Immobilier : est-il plus intéressant d’acheter ou de louer ses bureaux ?
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Immobilier : est-il plus intéressant d’acheter ou de louer ses bureaux ?

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Acheter ou louer ses locaux ? Chacune des formules possède ses avantages et ses inconvénients. Ce choix dépend avant tout des projets de développement de l’entreprise et de la rentabilité de l’opération.

Pour les dirigeants qui hésitent entre la location ou l’achat, il existe une formule intermédiaire : le crédit-bail immobilier — Photo : Jacob Ammentorp Lund

Des taux d’intérêt historiquement bas. Voici ce qui pousse les dirigeants à vouloir investir dans la pierre et à acquérir leurs locaux professionnels. La perspective de ne plus payer de loyers semble séduisante, mais est-ce pour autant judicieux ? Tout dépend en réalité des perspectives d’évolution de l’entreprise et de sa stabilité financière. Un dirigeant dont l’entreprise est mature, et qui est dans la capacité de se projeter sur 5 ou 6 ans, a tout intérêt à se tourner vers l’achat. « Dans le cas contraire, une entreprise qui enregistre une croissance rapide et qui doit d’ici deux à trois ans accroître sa surface et changer de locaux, ne va pas se poser la question de l’achat. Elle ne pourra en effet pas amortir les frais d’acquisition », estime Jérôme Ledig, président In Extenso Centre Est. La location va ici apporter à l’entreprise une grande souplesse. Et même de la sécurité si elle opte pour un bail commercial. Également appelé 3-6-9 et couramment utilisé, ce bail protège l’entreprise pendant neuf ans, et lui laisse la possibilité de rompre son contrat tous les trois ans. « Cette formule présente un autre avantage pour le locataire. Le propriétaire ne peut en effet pas interrompre le contrat de location, sinon il doit payer la valeur du fonds de commerce », poursuit Jérôme Ledig. Les baux précaires et professionnels prévoient quant à eux des durées de location plus courtes, respectives d’un an, et de deux à six ans. Pour maîtriser un maximum l’évolution de ses loyers, il est par ailleurs conseillé de privilégier les contrats qui affichent un indice basé sur le coût de la consommation. « Ils sont en effet moins volatils que les contrats basés sur le coût de la construction, et vont permettre à l’entreprise de maîtriser l’évolution du loyer sur la fin du bail », explique Jérôme Ledig.

Analyser la rentabilité de l’achat

L’achat ne manque pas aussi d’attraits. Le principal étant pour l’entrepreneur de se constituer un patrimoine à titre personnel. Le dirigeant peut acheter directement le bien ou se porter acquéreur via une société immobilière (SCI). Cette dernière est propriétaire du local professionnel, qu’elle met à disposition de la société par le biais d’un bail. « La SCI, en louant les locaux à la société, perçoit des revenus fonciers, et ses résultats pourront être reversés au chef d’entreprise, explique Olivier Thireau, associé responsable Immobilier & BTP chez Mazars. Le dirigeant conserve ainsi sa capacité d’emprunt à titre personnel pour réaliser des investissements ».

Avant de se lancer dans une acquisition, il ne faut pas perdre de vue un objectif premier : le patrimoine acquis doit gagner en valeur. « Cela nécessite d’acheter au bon prix. Il faut regarder les facteurs qui peuvent avoir une influence positive ou négative sur la valeur du bien, l’emplacement, l’arrivée de transport en commun, l’environnement. L’objectif pour le dirigeant est de réaliser une bonne opération patrimoniale », confie Jérôme Ledig. Plus le prix d’achat s’avère faible, meilleur sera donc la rentabilité de l’investissement. Sauf que dans le contexte actuel, les prix de l’immobilier surfent sur une vague ascendante, surtout dans les grandes villes.

