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Coronavirus - Ramery (BTP) : « Nous relançons une vingtaine de chantiers test sur 400 »
Interview Nord # BTP # Conjoncture

Philippe Beauchamps président du groupe Ramery Coronavirus - Ramery (BTP) : « Nous relançons une vingtaine de chantiers test sur 400 »

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Le groupe nordiste de BTP Ramery a pris la décision de redémarrer progressivement ses activités ce mois-ci. Dès le lundi 13 avril, une vingtaine de chantiers test vont reprendre. Philippe Beauchamps, président du groupe, revient sur les tenants et aboutissants de cette décision.

Philippe Beauchamps, président du groupe Ramery, commence à relancer l'activité sur 20 de ses 400 chantiers, pour y tester les nouvelles conditions de travail — Photo : Ramery

Après avoir cessé temporairement ses activités le 17 mars dernier, pourquoi le groupe Ramery (CA : 600 M€, 3 000 salariés) redémarre-t-il ?

Philippe Beauchamps : Nous suivons à la lettre les décisions du gouvernement. Nous avons donc compté parmi les premières entreprises à fermer leurs portes le mardi 17 mars à midi, lorsque le confinement a été mis en place. Quinze jours plus tard, quand le gouvernement a expliqué que nous avions mal compris la consigne et que les entreprises de BTP devaient reprendre le travail, nous nous sommes organisés pour. Dans les faits, le groupe est de nouveau en activité depuis une semaine.

Deux grandes raisons ont motivé cette décision, outre l’appel lancé par l’État. La première, c’est que nous voulions participer à l’effort collectif en payant nos fournisseurs dans les délais. Nous n’avons pas eu la possibilité de déporter notre logiciel de facturation et paiement. C’était beaucoup trop lent de gérer cela à distance : la mise en paiement d’une facture prenait 30 minutes, contre 1 minute en temps normal. Nous avons réalisé depuis le paiement de 80 % des fournisseurs dont les factures étaient échues au 31 mars, avec quatre jours de retard donc. L’autre raison, c’est l’arrivée du guide de l’OPPBTP (organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics), qui explique clairement les conditions pour reprendre le travail en toute sécurité sur les chantiers. Il n’y a rien de choquant, ce sont des règles de bon sens, mais ce n’est pas simple pour autant.

Combien de chantiers allez-vous relancer et comment les ciblez-vous ?

Philippe Beauchamps : Dès le 13 avril, nous allons redémarrer le travail sur une vingtaine de chantiers tests, contre 400 en temps normal. Cela va mobiliser près de 120 salariés sur les 2 200 qui interviennent habituellement sur nos chantiers. La liste de ces chantiers sera arrêtée à la fin de cette semaine, il y aura par exemple une importante extension d’une usine agroalimentaire en Normandie. Ils vont nous permettre de vérifier si nos nouvelles méthodologies de travail, qui intègrent les règles liées au Covid-19, fonctionnent. Le cas échéant, nous verrons comment les ajuster, avant de les redéployer vers d’autres chantiers. Le mois d’avril va nous permettre de remettre la machine en route, car redémarrer un groupe comme Ramery, ça prend du temps.

Il faut savoir que la montée en puissance sur la réouverture des chantiers ne dépend pas de notre volonté mais de celle des maîtres d’ouvrage. Ils sont les premiers responsables de la sécurité sur les chantiers. Certains nous ont déjà indiqué qu’ils ne donneront pas leur feu vert tant que le confinement sera en place. C’est vrai que la situation actuelle est anxiogène mais il faut vivre avec. Si tout le monde reste chez soi pendant deux mois, l’économie sera par terre. On aura des personnes vivantes, mais sans travail. Parmi nos collaborateurs, je n’ai pas eu connaissance de salariés faisant valoir leur droit de retrait. Ils sont plutôt en demande d’une reprise de l’activité. Sur les 120 salariés qui travaillent au siège, une quinzaine se rend de nouveau sur le site, avec des mesures de sécurité sanitaire renforcées, pour des raisons de débit Internet.

Quelles vont être les conséquences de cette crise sur l’activité du groupe Ramery ?

Philippe Beauchamps : Une des discussions que nous avons eues avec les maîtres d’ouvrage concerne la tentation de ne pas reprendre, car avec les nouvelles règles la performance chantier va être dégradée. Il est possible de perdre moins en ne reprenant pas, mais dans ce cas les salariés restent au chômage partiel… Nous avons tous acté que nous allions avoir une année 2020 terrible pour 90 % de l’économie. Pour ma part, je crains l’année prochaine aussi, car nos métiers dépendent beaucoup de la commande publique. Nous étions déjà sur une année électorale, qui se trouve encore complexifiée par la situation. Les décisions d’investissement ne sont pas prises, dans l’attente des futurs élus. Cela aurait été plus simple pour nos métiers si les maires actuels étaient restés en place jusqu’à la fin de l’année. Le point positif, c’est l’appel lancé par le gouvernement et les préfets aux collectivités, pour qu’ils paient les entreprises et ce, avec moins de retard que d’habitude, et pour qu’ils relancent la commande publique. Concernant la commande privée, cela va dépendre des secteurs. Nous n’avons pas encore fait le dossier pour le prêt garanti par l’État, mais nous allons y avoir recours.

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