. Il y aura une période d’inertie, la crise de 2008 nous l’a montré », prévenait dès la fin du mois de mars François Loor, dirigeant du constructeur carrossier Durisotti, basé à Sallaumines (Pas-de-Calais).

Dans un tel contexte, la présentation du plan de soutien de l’État à la filière automobile était très attendue. Dévoilé ce mardi 26 mai par le Président de la République Emmanuel Macron, ce plan suscite toutefois des réactions mitigées chez les acteurs régionaux. Il faut dire qu’une majorité d’entre eux peine encore à redémarrer. « Ce n’est pas fini, prévient Emmanuel Mauduit, dirigeant de Plastitek (CA 2019 : 40 M€, 320 salariés), un équipementier de rang 2 basé à Bouttencourt (Somme). Nous pilotons encore à vue ».

Une filière au ralenti

« L’industrie automobile n’a pas vraiment redémarré à l’issue du confinement », souligne Emmanuel Mauduit. Cette ETI mise plutôt sur une reprise vers la mi-juin : « A cette date, nous réaliserons environ 50 % de l’activité que nous avions avant l’arrêt de la filière. Les seuls constructeurs pour lesquels l’entreprise travaille actuellement sont Mercedes et BMW. En France, Toyota a repris, mais pas les constructeurs nationaux ». Ces derniers représentent 70 % de l’activité France de Plastitek. Au total, l’ETI réalise 75 % de son chiffre d’affaires avec le secteur automobile et le reste avec le BTP et le secteur pharmaceutique. Sur l’année 2020, Emmanuel Mauduit estime que l’entreprise devrait réaliser 25 à 35 % de chiffre d’affaires en moins. Une baisse que Plastitek est en mesure de supporter, grâce à l'accompagnement mis en place par l’État dès le début de la crise, à savoir la prise en charge du chômage partiel et le PGE.

Ce constat est partagé par François Salamone, dirigeant de Créatique Technologie (CA 2019 : 7 M€, 80 salariés). Cette société, qui partage son activité entre Lyon et Lens, fournit l’industrie automobile en produits de bord de ligne : connecteurs et dispositifs de tests des fonctions électriques des véhicules. « Le plus bas de la crise était pour nous en avril, où la prise de commandes a diminué de 50 % », constate-t-il. Et la fabrication peine aujourd’hui à redémarrer : « Nous attendons que les clients valident les études réalisées, pour lancer la fabrication de produits, mais ils n’ont encore personne chez eux pour s’en occuper. Je constate également un vrai désordre d’un site client à l’autre, au niveau des règles sanitaires mises en place et cela engendre une certaine inertie ». Selon lui, Créatique Technologie ne retrouvera pas un niveau d’activité normal avant le mois d’octobre et il reste vigilant sur les projets qui pourraient être mis en sommeil, « en lien avec la morosité de Renault notamment. Le PGE, que nous avons d’ailleurs obtenu facilement, nous permet de faire face », souligne-t-il.

Les plus et les moins du plan de soutien

Face au plan de soutien déployé par l’État, ces deux dirigeants constatent des manques, sans pour autant oublier les aspects positifs. « J’avais peur que ce soit pire », reconnaît Emmanuel Mauduit. Que l’État ne mette trop l’accent sur le véhicule électrique. Toutefois l’impact qu’aura ce plan reste flou, cela va dépendre de l’état global de l’économie. Par ailleurs, s’il va permettre d’écouler un peu les stocks de véhicules produits, il ne pousse pas à la consommation sur les types de véhicules qui composent encore 90 % de la production française ». Le dirigeant reste malgré tout optimiste, s’estimant bien accompagné à court terme. « Mais nous avons vraiment besoin que la consommation soit encouragée «, insiste-t-il.

De son côté, François Salamone tient à saluer l’aspect performatif de ce plan en ce qui concerne « les capitaux destinés à l’innovation. Notre société est sur le point de déposer une demande de brevet sur un produit innovant, dans le domaine de la transition électrique du véhicule. Cela nous permet de ne pas mettre ce projet en sommeil malgré le contexte. Nous allons également investir 200 000 euros, comme prévu, dans une imprimante 3D. » À l’image de son confrère, il souligne toutefois cet antagonisme : « Comment mettre les moyens sur les véhicules électriques tout en vidant les parcs des autres véhicules construits ? »

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