Medef : l'heure du renouveau ?
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Medef : l'heure du renouveau ?

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Transformer le Medef, c’est le vœu – pieux ? – partagé par les six candidats qui souhaitent succéder à Pierre Gattaz à la tête de l’organisation patronale le 3 juillet. Si le futur président du Medef doit avant tout accroître la représentativité du syndicat, il devra s'emparer du débat brûlant sur le paritarisme pour redéfinir le rôle de l'organisation.

Redorer l’image du Medef auprès de l’opinion publique et des chefs d’entreprise dans les territoires, une mission délicate que devra relever le prochain patron du Medef — Photo : Herve Kabla - CC BY 2.0

C’est une organisation dont deux tiers des Français ont une mauvaise image*. Le Medef se choisit le 3 juillet un nouveau président pour succéder à Pierre Gattaz, « patron des patrons » depuis 2013. A l’heure où nous bouclons ces lignes, ils sont encore six à briguer le mandat (cinq depuis le retrait de Dominique Carlac'h le 1er juin, NDLR). Deux candidats issus du sérail font office de favoris : Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président délégué au pôle Économie du Medef pendant cinq ans et "serial entrepreneur", et Alexandre Saubot, patron du groupe Haulotte, président depuis trois ans de la puissante Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et "monsieur Social" du Medef.

S’il semblait y avoir peu de place pour un "troisième homme" aux côtés de ce duel accommodant, la donne a changé début mai avec le ralliement de Pierre Brajeux, patron de PME et du Medef Hauts-de-Seine, et Fabrice Le Saché, jeune entrepreneur dans le digital, à la candidature de Patrick Martin, président du Medef Auvergne-Rhône-Alpes et PDG du groupe Martin Belaysoud Expansion. Une candidature atypique portée par un patron ancré régionalement qui pourrait créer la surprise et plaire aux deux autres prétendants, les deux présidents des Medef territoriaux Frédéric Motte (Hauts-de-France) et Olivier Klotz (Alsace). La décision finale revient à l'assemblée générale du Medef (380 délégués pour les organisations professionnelles, 170 pour les organisations territoriales), qui votera le 3 juillet.

Une représentativité à conquérir

Les "territoires" et les PME qui font le tissu économique français, c’est justement cette base que le Medef peine toujours à séduire. L’organisation patronale centrale bénéficie en effet d’un poids surestimé et accentué par sa médiatisation. En 2017, la première mesure de l’audience des organisations patronales a grandement questionné leur représentativité. « Le Medef a été légitimé comme acteur patronal central, mais au lieu des 800 000 adhérents réclamés il doit se contenter de quelque 120 000 cotisants, indirects pour la plupart et ignorant souvent qu’ils font partie de la confédération », estime Michel Offerlé, professeur de science politique à l’Ecole Normale Supérieure.

Les chefs d’entreprises adhèrent en effet le plus souvent indirectement, via leur Medef territorial ou leur fédération professionnelle. Conquérir de nouveaux adhérents volontaires en parlant davantage à des secteurs "oubliés" et à des catégories d’entrepreneurs plus jeunes devrait donc être le cheval de bataille du nouveau dirigeant du Medef.

Les « propositions » plutôt que le « combat »

Autre réflexion imposée dans les débats par certains candidats : la fin du modèle paritaire. Les différentes lois réformant le code du travail ont déjà contribué à le marginaliser en renvoyant la négociation des accords collectifs au niveau des branches professionnelles et des entreprises elles-mêmes. Mais l’autre face de la médaille, la renonciation au paritarisme de « gestion », pourrait être plus problématique pour le Medef comme pour les autres organisations syndicales qui tirent une part significative de leurs recettes des subventions au titre de leur contribution à la gestion d’organismes (Assurance maladie, Allocations familiales, Unédic, OPCA etc). 17 millions d’euros de subventions paritaires sont ainsi prévus sur les 42,7 millions du budget 2018 (24,7 millions d’euros issus des cotisations).

De quoi pousser les principaux candidats à ne pas trancher le nœud gordien pour le moment… Alexandre Saubot veut « revoir » la participation du Medef au paritarisme en se « retirant de l’assurance maladie, de l’assurance vieillesse et des allocations familiales. » Geoffroy Roux de Bézieux sonne « la fin du paritarisme de gestion traditionnel » mais souhaite « conserver un certain nombre de mandats paritaires à l’échelon local ». Pour Patrick Martin, « le paritarisme ne doit pas être rejeté par principe » mais il consent, s’il est élu, à entamer « la renonciation progressive aux financements paritaires ».

La « transformation » comme mot d'ordre

Elu sous une présidence socialiste, Pierre Gattaz avait rapidement imposé son style : une posture combattive faites de punchlines (on se souvient de la promesse « 1 million d’emplois »). Son successeur, qui devrait passer les quatre prochaines années à discuter avec un chef de l’Etat et un gouvernement ouvertement pro-business, pourra davantage être force de propositions que « premier opposant ». Et c’est justement un point qui rassemble les différents candidats : tous ou presque prônent la « transformation », la « rénovation » voire la « réforme » d’une organisation qui doit être assez influente pour peser sur les politiques publiques tout en se rapprochant de sa base pour gagner en représentativité.

*sondage OpinionWay pour le mouvement patronal Ethic, avril 2018.

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