Cinq questions sur le mécénat d'entreprise, désormais un peu plus à la portée des PME
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Cinq questions sur le mécénat d'entreprise, désormais un peu plus à la portée des PME

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Bonne nouvelle pour les TPE et PME qui pratiquent, ou veulent pratiquer, le mécénat d’entreprise. Dorénavant, ces entreprises ont droit à une plus grande réduction fiscale, grâce à la loi de finances 2019. Le texte apporte en effet des modifications conséquentes au régime de mécénat. Le point en cinq questions.

En mai prochain, l’Industrie Magnifique revient en Alsace. Il s’agit de la 2e édition d’une opération de mécénat associant une vingtaine d’entreprises et des artistes. Schmidt Groupe a ainsi planché sur une œuvre fabriquée à partir de ses matériaux et avec le concours des salariés — Photo : Schmidt Groupe

Un vrai coup de pouce aux petites et moyennes entreprises mécènes. La fiscalité les favorise désormais un peu plus. Voilà qui tombe bien, car les PME sont de plus en plus nombreuses à s’engager dans la voie du mécénat.

1 – Que cherchent les PME qui font du mécénat ?

Ce n’est pas l’argent qui les motive, disent-elles. Il s’agit principalement pour les petites et moyennes entreprises de contribuer à l’intérêt général, déclarent-elles dans une enquête d’Admical, l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial. En second lieu, elles entendent, à travers ce geste, exprimer les valeurs de l’entreprise. C’est, en troisième position, une opportunité pour construire des relations avec les acteurs du territoire. Vient ensuite le désir de valoriser l’image et la réputation de l’entreprise. Enfin, c’est l’occasion, pour elles, de développer de nouvelles relations avec leurs partenaires.

Les TPE et PME, qui forment la grande majorité du tissu entrepreneurial français, forment aussi le gros des troupes de mécènes. Elles représentent 96 % des entreprises donatrices ! Entre 2010 et 2017, ces entreprises mécènes sont passées de 28 500 à plus de 80 000, avec un montant grimpant à 2 milliards d’euros, selon les estimations d’Admical. Cela ne représente néanmoins que 22 % des sommes totales engagées par les entreprises dans le mécénat, les grandes entreprises se taillant la part du lion.

En moyenne, une TPE fait un don de 1 670 euros, une PME de 11 781 euros et une ETI de 129 077 euros. En comparaison, le don moyen d’une grande entreprise s’élève à plus de 4 millions d’euros.

2 – Que changent les nouvelles règles fiscales pour les PME ?

Les entreprises qui acceptent de faire des dons, bénéficient d’une réduction fiscale sur les bénéfices. La réduction d’impôt est à hauteur de 60 % des dons, dans une limite de 5 ‰ du chiffre d’affaires HT de l’entreprise. Comme les TPE-PME atteignent rapidement ce plafond, un nouveau plafond à 10 000 € vient d’être instauré. Cette réforme permet ainsi de lever le plafond de 5 pour mille pour les entreprises qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 2 millions d’euros.

Prenons l’exemple d’une entreprise dont le chiffre d’affaires s’élève à 1 million d’euros. Jusqu’alors, elle était limitée à un don de 5 000 euros (5 pour mille de 1 million) et bénéficiait d’une réduction d’impôt de 3 000 euros (60 % de ce montant). Désormais, elle peut verser à titre de mécénat jusqu’à 10 000 euros par an… et bénéficier ainsi d’une réduction d’impôt maximale de 6 000 euros (60 % de son don). Cette modification de l’article 238 bis du Code général des impôts s’applique à tous les exercices clos à compter du 31 décembre 2019.

Dans le même temps, le gouvernement va réduire les avantages pour les plus grandes entreprises, afin d’éviter que le mécénat ne devienne un simple mécanisme d’optimisation fiscale. Le secrétaire d’État Gabriel Attal précise que la défiscalisation de la part versée par les entreprises dans le cadre du mécénat « ne concernera, en 2020, que les entreprises qui effectuent plus de 2 millions d’euros de dons par an, pour qui cette défiscalisation passera de 60 à 40 %. Ce qui n’en représente qu’un très petit nombre. »

3 – Quelles conditions encadrent le mécénat ?

Petit rappel, pour les entreprises qui souhaiteraient se lancer : le mécénat se définit comme « le soutien matériel apporté, sans contrepartie directe de la part du bénéficiaire, à une œuvre ou à une personne pour l’exercice d’activités présentant un intérêt général », selon l’arrêté du 6 janvier 1989 relatif à la terminologie économique et financière. Avec les mesures incitatives apportées par la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, le don ouvre droit, pour les donateurs, à certains avantages fiscaux, si le bénéficiaire est éligible au mécénat déductible. Le mécénat se distingue donc clairement du parrainage, équivalent du « sponsoring ».

