Malgré les incertitudes, l’horizon se dégage pour les entreprises du tourisme en 2022
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Malgré les incertitudes, l’horizon se dégage pour les entreprises du tourisme en 2022

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Enfin le retour des beaux jours pour les acteurs du tourisme ? Le secteur profite d’un début d’année solide et de perspectives prometteuses pour cet été, se félicite le gouvernement. Mais une hirondelle ne fait pas toujours le printemps. D’autant que le climat international reste lourd et les difficultés de recrutement vivaces.

L’été 2022 s’annonce radieux pour les entreprises du tourisme, voire meilleur qu’avant la crise du coronavirus. Mais les incertitudes demeurent élevées et la reprise loin d’être encore acquises — Photo : Oscar Nord - Unsplash

Les acteurs du tourisme seraient-ils enfin arrivés au terminus de la crise du coronavirus ? Le bout de ce tunnel épidémique de deux ans semble en tout cas à portée de main, à en croire les chiffres présentés à la presse par le ministre délégué au Tourisme, le 26 avril. Selon Jean-Baptiste Lemoyne, les résultats du début d’année, comme les prévisions pour la saison à venir, laissent en effet entrevoir "une belle reprise du tourisme et un fort rebond" en 2022.

Les touristes français fidèles, les étrangers de retour

Hiver, printemps, été : le redémarrage du secteur devrait se conjuguer à toutes les saisons. Et pour cause : "Les Français ont des fourmis dans les jambes !" Selon une étude des organismes publics ADN Tourisme et Atout France, ils sont 70 % à penser partir en vacances d’ici juin, pour une durée moyenne supérieure à 10 jours. Interrogés fin mars, ils étaient quasiment autant (71 %) à avoir déjà des projets pour cet été. Or, à ce "socle domestique, qui va demeurer très fort, s’ajoute le retour de la clientèle internationale", se réjouit le ministre. Cette double vague de voyageurs devrait, dès lors, propulser l’activité à des sommets plus atteints depuis le Covid-19. Ainsi, selon les projections du comité de filière, reprises par Jean-Baptiste Lemoyne, l’hôtellerie de plein air, par exemple, enregistre déjà un boom de ses réservations estivales de 24 %, pour un chiffre d’affaires prévisionnel en croissance de 30 % par rapport à… 2019 !

Ce redécollage spectaculaire devrait signer le retour en forme des destinations urbaines : les villes représenteraient 29 % des intentions de départ. "Elles retrouvent ainsi la deuxième position que les territoires ruraux et de montagne leur avaient ravie en 2020-2021", décrypte le ministre.

Après un hiver radieux, un printemps prometteur

Ces tendances étaient déjà à l’œuvre en avril. Les taux d’occupation à Paris ou dans les hôtels 5 étoiles du pays ont ainsi dépassé leur niveau d’avant-coronavirus de plus de 3,5 points. Plus largement, "l’hôtellerie est un mode d’hébergement qui reprend des couleurs", assure Jean-Baptiste Lemoyne, chiffre à l’appui : le revenu par chambre, autour du week-end de Pâques, était de 18 % supérieur à 2019.

L’année a aussi démarré sur les chapeaux de roues. Les stations de ski ont commencé à faire les comptes, et ils sont très bons. En dépit d’un début de saison sous la menace du variant Omicron, le taux d’occupation des hébergements, arrêté au 15 mars, s’élevait déjà à 69 %. Soit 1 point de moins seulement qu’en 2019-2020, selon l’observatoire de l’Association nationale des maires des stations de montagne.

Voyagistes, événementiel… des activités toujours en souffrance

La crise du coronavirus devrait toutefois laisser encore sa marque sur plusieurs activités, en raison de changements d’habitudes de consommation. Certaines créent de nouvelles opportunités. Le ministre note, par exemple, une "augmentation du goût pour l’itinérance et un doublement des personnes recourant à la location de vans et de camping-cars".

D’autres évolutions fragilisent des pans entiers du secteur. Il en va ainsi des entreprises du voyage, reconnaît Jean-Baptiste Lemoyne. Leur activité resterait amputée de 15 % par rapport à 2019. Victimes du télétravail, de la visioconférence et du risque sanitaire, les voyages d’affaires, eux, souffrent encore plus (-30 %). Note d’espoir quand même : le Seto, syndicat des tour-opérateurs, a enregistré une hausse de 2 % sur un an du chiffre d’affaires de ses adhérents, entre novembre et février, période pourtant marquée par la cinquième vague de Covid-19. "Un important redémarrage" des réservations était même en cours en janvier-février, à la veille de l’invasion russe en Ukraine.

Situation plus délicate, en revanche, pour l’événementiel et les traiteurs, à en croire l’Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih). L’organisation patronale a récemment alerté sur leurs difficultés à s’en sortir. Entre la cascade d’annulations subie cet hiver et l’inflation galopante à encaisser ce printemps, "40 % des entreprises pourraient arrêter leur activité […], à défaut d’un accompagnement économique prolongé et adapté", a mis en garde l’Umih à la mi-avril.

La reprise du tourisme sous une triple menace

Pour autant, la conjoncture, pour l’ensemble du secteur, n’en reste pas moins prometteuse. Mais aussi fragile. Car les acteurs du tourisme sont des entreprises comme les autres : soumises aux aléas et impacts des deux crises en cours, la pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine. Or, ces inquiétudes seront déterminantes pour la suite de l’année. Ainsi, parmi les 4 000 personnes sondées par ADN Tourisme et Atout France, "68 % signalent que leur budget sera réduit (cet été, NDLR), compte tenu de l’inflation, et 42 % attendent de voir l’évolution du conflit ukrainien pour réserver".

Idem du côté des quelque 3 200 étrangers, interrogés, cette fois, par TCI Research et Atout France : dans le trio de tête des freins à un potentiel séjour dans l’Hexagone figurent le contexte géopolitique, l’inflation actuelle et le rebond épidémique.

Les difficultés de recrutement, l’autre frein au redémarrage

Un autre risque, structurel celui-là, menace aussi la reprise du tourisme en 2022 : le manque de main-d’œuvre. L’hébergement-restauration aurait plus de 360 000 postes à pourvoir cette année, selon une récente enquête de Pôle emploi. Et l’Umih s’attend déjà à avoir du mal à combler ses besoins en saisonniers pour l’été (plus de 200 000 personnes à trouver). "On met tous les moyens sur la table", assurait Thierry Grégoire, sur Europe 1, le 23 avril. Sauf que "le rapport au travail a changé" depuis le Covid-19, et les candidats ont disparu. "Il va donc nous falloir avoir une forte adaptabilité de notre côté. Mais si on ne peut pas recruter, nous serons contraints de fermer nos établissements en juillet-août, période où l’on concentre pourtant la plus grande partie de notre chiffre d’affaires", déplorait le responsable des saisonniers au sein de l’organisation patronale.

Sur ce point, Jean-Baptiste Lemoyne joue profil bas. Il renvoie au dialogue social l’amélioration de l’attractivité du secteur. Tout juste promet-il "une campagne de promotion des métiers du tourisme", dotés de 9 millions d’euros, pour 2022- 2023. Une mesure prévue dans le plan de soutien "Destination France" présenté en novembre. Mais les marges de manœuvre du ministre sont, il est vrai, plutôt limitées en ces temps d’entre-deux quinquennats et de fin de législature.

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