Comment Renault veut faire des économies en réorganisant ses usines françaises
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Comment Renault veut faire des économies en réorganisant ses usines françaises

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Le constructeur automobile français Renault a dévoilé le 29 mai son plan d’économies de plus de 2 milliards d’euros. Attendu depuis février, annoncé en pleine crise du coronavirus, ce projet prévoit 15 000 suppressions de postes, dont 4 600 en France. En région, quatre usines sont dans l’œil du cyclone : Maubeuge et Douai dans le Nord, ainsi que Caudan (Bretagne) et Dieppe (Normandie).

Renault compte supprimer 4 600 postes dans ses usines françaises, dans le cadre d'un plan d'économies de plus de 2 milliards d'euros — Photo : Antoine La Rocca

Renault abat ses cartes, sans montrer tout à fait son jeu. Le constructeur automobile français a précisé le 29 mai le contenu d’un programme d’économies de 2,15 milliards d’euros sur trois ans, censé lui permettre de « restaurer la compétitivité du groupe et assurer son développement sur le long terme ».

Un « projet de plan de transformation » qui ne se fera pas sans casse pour les usines et les emplois localisés en France : près de 4 600 postes vont y être supprimés (15 000 au total dans le monde), soit 9,5 % des effectifs de Renault dans l'Hexagone. Aucun licenciement sec n’est prévu, cette réduction de masse salariale passerait par « des mesures de reconversion, de mobilité interne et des départs volontaires », explique le groupe dans un communiqué.

Quelle réorganisation pour Renault en France ?

En France, la philosophie générale de cette « transformation » consiste à organiser Renault « autour de pôles d’activités stratégiques d’avenir : les véhicules électriques, les véhicules utilitaires, l’économie circulaire et l’innovation à forte valeur ajoutée ».

Sept sites français sont concernés, à des degrés divers. Une seule fermeture est programmée, celle de l'usine de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne), a précisé le président du groupe Jean-Dominique Senard en conférence de presse.

• Douai et Maubeuge vers un rapprochement

Dans le Nord, Renault roule sur des œufs. Le président de la République a rappelé, le 26 mai, à ses dirigeants leurs belles promesses d’investissement à Maubeuge (1 640 salariés et près de 500 intérimaires), formulées fin 2018. Emmanuel Macron a ainsi conditionné l’octroi d’un prêt garanti par l’État de 5 milliards d’euros à des discussions, prévues la semaine prochaine, sur l’avenir de l'usine maubeugeoise, dont l’activité pourrait migrer vers sa voisine de Douai (3 000 salariés).

Résultat, Renault se contente d’annoncer à présent une « concertation pour étudier […] la création d’un pôle d’excellence optimisé des véhicules électriques et utilitaires légers dans le nord de la France ».

• Dieppe et Caudan maintenus

Le ciel s'éclaircit un peu, en revanche, pour deux sites de près de 400 salariés chacun, dont les indiscrétions de la presse annonçaient la fermeture.

À Caudan (Morbihan), où les inquiétudes étaient vives ces derniers jours, le constructeur entend mener une « revue stratégique » pour la Fonderie de Bretagne. Mais la direction et la CGT ont annoncé, à la mi-journée, le maintien de l'usine.

A Dieppe (Seine-Maritime), « la fin de la production de l’Alpine A110 » est actée, mais Renault ouvre une « réflexion » sur la reconversion de l’usine.

• Réorganisation générale en Ile-de-France

L’implantation de Renault à Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) est condamnée : ses activités seront transférées à Flins (Yvelines), où « un écosystème d’économie circulaire » sera créé. Pas un mot, en revanche, sur l’éventuel abandon de la production automobile au sein de l'usine historique des Yvelines. Le Technocentre de Guyancourt, lui, sera « réorganisé ».

Renault indique par ailleurs que le « développement des technologies stratégiques à forte valeur ajoutée » sera concentré dans ses sites d’ingénierie d’Ile-de-France.

Les autres leviers de rentabilité activés par Renault

Pour le reste, Renault tourne la page de la course aux volumes, engagée par son ancien patron Carlos Ghosn, pour privilégier la rentabilité. Une nouvelle stratégie entérinée par ce chiffre : les capacités mondiales de production vont passer de 4 millions en 2019 à 3,3 millions de véhicules d’ici à 2024.

L’appareil industriel va donc être allégé, en France, comme à l’étranger (projets suspendus au Maroc et en Roumanie notamment), à hauteur de 650 millions d’euros. Quasiment autant que l’effort de rationalisation qui sera demandé aux fonctions support (700 millions d’euros).

Autre levier de rentabilité actionnée par Renault, le développement des synergies dans le cadre de son Alliance avec Nissan et Mitsubishi. Couplées à une « amélioration de l’efficacité et la réduction des coûts de l’ingénierie », elles devraient aider à économiser 800 millions d’euros supplémentaires.

La préparation de ce vaste plan d'économies avait été annoncé en février, après la publication d'une perte nette de 141 millions d'euros sur 2019, la première en une décennie. Avant de tirer les fruits de son projet de restructuration, il en coûtera encore 1,2 milliard d’euros au groupe français pour le mettre en œuvre. De l’argent et aussi du temps pour convaincre les organisations syndicales. La CFDT a déjà promis de « se faire entendre par tous les moyens possibles » contre un projet qualifié « de casse sociale et de dé-industrialisation ».

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