• Le mécénat est tourné vers l'intérêt général

Le bénéficiaire doit être un organisme d’intérêt général : son activité est non lucrative et non concurrentielle. L’assujettissement de son activité à la TVA l’exclut a priori de l’éligibilité au mécénat (sauf en cas d’activité « sectorisée » : l’activité non assujettie à la TVA peut être compatible avec des actions de mécénat). Les SA, Scop, SARL, organismes à but lucratif, ne sont néanmoins pas éligibles au mécénat. Quant aux personnes physiques - les artistes par exemple, elles ne peuvent bénéficier du mécénat direct des entreprises ou des particuliers. Elles ne peuvent recevoir que des subventions de fondations d’entreprises ou de fondations reconnues d’utilité publique.

L’œuvre doit être d’intérêt général. Autrement dit, elle doit revêtir un caractère philanthropique, social, humanitaire, éducatif, scientifique, sportif, familial, culturel ou participant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l’environnement naturel ou à la diffusion de la culture, langue ou connaissances scientifiques françaises. Ce qui laisse tout de même un très large éventail de choix aux entreprises mécènes !

4 – Comment s’assurer qu’un organisme relève du mécénat déductible ?

Le système est purement déclaratif : les organismes recevant des dons apprécient eux-mêmes s’ils remplissent ou non les conditions pour bénéficier de dons. La délivrance de « reçus dons aux œuvres » relève donc de leur seule responsabilité.
En cas de contrôle fiscal, les services fiscaux détermineront si le reçu a été émis à bon droit. Et si un organisme a délivré un reçu à tort ? Il encourt une amende égale à 25 % du montant du don. Le contribuable de bonne foi ne verra pas sa réduction d’impôt remise en cause.

Pour une plus grande sécurité juridique, un organisme peut cependant demander à la Direction des services fiscaux du département de son siège social, s’il relève bien des catégories bénéficiant du mécénat (instruction fiscale 13 L-5-04 n°164 du 19 octobre 2004 et BOI 5 B-27-05, n°168 du 13 octobre 2005).

• Les festivals de séries éligibles

Autre nouvelle disposition de loi de finances 2019 relative au mécénat : les festivals de séries, et les organismes qui les organisent, sont désormais éligibles aux dispositifs fiscaux en faveur du mécénat des particuliers et des entreprises (articles 200 et 238 bis du code général des impôts). Ils peuvent bénéficier de ce type de financement au même titre que les festivals cinématographiques.

• Le mécénat en Europe, sous conditions

La loi autorise le mécénat vers d’autres pays européens. À certaines conditions, encadrées par la loi de finances rectificative pour 2009, article 35. Celle-ci a étendu, sous certaines conditions, le bénéfice du mécénat à des organismes agréés, dont le siège est situé dans un État membre de la Communauté européenne ou dans un État partie à l’Espace économique européen, ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d’assistance administrative, en vue de lutter contre la fraude ou l’évasion fiscale.

5 – Quels sont les organismes culturels éligibles ?

Début 2018, le Mucem a été le premier musée national à solliciter le mécénat d'un club d'entrepreneurs, en l'occurrence le Club Immobilier Marseille Provence à hauteur de 300 000 euros sur trois ans — Photo : CC0

La culture est le deuxième domaine soutenu par le mécénat d'entreprise, après le social. Elle concentre un quart des dons des entreprises.

Voici une liste relativement exhaustive des organismes qui ouvrent droit à une réduction d’impôt :
- L’État, les collectivités locales et leurs établissements (article 28 de l'instruction fiscale 4-C 5 04 de juillet 2004) ;
- Les organismes d’intérêt général (en particulier les associations loi 1901 dont la gestion est désintéressée et l’activité non lucrative et non concurrentielle, et dont l’activité ne profite pas à un cercle restreint de personnes) ;
- Les fondations et associations reconnues d’utilité publique, et les fondations abritées ;
- Les fondations d'entreprise ;
- Les fonds de dotation ;
- Les musées de France (loi 2002-5 du 4 janvier 2002 relative aux musées de France), comme la Cité du Vin à Bordeaux ;
- La plupart des monuments historiques privés (travaux de restauration sur les parties protégées ou travaux d’accessibilité aux personnes handicapées) ;
- Les organismes dont la gestion est désintéressée et qui ont pour activité principale la diffusion du spectacle vivant ou l’organisation d’expositions d’art contemporain (à l’exclusion des organismes constitués en sociétés, exception faite des sociétés de capitaux dont le capital est entièrement public), à l'image de l'Opéra de Nice ;
- Certains établissements de recherche ou d’enseignement publics ou privés agréés d’intérêt général.

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