Emploi cadre : comment les employeurs s’adaptent aux difficultés de recrutement
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Emploi cadre : comment les employeurs s’adaptent aux difficultés de recrutement

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Les codes du recrutement ont changé sur le marché de l’emploi cadre. Face à la pénurie de compétences et aux difficultés à trouver les bons profils, les employeurs ont d’ores et déjà modifié leurs pratiques, indique une étude de l’Apec. Même si certaines habitudes ont la vie dure.

Face à leurs difficultés de recrutement des cadres, les entreprises ont commencé à modifier certaines de leurs habitudes, démontre une enquête de l’Apec — Photo : Goodluz

La chasse aux talents aura rarement aussi bien porté son nom. Avec la dynamique de l’emploi cadre, retrouvée en 2021 et attendue en 2022, sont revenues en force les difficultés de recrutement. Résultat, la durée moyenne nécessaire à la conclusion d’une embauche s’est allongée de 14 jours, pour culminer à 11 semaines en 2021, selon l’Association pour l’emploi des cadres (Apec).

Face à cette situation, les entreprises ne sont pas restées les bras croisés, assure l'Apec : elles ont, au contraire, déjà adapté leur stratégie RH à cette nouvelle donne post-coronavirus. Une étude, réalisée auprès de 1 150 sociétés, interrogées du 14 janvier au 14 février, permet ainsi d’identifier au moins trois évolutions récentes dans les politiques de recrutement des employeurs.

Multiplier ses canaux de recrutement

Première tendance identifiée par l’Apec : la recherche de candidats se fait désormais "plus proactive", voire "plus offensive". Ainsi, si la bonne vieille offre d’emploi reste leur support privilégié (à 81 %), les employeurs n’hésitent plus à la diffuser tous azimuts : 41 % publient leurs annonces à la fois sur leur site web, des plateformes spécialisées et les réseaux sociaux (+6 points par rapport à 2019).

LinkedIn, Twitter et consorts poursuivent, au passage, leur montée en puissance : 69 % des recruteurs affirment y avoir eu recours au moins une fois l’an dernier (+7 points), un réflexe surtout populaire dans les grandes sociétés. Les PME, elles, préfèrent s’appuyer sur leur carnet d’adresses (à 77 %), avant de se tourner vers les réseaux sociaux (67 %).

Autre pratique en plein développement : "l’approche directe" de profils jugés intéressants séduit les deux tiers des petites et moyennes entreprises (+4 points) et les trois quarts des structures de plus grande taille (+5 points). Elle participe de cette logique d’aller toujours plus au-devant des candidats, sans attendre qu’ils viennent à l’entreprise.

Enfin, dans cette "stratégie de diversification des canaux de recrutement", les professionnels des ressources humaines (cabinets de recrutement, agences d’intérim, etc.) ne sont pas en reste : 4 employeurs sur 10 ont fait appel à eux en 2021, un niveau comparable à l’avant-coronavirus (-2 points).

Soigner sa marque employeur

Pour trouver la perle rare plus facilement et rapidement, il ne suffit plus de faire connaître ses offres d’emploi. Encore faut-il aussi faire aimer son entreprise. À ce titre, les recruteurs soignent de plus en plus leur "promesse employeur". L’offre d’emploi, explique ainsi l’Apec, est dorénavant "pensée comme une vitrine pour valoriser l’attractivité du poste. Une majorité d’entreprises y évoque l’utilité générale des missions (71 %), ainsi que les conditions de travail (66 %)." Rien d’étonnant à cela : après la rémunération, ces éléments font partie des "critères essentiels" mis en avant par les cadres dans leur recherche de poste, rappelle l’association, sur la base d’une enquête précédente.

Dans cette vaste opération séduction, un argument nouveau peut faire toute la différence : le télétravail, un "levier [potentiel] d’attractivité, lorsque la concurrence sur certains profils est forte". Les employeurs qui le proposent l’ont bien compris : ils sont 67 % à mettre le sujet sur la table, lors des entretiens d’embauche - une proportion en hausse de 18 points en un an !

Adapter ses critères d’embauche

Las, malgré tous ses efforts, les entreprises ne trouvent pas forcément le profil idéal. Et pour cause : leurs difficultés de recrutement proviennent quasiment autant de l’insuffisance des candidatures reçues (à 70 %) que de l’inadéquation entre celles-ci et les besoins exprimés (63 %). Une situation compliquée, en région, par le "manque de profils disponibles sur le marché de l’emploi" local, problème cité par 73 % des répondants de province (contre 62 % chez les Franciliens).

Dans ces conditions, pas le choix : 84 % des employeurs se sont vus contraints d'"assouplir leurs critères de sélection et consentir à de nombreux ajustements". Première variable : la rémunération, revue à la hausse dans 55 % des cas. Vient ensuite le recrutement de cadres soit dépourvus des compétences techniques initialement attendues (à 47 %), soit moins expérimentés qu’espéré à l’origine (46 %).

Le processus de sélection, prochaine variable d’ajustement ?

Malgré leurs difficultés à recruter, et leur flexibilité pour tenter de les contourner, les employeurs ne sont quand même pas prêts à tout changer, note enfin l’Apec. Le diplôme, par exemple, reste un sésame, sur lequel très peu d’entreprises sont prêtes à transiger : seulement 30 % des PME ont accepté d’embaucher, l’an dernier, un cadre n’ayant pas les titres attendus.

Surtout, le processus de sélection en lui-même reste très figé. La présentation des diplômes, la lettre de motivation et la présélection téléphonique gardent les faveurs des deux tiers des employeurs. Et même si les candidats se font rares, pas question de se précipiter sur le premier venu. La majorité des entreprises (83 %) continuent de vérifier les informations transmises par les postulants. Celles confrontées à des difficultés de recrutement recourent même davantage que les autres aux tests de compétences (à 58 %, soit 10 points au-dessus de la moyenne). Autant d’habitudes que la conjoncture actuelle n’a pas réussi à changer.

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