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À Boulogne-sur-Mer, la filière pêche subit les conséquences du Brexit
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À Boulogne-sur-Mer, la filière pêche subit les conséquences du Brexit

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À Boulogne-sur-Mer, le temps n'est pas au beau fixe pour la filière pêche. Deux tiers des pêcheurs ne parviennent pas à obtenir du Royaume-Uni la licence, nécessaire depuis le Brexit, pour accéder aux eaux britanniques. Dans cette zone, ils réalisent d'ordinaire près de 60 % de leurs prises.

A Boulogne-sur-Mer, les pêcheurs réalisent en temps normal près de 60 % de leurs prises dans les eaux britanniques — Photo : © DR

À Boulogne-sur-Mer, dans le premier port de pêche français, la colère gronde. Des manifestations sont d’ailleurs prévues, de ce jeudi 22 avril, en fin de journée, jusqu’au lendemain midi. Depuis janvier, deux tiers des pêcheurs attendent du Royaume-Uni les licences qui doivent leur permettre, dans le cadre du Brexit, de poursuivre leur activité dans les eaux britanniques.

Un chiffre d’affaires amputé de 50 à 70 %

Seuls 22 bateaux de pêche sur près de 110 ont, pour l’heure, obtenu cette fameuse licence. Un retard qui n’est pas sans conséquence, car les pêcheurs de Boulogne-sur-Mer réalisent en temps normal près de 60 % de leurs prises dans les eaux britanniques. "Ça met à mal 50 à 70 % du chiffre d’affaires des pêcheurs", souligne Stéphane Pinto, fileyeur à Boulogne-sur-Mer et vice-président du comité des pêches maritimes Hauts-de-France.

La situation n’est donc pas tenable dans la durée, d’autant que la filière a déjà tourné au ralenti en 2020, en raison de la crise sanitaire. "Sans obtention rapide des licences, ou sans mesures de compensation fortes, certains pêcheurs devront cesser leur activité", prévient-il.

Un blocage administratif

Si la filière se déclarait soulagée en janvier dernier, en raison de l’accord signé in extremis entre Londres et Bruxelles dans le cadre du Brexit, le discours a, depuis, bien changé. À l’époque, il était question que les fameuses licences soient délivrées en quelques jours. "Nous avons le sentiment d’avoir été piégés. Nous aurions préféré un no-deal, c’est ce qui se dit aujourd’hui sur les quais. Cela aurait permis à l’Union européenne de négocier plus facilement après le Brexit, regrette Stéphane Pinto. Là, on se retrouve avec un accord qui exige de nous des documents impossibles à fournir".

Car c’est là que réside le fond du problème. Pour accorder cette licence, le Royaume-Uni demande aux pêcheurs de fournir un justificatif électronique, prouvant l’antériorité de leur activité de pêche dans les eaux britanniques, sur une période allant de 2012 à 2016. Or, ce justificatif dépend d’une balise électronique, dont les bateaux de pêche n’étaient pas équipés à l’époque.

5 000 emplois sont en jeu

En attendant, les pêcheurs sortent moins. "Cinq marins travaillent avec moi à bord du bateau et nous ne faisons que deux ou trois marées par semaine, car nous ne sommes pas en capacité de rentabiliser ces sorties", dénonce Stéphane Pinto. Ils se rabattent également sur d’autres espèces, dans les eaux françaises, mais ce n’est pas suffisant : "Si tous les bateaux se retrouvent à pêcher dans le même espace maritime, cela va provoquer des problèmes de cohabitation et d’épuisement des ressources…"

Cette situation menace non seulement les 850 pêcheurs des Hauts-de-France, mais aussi les 140 entreprises de transformation du poisson et leurs 5 000 emplois. Avec la zone industrielle Capécure, Boulogne-sur-Mer affiche une importante activité de transformation du poisson. En 2019, avant la crise sanitaire et l’avènement du Brexit, les pêcheurs de la Cote d’Opale ont vendu près de 28 000 tonnes de poissons et les entreprises de transformation ont traité quelque 300 000 tonnes.

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