Le Journal des Entreprises : Avec la crise liée au Covid-19, entreprises et citoyens sont face à une situation inédite, difficile à analyser. Quels sont les conseils de votre podcast Outils du Manager pour maintenir un management serein dans ce contexte angoissant ?
Cédric Watine : Sur le fond, les managers doivent être particulièrement attentifs aux informations qui circulent et aux messages qu’ils véhiculent eux-mêmes. Dans ce contexte particulier, il ne faut pas se laisser aller à la conjecture, ou à des considérations angoissantes sur ce qui pourrait advenir. Le manager ne doit pas oublier qu’il n’est pas en train de discuter avec sa famille ou ses amis, ni au café du commerce. Donc on reste concentré sur les informations dont on dispose et surtout, qui concernent directement la situation de l’entreprise, les tâches à réaliser dans l’immédiat. De toute façon, personne n’a de prise sur le reste. C’est une façon de maintenir les angoisses des uns et des autres sous contrôle, dans un contexte où elles sont réelles, et légitimes. Quand elles s’expriment, il faut bien sûr savoir entendre ces peurs, les écouter, mais y répondre très factuellement, sans en rajouter. Et, tout en étant transparent sur les informations concrètes dont on dispose, concernant l’organisation du travail ou le versement des salaires par exemple, il faut ramener le débat vers le travail à effectuer.
En ce moment, beaucoup d’entreprises découvrent le télétravail à grande échelle, et les enjeux du management à distance. Comment bien gérer cette nouvelle donne ?
Cédric Watine : La première étape, c’est de ritualiser sa communication. Sur un même site, on se croise en permanence, les informations circulent de façon fluide. Il faut remplacer ces moments d’échanges informels par une communication ritualisée, en s’appelant par exemple tous les jours, pour un point de deux minutes ou un échange d’une demi-heure, selon les cas ou les besoins. En maintenant cette communication, le manager maintient le lien avec l’entreprise mais surtout montre son soutien, et offre un remède à l’angoisse qui peut accabler certains salariés devant le flux d’informations qu’ils reçoivent en ce moment, en les maintenant dans le concret et dans l’action.
Est-ce que cette expérience, forcée, du télétravail pourrait convaincre des entreprises d’adopter définitivement ce mode de fonctionnement, selon vous ?
Cédric Watine : C’est possible que cela accélère le mouvement ! Le management à distance est de toute façon la grande tendance depuis quelques années, et la France a du retard à rattraper en la matière. Elle ne compte que 8 à 10 % de télétravailleurs contre 30 à 35 % en moyenne dans les pays d’Europe du Nord. Lors d’un récent sondage, 71 % des cadres français déclaraient vouloir travailler davantage en télétravail, c’est une tendance lourde. Et sans aucun doute, beaucoup vont se rendre compte, avec le confinement, qu’en effet, le télétravail améliore la qualité de vie en permettant de gagner beaucoup de temps par rapport au présentiel. Et que, quand on a les bons outils à disposition, l’efficacité au travail peut être décuplée. Mais il faut être attentif aux bonnes pratiques, et notamment à la charge de travail. Si les limites ne sont pas posées, le travail empiète sur la vie personnelle, et le risque de burn-out est bien présent.