« Si les locaux professionnels acquis sont neufs ou construits il y a moins de cinq ans, il sera possible de récupérer la TVA »

À Paris, le prix moyen au mètre carré avoisine 9 000 euros, contre 4 000 à Lyon et Bordeaux. Les villes de Toulouse et Nantes, qui dépassent désormais 2 100 euros le mètre carré, ont enregistré les plus fortes progressions en un an (respectivement +4,2 % et 2,2 %), selon les chiffres publiés en avril 2019 par BureauxLocaux, une plateforme qui rassemble l’offre immobilière des entreprises. « Les demandes d’achat sont nombreuses en Ile-de-France, et il n’y a pas assez de produits à la vente, ce qui impacte les prix à la hausse. Les entreprises doivent être conscientes de la tension du marché dans certaines villes. Nous constatons un certain désarroi des PME car elles ne comprennent pas pourquoi les recherches sont si longues, voire infructueuses », constate Sophie Desmazières, présidente de BureauxLocaux. Cette contrainte peut donc pousser les conseils spécialisés en immobilier d’entreprise à déconseiller l’achat.

Des avantages fiscaux

D’un point de vue fiscal, l’avantage est donné à l’achat. « Si les locaux professionnels acquis sont neufs ou construits il y a moins de cinq ans, il sera possible de récupérer la TVA. Quant aux intérêts d’emprunt et aux amortissements, ils pourront également être déduits », assure Jérôme Ledig. Les locaux achetés et affectés à l’entreprise sont par ailleurs exonérés d’IFI, le nouvel impôt sur la fortune immobilière.

Le fait d’être locataire permet de déduire de son bénéfice l’intégralité des loyers versés à son bailleur, sous réserve que ces locaux soient affectés à la profession. Si les locaux loués sont mixtes (à usage d’habitation et professionnel), seule la part du loyer correspondant à l’usage professionnel est déductible. Attention, toutefois, pour les entreprises qui appliquent les normes comptables IFRS, une nouveauté introduite depuis le 1er janvier 2019 rend le régime de la location moins favorable. « En application de la nouvelle norme IFRS16, les contrats de location sont désormais comptabilisés au bilan, et vont venir augmenter les dettes. Même en location, les entreprises vont donc avoir une dette similaire à une acquisition en propre. Les bilans des entreprises vont s’alourdir », prévient Olivier Thireau.

Pour les dirigeants qui hésiteraient entre la location ou l’achat, il existe une formule intermédiaire : le crédit-bail immobilier. Cette opération permet à une entreprise de louer des locaux à usage professionnel et de les acquérir à la fin du contrat de location. « Ce mécanisme se développe de plus en plus, notamment dans les entreprises qui grandissent rapidement. Il permet au locataire d’acquérir un bien sans apport initial et sans prêt bancaire, tout en ayant une charge étalée dans le temps. En effet, les loyers qu’il verse en cours de location seront déduits directement du résultat imposable », détaille Jérôme Ledig.

La tendance du coworking

Le coworking est une formule encore plus souple qui permet à une petite entreprise de s’installer temporairement dans un lieu de travail partagé et de bénéficier de différents services - utilisation d’un bureau évidemment, mais aussi une connexion à internet, un accès aux imprimantes, à des salles de conférences… En échange, les coworkers paient une somme journalière ou mensuelle. « C’est une tendance majeure. Les entrepreneurs ont un nouveau rapport au travail et aussi à l’immobilier. Les lieux de coworking offrent une nouvelle manière de travailler, plus flexible, plus propice à la créativité, et permettent la rencontre et l’échange entre entreprises », rapporte Sophie Desmazières. Depuis 2012, le nombre d’espaces de coworking a été multiplié par dix pour atteindre 14 000 espaces dans le monde, dont plus de 700 en France. En 2018, selon BureauxLocaux, les 250 centres d’Ile-de-France représentaient plus de 300 000 m², soit 3 % de l’offre disponible. « Il est vraisemblable que le coworking représente 10 % du parc immobilier dans 5 ans », parie Sophie Desmazières.

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