Comment acquérir une entreprise placée en redressement judiciaire
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Comment acquérir une entreprise placée en redressement judiciaire

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Le rachat d'une entreprise placée en redressement judiciaire ne s'improvise pas. Le candidat repreneur doit bien s'informer en amont sur la cible, définir une stratégie efficiente et constituer un dossier solide. Marche à suivre.

Pour être valable, l'offre de reprise d'une entreprise en redressement judiciaire doit contenir un certain nombre d'éléments permettant aux juges du tribunal de commerce d'en apprécier le sérieux — Photo : stock.adobe.com

Selon Marc Ladreit de Lacharrière, avocat associé chez LLA Avocats, « la crise liée au Covid-19 va mettre en péril de nombreuses entreprises. Il va donc y avoir de nombreux fonds de commerce à reprendre à la barre du tribunal à un prix soldé ». La meilleure source d'information pour identifier ces sociétés défaillantes demeure le site cnajmj.fr, du conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires. Il répertorie les actifs à céder par catégorie et zone géographique de manière quasi exhaustive. On peut également contacter directement les tribunaux de commerce ou bien consulter les journaux d'annonces légales ou certains sites spécialisés comme le site mesacquisitions.com.

Des délais courts

Une fois l'opportunité de reprise identifiée, le candidat repreneur prend contact avec l'administrateur en charge de la cession afin d'obtenir certaines informations clés sur l'entreprise. « Il doit signer un accord de confidentialité pour obtenir en retour le dossier constitué des derniers bilans, contrats de travail, baux, bulletins de salaires et détails des procédures judiciaires en cours », détaille Marc Ladreit de Lacharriere. Il peut également avoir accès à ces éléments via une « data room » de plus en plus souvent électronique.

Une fois en possession de ces données capitales, il entame une véritable course de vitesse, en ayant en général un à trois mois pour monter son dossier. À ce stade, il est donc primordial d'anticiper les opérations et de mettre en place une réelle stratégie de croissance externe tout en se posant les bonnes questions : quelles sont les solutions concrètes pour la restructuration de la structure visée ? Quelles sont ses perspectives à moyen terme ? En quoi le projet de reprise peut-il réussir là où le précédent dirigeant a failli ?

"Il est conseillé aux candidats repreneurs de ne s'aventurer que sur un secteur d'activité où ils sont reconnus"

« Pour faciliter les opérations et rassurer les parties prenantes - partenaires financiers, clients, salariés, fournisseurs -, il est conseillé aux candidats repreneurs de ne s'aventurer que sur un secteur d'activité où ils sont reconnus », explique Vincent Moncorgé, directeur général de MCG Opportunités, un cabinet spécialisé dans l'accompagnement des entreprises en difficulté.

Pour être valable, l'offre de reprise d'une entreprise en redressement judiciaire doit en outre contenir un certain nombre d'éléments permettant aux juges du tribunal de commerce d'en apprécier le sérieux comme la désignation précise des biens, les droits et contrats inclus dans l'offre, les prévisions d'activités et de financement, un prix ferme et définitif ainsi que le nombre de salariés repris et le nombre de ceux qui devront au contraire être licenciés. Le candidat doit ainsi garder à l'esprit les objectifs poursuivis par le code du commerce qui encadre l'opération, à savoir le maintien de l'activité de l'entreprise reprise, des emplois qui y sont attachés et l'apurement du passif.

« L'offre doit être motivée et le dirigeant qui la porte doit communiquer ses derniers bilans de sociétés pour montrer qu'il sait bien gérer une entreprise, donner son CV pour prouver son expérience », ajoute Marc Ladreit de Lacharrière.

Pas de place à l'improvisation

Avant de racheter une entreprise à la barre, plusieurs vérifications sont à effectuer. Il faut analyser son niveau d'endettement et vérifier l'état des garanties prises par les tiers sur les actifs de la société : inscriptions de privilèges et nantissements, clauses de réserve de propriété, leasing et locations, prêts bancaires... « Si l'entreprise visée a contracté un prêt bancaire pour acquérir une machine qui intéresse l'acquéreur, ce dernier devra reprendre le paiement du prêt à compter du jugement du plan de cession, explique par exemple Vincent Moncorgé. Le repreneur peut chercher des accords avec des créanciers en amont de la reprise si certains de ces contrats sont trop coûteux, ou décider de s'en séparer ».

Autres points à vérifier : les contrats de travail et la teneur des acquis sociaux des salariés avec notamment les reliquats de droits en congés payés, RTT ou autres. Il faut également s'assurer de l'absence de contentieux prud'homaux. « Si le candidat à la reprise souhaite dénoncer certains contrats ou clauses et trouver un nouvel accord avec les salariés, ces éléments doivent être validés par écrit en amont, pour être stipulés dans l'offre et intégrés dans le plan de cession arrêté par le tribunal de commerce », explique Vincent Moncorgé. Une fois déposée, l'offre engage définitivement le candidat. Sa rédaction est donc déterminante.

Reprendre des actifs liquidés

La reprise à la barre d'une entreprise en redressement judiciaire a pour objectif le maintien total ou partiel des emplois et la poursuite de l'activité confiée à un nouveau dirigeant. La liquidation judiciaire, en revanche, lorsqu'elle est prononcée par le tribunal de commerce entérine le fait que l'entreprise n'est plus viable économiquement et que son redressement s'avère impossible. L'entreprise cesse donc toute activité et le liquidateur judiciaire vend les actifs qui composent la société. Il est le représentant des créanciers avec pour mission de s'assurer que le prix offert dans le cadre de l'offre retenue pour la reprise de ces actifs permet d'apurer au mieux les dettes de la structure.

Si les actifs sont insuffisants, le tribunal prononce la clôture de la procédure pour insuffisance d'actifs. Le repreneur peut se porter acquéreur du fonds de commerce dans son intégralité (droit au bail, stock, clientèle) ou de l'un de ces éléments, en reprenant par exemple le seul droit au bail de la société liquidée. Ce n'est pas le liquidateur qui désigne le repreneur, mais bien le tribunal de commerce qui, une fois tous les avis émis, rend sa décision. Si aucune offre n'est retenue, ou s'il n'y en a pas, le juge-commissaire ordonne la vente aux enchères des actifs de l'entreprise. Toutes les sommes perçues par le liquidateur judiciaire doivent être déposées à la Caisse des Dépôts et Consignations.

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