Le financement participatif poursuit son ascension et accélère sa professionnalisation
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Le financement participatif poursuit son ascension et accélère sa professionnalisation

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Le crowdfunding affole encore les compteurs. Avec plus de 2,3 milliards d’euros levés auprès des particuliers en 2022, le secteur confirme son dynamisme et prend une place grandissante dans le financement des entreprises. Et ce n’est pas fini, assure l’association professionnelle FPF : de nouvelles règles européennes devraient encore asseoir la crédibilité de ce mode original de levées de fonds.

Année après année, le financement participatif prend de l’ampleur : en dépit d’une baisse du nombre de projets soutenus, les montants collectés ont bondi de 25 % en 2022, selon Mazars et FPF — Photo : Anuchit Singkham - CC0

Le financement participatif, c’est du sérieux ! À la veille d’une vaste réorganisation du secteur et en dépit des tempêtes économiques successives, le crowdfunding a fermement maintenu le cap de la croissance en 2022. Ce mode de levées de fonds "par la foule" a bouclé l’année sur un nouveau record de collecte de 2,35 milliards d’euros (+25,3 % sur un an), selon le baromètre du cabinet Mazars et de l’association professionnelle Financement participatif France (FPF), réalisé à partir des réponses de 66 plates-formes.

"Une vraie performance", vu le contexte économique, "d’autant plus remarquable qu’elle vient après une hausse de 84 % en 2021", se réjouit Damien Guermonprez, le président de FPF. Ce résultat exceptionnel est toutefois terni par la nette baisse en volume de l’activité, avec 120 107 projets comptabilisés (-28,8 %). Une contraction qui a sans doute contrarié les espoirs du secteur : il y a un an, FPF espérait bien se rapprocher de la barre des 3 Md€ dès 2022.

Les entreprises se laissent convaincre par le crowdfunding

Mais au-delà de ce bémol, le crowdfunding semble bel et bien s’installer dans le paysage du financement, en tant qu’alternative crédible pour les acteurs économiques. D’ailleurs, si les campagnes de dons ont nettement marqué le pas l’an dernier (-45,8 % en montants collectés), il en est allé tout autrement des modèles traditionnellement privilégiés par les entreprises.

À eux seuls, les prêts ont permis de rassembler près de 2,1 milliards d’euros (+32,8 %). La majorité de cette somme (85 %) a pris la forme d’emprunts obligataires, captés pour l’essentiel par l’immobilier, véritable "locomotive" du financement participatif. Mais, en nombre de projets, les prêts rémunérés font jeu égal (1 750 environ) pour un montant levé (302,5 M€), certes, plus modeste, mais en progression (+16,3 %). Même tendance pour l’investissement, avec 150 M€ amassés en capital ou royalties (+44,9 %).

Au total, 5 786 entreprises, auxquelles s’ajoutent près de 4 000 start-up et 24 000 structures de l’ESS, ont ainsi embarqué dans l’aventure participative. À l’image du transporteur breton à la voile Towt. Son cofondateur Guillaume Le Grand reconnaît bien volontiers, aujourd’hui, s’être lancé dans une telle campagne sans trop y croire. Résultat des courses : 4,5 millions d’euros levés, auprès de plus de 2 000 particuliers.

Le financement participatif se prépare à changer de dimension

De fait, le financement participatif a encore de beaux jours devant lui, assure FPF. Son président pense le secteur capable de maintenir un rythme de croissance annuelle d’au moins 25 %, comme en 2022. Il compte notamment beaucoup sur l’entrée en vigueur, en novembre prochain, d’une nouvelle réglementation européenne, pourtant un temps décriée par son association. Cette harmonisation autour d’un statut quasi-unique de "Prestataire de services en financement participatif" (PSFP), représente, pour les opérateurs, "une marche autrement plus haute" à franchir que leurs précédentes obligations, relève Bertrand Desportes, associé chez Mazars. Les prérequis pour obtenir l’agrément (gouvernance renforcée, dispositif de contrôle interne, fonds propres minimaux…) vont en effet leur "demander un effort particulier" et "des fondamentaux solides". Or, moins de 5 % d’entre eux disposaient déjà du label PSFP en 2022.

Le marché devrait donc connaître une profonde réorganisation cette année. Mais ce surcroît de régulation devrait apporter un surplus de professionnalisation, estime Damien Guermonprez. Entre autres effets possibles de la réforme, l’association s’attend à une meilleure distribution des projets participatifs auprès d’acteurs tiers, notamment les conseillers en gestion de patrimoine (15 % de la collecte en 2022) ou les fonds d’investissement (8 %). "Au fur et à mesure que le nombre de projets augmente, les plates-formes sont incitées à s’appuyer sur ces canaux robustes, explique Bertrand Desportes. Ils leur permettent d’aller chercher l’épargne des Français plus en profondeur, et de manière complémentaire." Question de survie aussi pour les sites de financement participatif : jusqu’à présent, moins des deux tiers ont réussi à trouver leur équilibre financier.

# Capital # Conjoncture # Levée de fonds