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Blablacar : « Ce n'est pas plus dur d'entreprendre en France, sauf qu'ici on se plaint beaucoup plus! »
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Blablacar : « Ce n'est pas plus dur d'entreprendre en France, sauf qu'ici on se plaint beaucoup plus! »

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Frédéric Mazzella, fondateur et PDG de Blablacar (300 salariés, CA non communiqué), participait pour la deuxième fois consécutive au West Web Festival, un événement réunissant des pointures du numérique à Carhaix (29) et qui a accueilli plus de 3.000 participants en marge des Vieilles Charrues. L'occasion de revenir sur les développements récents de Blablacar, son service de co-voiturage présent dans une vingtaine de pays et qui comptait 10 millions d'utilisateurs en 2014, mais aussi de recueillir son avis sur l'entrepreneuriat en France.
— Photo : Le Journal des Entreprises

Pourquoi avoir accepté de participer au West Web Festival pour la deuxième année consécutive?
Parce qu'il y règne un esprit très décontracté qui permet de dire les choses différemment de de ce que l'on dirait dans des conférences à Paris ou ailleurs dans le monde. L'organisation est de plus en plus professionnelle et son contenu est vraiment intéressant. Et puis, cerise sur le gâteau : après les conférences, on peut assister aux concerts!

L'année dernière à la même époque, vous veniez d'effectuer une levée de fonds de 100M$. Que s'est-il passé de marquant depuis pour Blablacar?
On avait dit qu'on ouvrirait un certain nombre de pays et on l'a fait. On s'est lancé en Turquie en septembre, on est en Inde depuis janvier, et en Roumanie, Croatie, Serbie et Hongrie depuis mars. Plus récemment, nous venons de racheter notre concurrent allemand afin de poursuivre nos objectifs de croissance.

Entre-temps vous avez aussi lancé de nouveaux partenariats avec Vinci et Axa. Pouvez-vous nous en parler?
Avec Vinci, il s'agit d'une formule qui permet que les frais de gestion de télépéage soient gratuits à partir de deux co-voiturages par mois sur le réseau Vinci, soit 24€ d'économie par an. Avec Axa, il s'agit d'un partenariat à vocation très internationale, grâce auquel on renforce la qualité de notre service par une assurance complémentaire qui vient s'ajouter aux assurances existantes.

Les assurances traditionnelles ne couvraient-elles pas déjà le co-voiturage?
Si, car il s'agit de partage de frais. Ceci dit, lorsqu'on prête le volant à quelqu'un, la franchise en cas d'accident est parfois plus élevée. Dans ce cas de figure, par exemple, on fait du rachat de franchise. En somme, on vient rajouter une couche assurantielle qui étoffe et renforce la qualité de notre service.

Pourquoi avoir fait ce choix si les assurances traditionnelles couvraient déjà ce type de situation?
On l'a fait principalement pour la marché anglais. En France, et il faut le rappeler, faire du co-voiturage ne change pas une seule ligne du contrat d'assurance car le conducteur n'est pas en situation de bénéfice, comme ça peut être le cas pour des applications du style d'Uber pop. En Angleterre, c'est aussi couvert mais il y a un gros problème de perception : les gens pensaient qu'accepter de l'argent pour partager les frais allait changer leur contrat, ce qui n'est absolument pas le cas. Le problème, c'est qu'on arrivait pas à convaincre les gens donc on a pris le problème autrement en créant ce partenariat avec Axa. Tout cela nous donne de la visibilité commune, et nous apporte de la crédibilité mutuelle. Pour Axa, c'est une manière d'évoluer vers la sharing economy. Pour nous, c'est une bonne manière d'aller plus loin dans la qualité et la fiabilité de notre service, ainsi que dans la perception de son image.

La polémique autour d'Uber peut-elle avoir un impact positif pour Blablacar?
Pour l'instant on n'en a pas vu, mais il faut aussi dire que c'est difficile à quantifier, surtout à cette période. Nos statistiques ne cessent de monter, notamment grâce à un bouche à oreille très puissant et à une communauté très active. Elles augmentent plus ou moins rapidement, mais en permanence et surtout en période estivale où on a en moyenne 40% de fréquentation supplémentaire. Par contre ça a permis de bien faire la distinction entre ce qui est du partage de frais et ce qui ne l'est pas, et de montrer que le covoiturage n'a pas de dimension professionnelle et ne concerne que des particuliers.

De nombreuses start-ups participent au West Web Festival. Quel est votre regard sur ce dynamisme Breton?
Je trouve ça génial, et ce n'est pas qu'en Bretagne. L'époque fait qu'on voit d'anciens modèles qui sont au ralenti, voire parfois stoppés dans leurs innovations. Du coup, il y a tout un mouvement pour renouveller tout ça. On a été très créatifs il y a 30 ou 40 ans : on a réussi à créer de grands groupes absolument superbes, qui ont peut-être pour beaucoup été poussés par l'Etat. Je ne sais pas ce qui s'est passé ces vingt dernières années, mais on en a aujourd'hui beaucoup moins. Une chose est sûre, cependant, c'est que le système de création de valeur est ancien en France.

En tant que jeune entrepreneur, pensez-vous qu'il est plus dur de créer son entreprise en France plutôt qu'ailleurs?
C'est dur de créer une boîte, point. Ce n'est pas plus dur en France qu'ailleurs sauf qu'ici, on a davantage tendance à se plaindre beaucoup plus que les autres, ce qui fait qu'on a l'impression que c'est plus dur.

La French Tech peut-elle être un plus pour l'écosystème numérique français?
C'est un programme de mise en avant qui peut être motivant. Montrer des boîtes qui réussissent, ça nous enlèvera les excuses du genre "c'est trop dur en France", car c'est possible d'entreprendre ici!

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