Cyril de Sousa Cardoso  : « Une entreprise qui ne commet pas d'erreur ne produira jamais d’innovation »
Interview # Innovation

Cyril de Sousa Cardoso directeur associé chez Audalom en charge de l'innovation Cyril de Sousa Cardoso  : « Une entreprise qui ne commet pas d'erreur ne produira jamais d’innovation »

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Directeur associé en charge de l'innovation de l'entreprise Audalom, basée à Nice, Cyril de Sousa Cardoso a coécrit L'Art de l'innovation, un livre qui fait le récit de 21 histoires d'innovations à travers celles des grands inventeurs et de leurs techniques. Explications.

Cyril de Sousa Cardoso, directeur associé chez Audalom en charge de l'innovation
— Photo : DR

Le Journal des Entreprises : Le livre L'Art de l'innovation regroupe 21 histoires aussi étonnantes qu'inspirantes, relatant l'invention de l'imprimerie par Gutenberg, celle du Velcro par Georges de Mestral ou encore celle de l'aspirateur cyclonique par James Dyson. Comment vous est venue l'idée de ce livre ?

Cyril de Sousa Cardoso : Avec Audalom, dont le siège est à Nice mais qui intervient sur toute la France et beaucoup en Bretagne, nous menons une activité de conseil BtoB en transformation des organisations. À l’origine de ce livre, il y a cette expérience de terrain et un cours donné au sein de l'Edhec. Ces rencontres nous ont poussés à partager une dizaine d'années de recherches documentaires et de pratique au sein des entreprises.

Bien souvent, une invention est reliée à son inventeur, pourtant les histoires du livre insistent sur le fait qu'une innovation n'arrive jamais par un seul homme. L'innovation, c'est d'abord le fruit du travail collectif ?

C.S.C. : En effet, l'innovation est un phénomène social. Bien souvent, elle arrive quand toutes les conditions sont réunies. 95 % des contentieux pour l'obtention de brevets sont d'ailleurs le fait de personnes qui ont eu l’idée au même moment. Ce phénomène d'innovation multiple ne date pas d'hier : c'est arrivé pour le télescope, la photo couleur... L'inventeur isolé dans son labo est une image d'Epinal et le moment Eurêka est un mirage. C'est juste le moment où l'on relie tous les éléments d'un puzzle entre eux. Il faut donc abandonner la dimension d'ego et assumer la part collective, notamment en entreprise.

« L'inventeur isolé dans son labo est une image d'Epinal et le moment Eurêka, un mirage. »

À notre époque, on peut s’inquiéter de se voir confisquer l’innovation par certains grands groupes américains. De quoi penser que l'innovation, ça ne concerne pas les PME ou ETI françaises. Pourtant, avoir la taille et les moyens contraints d'une PME, c'est plutôt un avantage car cela pousse à innover de manière ingénieuse, en utilisant la contrainte comme source d’innovation.

Justement, après chaque histoire, on trouve un jeu à tester par équipe. Peut-on y jouer dans une PME ?

C.S.C. : Ces jeux sont pensés et testés pour s'approprier l'innovation surtout dans une PME ! Nous vivons une époque de transition où il est difficile de dire où l’on va. Où la PME doit être apte à remettre en cause ses paradigmes, le tout, malgré sa connaissance de l’activité et de son territoire. Il faut savoir réinterroger son business, observer comment les attentes des clients changent. Le jeu en équipe permet de trouver des solutions insoupçonnées. Bien sûr, il est normal de ne pas emporter tout le monde au premier essai, il faut trouver les personnes dans une équipe qui auront envie de fédérer et porter des projets concrets.

Au-delà du jeu, une démarche d'innovation doit toujours répondre à des besoins concrets et non-satisfaits. Et il faut s'attendre à subir des échecs, car une entreprise qui ne commet pas d'erreur ne produira jamais d’innovation. Ce qui est grave, c'est de reproduire les même erreurs, car on a tendance à passer sous silence des échecs. Un mal très français, mais les mentalités évoluent. J'espère que ce livre y contribue.


Livre L'Art de l'innovation, Jean-Christophe Messina et Cyril de Sousa Cardoso, éditions Eyrolles.

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