Budget 2020 : ces sujets qui fâchent le patronat
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Budget 2020 : ces sujets qui fâchent le patronat

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Le gouvernement a présenté, le 27 septembre, son projet de budget 2020. Officiellement, la prochaine loi de finances prévoit près d'un milliard d'euros de baisse des prélèvements obligatoires pour les entreprises. Pourtant, les organisations patronales (Medef, CPME et FFB en tête) n'ont pas tardé à monter au créneau pour dénoncer une hausse cachée de leur fiscalité. Pourquoi ces craintes ? Explications.

La hausse attendue de la fiscalité sur les carburants est l'une des principales critiques adressées par les organisations patronales au projet de loi de finances 2020, présenté par le gouvernement le 27 septembre — Photo : David Roumanet - Pixabay

Les entreprises seraient-elles les futures perdantes de « l’acte 2 » du quinquennat d’Emmanuel Macron ? Pour ce premier projet de budget post-crise des Gilets jaunes - le précédent avait été amendé en catastrophe pour apporter des réponses immédiates aux manifestants, les organisations patronales semblent en tout cas sentir le vent tourner, si l’on en juge par la longueur de la liste de leurs griefs.

Au centre de leurs préoccupations : les craintes d’une augmentation indirecte de la fiscalité. De fait, ce projet de loi de finances met en œuvre l’une des promesses du président de la République, à l’issue du Grand débat national : la suppression de plusieurs des niches fiscales bénéficiant aux sociétés. Pourtant, le gouvernement n’en promet pas moins, l’an prochain, une baisse de près d’1 milliard d’euros pour les entreprises. Ce qui porterait la réduction de leurs prélèvements obligatoires à -9,4 Mds € depuis 2017.

Pas de quoi impressionner le Medef qui crie à « l’affichage » et s’attend, au contraire, à « une hausse globale de la fiscalité ». Même son de cloche à la CPME : la confédération « regrette fortement que le projet de loi de finances 2020 prévoie un certain nombre de mesures qui vont renchérir les prélèvements sur les entreprises ». Et le président de la Fédération française du bâtiment (FFB) Jacques Chanut enfonce le clou, dans un communiqué : « Ce troisième budget consécutif à la baisse pour la construction menace l’un des seuls secteurs qui tire la croissance en France. » Mais qu’est-ce qui inquiète tant le patronat dans ce budget 2020 ?

La fiscalité énergétique repart à la hausse

Le dossier est sensible et il fait l’unanimité contre lui. Medef, CPME, mais aussi FFB et FNTR (Fédération nationale des transports routiers) : tous dénoncent l’évolution annoncée de la fiscalité sur les carburants. Deux mesures en particulier sont visées par ces organisations patronales.

• Fin de l’avantage fiscal sur le gazole non-routier

La première porte sur le gazole non-routier : le gouvernement remet sur la table son projet de suppression des tarifs réduits de TICPE (la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) appliqués à ce carburant utilisé par les professionnels. Dans la première mouture du budget, cet avantage fiscal devait disparaître progressivement entre le 1er juillet 2020 et le 1er janvier 2022 - tout en étant maintenu pour les agriculteurs et les entreprises ferroviaires.

La mesure n’est pas nouvelle : elle avait déjà failli voir le jour l’an dernier, avant d’être balayée par la tempête Gilets jaune et suspendue pour six mois. Il n’en reste pas moins qu’elle ne passait toujours pas auprès du patronat : « sous couvert de taxation écologique, le gazole non-routier sera davantage taxé et la TICPE augmentera », déplore la CPME, tandis que la FFB s’interroge sur cette décision « qui n’a rien d’écologique en l’absence de matériels "verts" alternatifs ».

Finalement, le 2 octobre, le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin est revenu sur le calendrier de cette réforme et a promis des mesures compensatoires, rapidement saluées par la Fédération nationale des travaux publics.

• Baisse du remboursement de TICPE pour les transporteurs ?

Autre sujet de fiscalité énergétique sur lequel cale le patronat : la diminution du remboursement de TICPE à hauteur de 2 centimes par litre, dont bénéficient les transporteurs routiers. Un « rabot » dénoncé depuis plusieurs semaines par le secteur : il craint d’y laisser ses marges.

Mais si le dispositif est bien prévu dans le projet de loi de finances, il est loin d’être inscrit dans le marbre : la FNTR rappelle ainsi que le secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari s’est engagé, le 26 septembre, « à travailler par amendements […] pour trouver une solution qui ne pénalisent pas [la] profession ». Les représentants patronaux promettent donc de suivre avec une « extrême vigilance » les débats parlementaires à venir.

La déduction forfaitaire spécifique revue à la baisse

En matière de coût du travail, c’est la réduction de la déduction forfaitaire spécifique (DFS) qui met toutes les organisations d’accord. Cet abattement de cotisations patronales, propre à certaines professions, doit être rogné, pour un montant de 400 millions d’euros. De quoi « renforcer la concurrence du travail illégal en augmentant les charges sociales », s’inquiète la Fédération du bâtiment. Le BTP est le principal bénéficiaire de cette niche fiscale.

Le crédit d’impôt pour la transition énergétique transformé

« Redéploiement à la baisse » pour la CPME, « tour de vis pour la FFB » : la réforme du CITE ne convainc pas le patronat. Ce crédit d’impôt, dédié à la rénovation énergétique des logements, doit devenir une prime forfaitaire d’ici à 2021. Elle sera attribuée notamment en fonction du revenu des ménages à l’origine des travaux.

Des raisons de se réjouir ?

« Le gouvernement prend le risque de faire caler le moteur de la croissance », en « [renonçant] à réduire sa dépense publique, son endettement, et à soutenir la compétitivité et l’emploi », conclut le Medef, à la lecture de ce projet de budget 2020.

• Baisse de l’impôt sur les sociétés confirmée

Pourtant, malgré les nombreuses récriminations patronales, le texte confirme la « trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés ». Son taux normal est « ramené à 28 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020, à 26,5 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2021 et enfin à 25 % à compter du 1er janvier 2022 ». Un régime différencié sera toutefois appliqué pour les entreprises réalisant plus de 250 M€ de chiffre d’affaires.

• « Prime Macron » reconduite sous condition

Enfin, la prime exceptionnelle défiscalisée, mise en place pour répondre aux Gilets jaunes, est reconduite l’année prochaine. Elle a déjà été utilisée dans « plus de 200 000 établissements » au bénéfice d’environ 5 millions de salariés, pour un montant moyen de 450 euros, précise l’exécutif.

Une nouveauté toutefois : cette « prime Macron » sera conditionnée « à l’existence ou la mise en place par l’entreprise d’un accord d’intéressement ». Un préalable qui « rendra son éventuelle mise en œuvre beaucoup plus complexe », prévient déjà la CPME.

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