Recrutement : les secrets d’un "job dating" réussi
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Recrutement : les secrets d’un "job dating" réussi

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Pour dénicher de nouveaux talents, les PME diversifient leurs méthodes de recrutement. Parmi les formules prisées, figure notamment le "job dating", ou entretien d'embauche "express". Voici quelques conseils pour convertir un tête-à-tête de 15 minutes en rencontre fructueuse.

Un job dating pour recruter une centaine d’ingénieurs. C’est ce qu’a mis en place Naval Group en 2017 sur son site de Cherbourg — Photo : Naval Group

Destiné à trouver l’âme sœur, le speed dating est aujourd’hui entré dans les mœurs. Tout comme son équivalent dans le monde professionnel, le job dating, grâce auquel des recruteurs rencontrent des demandeurs d’emploi. Ici aussi, on organise une série de tête-à-tête assez brefs, et souvent chronométrés (10 à 15 minutes généralement). Le concept a ses vertus, qu’il soit organisé à l’usine, au bureau, ou bien en compagnie d’autres entreprises, de Pôle Emploi ou d’une organisation professionnelle.

Fabricant de sous-marins, récemment porté par des contrats avec l’Australie, Naval Group (13 000 salariés) a déjà lancé plusieurs opérations de job dating. A Nantes, par exemple, pour recruter des soudeurs – un métier sous tension –, le groupe a lancé, l’an passé, une opération comprenant une visite d’usine, des tests de soudage et des entretiens individuels. Bilan de la journée : 100 CV reçus, 20 candidats invités et 10 recrutements, quasiment tous réalisés dans les trois jours qui ont suivi le job dating.

Après une première campagne de communication présentant l’entreprise et ses métiers, le groupe industriel a annoncé l’opération de recrutement, par voie de presse, sur des sites d’offres d’emploi en ligne, sur les réseaux sociaux… « Une fois les CV recueillis, les candidats sélectionnés reçoivent une invitation et des courriels de rappel de l’événement avant le jour J », explique Valérie Belet, en charge du recrutement et de la mobilité chez Naval Group.

Maîtriser l’art du "pitch"

Qui dit job dating, dit temps limité. Il faut donc pouvoir « vendre » l’entreprise en 3 minutes. Cet art de la synthèse, ou du "pitch", certains organismes vous aident à le maîtriser. Quelques jours avant ses soirées "Apec Connect", l’Association pour l’emploi des cadres donne un coup de pouce gratuit aux recruteurs, pour qu’ils puissent peaufiner leur présentation, bien choisir leur argumentaire et se sentir à l’aise. « Un job dating, cela se prépare, insiste Danielle Sancier, déléguée régionale de l’Apec en Nouvelle-Aquitaine. Il faut donner à voir l’activité de l’entreprise et souligner ses atouts : un produit innovant, des technologies de pointe, son positionnement sur l’économie sociale et solidaire, sa croissance… »

« Indiquer les grilles de salaires pratiquées dans l'entreprise ne représente pas un frein. Au contraire. »

Autre prérequis : connaître son bassin d’emploi. Autrement dit, « avoir conscience des profils qui existent ou pas sur le marché, connaître les fourchettes de rémunération pour les postes recherchés, le niveau de concurrence entre les entreprises pour recruter », liste Danielle Sancier.

Attention à ne pas sous-estimer l’importance des conditions salariales. « Indiquer les grilles de salaires pratiquées ne représente pas un frein. Au contraire, c’est important de le préciser », note Fabienne Bichon, chargée des relations entreprises à la CPME Paris Île-de-France, qui a organisé trois job dating l’an dernier, réunissant une douzaine de TPE-PME et 50 candidats à chaque fois. Il ne faut pas hésiter non plus à rentrer dans le détail des avantages salariaux : de la mutuelle aux tickets-restaurants, en passant par les possibilités de covoiturage.

Vendre un poste ou sa culture d’entreprise ?

Impossible de tout dire lors d’un échange chronométré. Il faut donc faire des choix. « Divisez l’entretien en deux phases : un temps de découverte du candidat et de ses aspirations, puis un temps de présentation de l’entreprise », propose Paul Cassarino, directeur général de Seekube. Cet organisateur de job dating suggère également soit d’insister « sur le poste », soit de mettre en avant « la culture d’entreprise ».

Le casting du recruteur s’avère important. Il dépendra donc de la stratégie retenue. « Par exemple, on peut choisir un jeune qui connaît bien la culture de l’entreprise pour en parler à un autre jeune, afin de lui donner envie de venir travailler. Choisir un développeur pointu pour recruter un autre développeur sur un poste très technique… », imagine Paul Cassarino.

« On favorise l’échange, on invite les candidats à se projeter dans l’entreprise. »

Certains chassent aussi en équipe, comme Naval Group, lorsque l’industriel cherchait à embaucher des ingénieurs spécialisés en conception de logiciels, en systèmes embarqués et en cybersécurité. « Parmi les recruteurs, il y avait, d’un côté, des ingénieurs logiciels pour évoquer des questions techniques et la manière dont ils travaillent, et, de l’autre, des profils RH. Car tout le monde ne répond pas aux mêmes questions », décrit la responsable recrutement et mobilité de l’industriel Valérie Belet.

Et pourquoi ne pas profiter d’un salon professionnel ? L’occasion d’immerger le visiteur dans son savoir-faire, au milieu de ses produits, en l’invitant à discuter sur son stand. C’est ce qu’a fait Naval Group sur le salon Euronaval, à l’automne 2018. L’industriel français conviait notamment les candidats à visiter l'un de ses sous-marins Barracuda, grâce à un casque de réalité virtuelle. « En se présentant ainsi, on favorise l’échange, on invite les candidats à se projeter dans l’entreprise », assure Valérie Belet.

48 heures pour reprendre contact

Il ne faut pas oublier qu’un job dating ne reste en général qu’un pré-entretien d’embauche. « Je me souviens d’une entreprise qui avait dressé un tableau des candidats qu’elle s’apprêtait à voir, enrichi d’un planning pour pouvoir fixer une deuxième rencontre dans la foulée, cite Fabienne Bichon. Il faut toujours anticiper le coup d’après : prévoir des tests si l’entreprise recrute sur des métiers techniques ou prévoir un rendez-vous avec des salariés en poste, et construire un vrai parcours d’intégration. »

Paul Cassarino abonde dans ce sens : « Il n’y a pas pire pour un candidat que de ne pas savoir sur quel pied danser. L’idéal est de reprendre contact dans les 48 heures, préconise l’entrepreneur. La temporalité d’un jeune est différente de celle d’une entreprise. Si un jeune reçoit une offre qui lui plaît ailleurs, il n’attendra peut-être pas deux semaines avant de l’accepter, le temps de comparer les opportunités qui se présentent. » Un timing d’autant plus crucial si l’entreprise participe à un job dating avec des employeurs concurrents.

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