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Arenh : les industriels accusent l’État de souffler sur les braises des prix de l’électricité
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Arenh : les industriels accusent l’État de souffler sur les braises des prix de l’électricité

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Et si la flambée des prix de l’électricité repartait de plus belle ? C’est la crainte vivement exprimée par les industriels énergivores. En cause : la baisse, tardivement confirmée, du plafond de l’Arenh, ce mécanisme qui permet d’obtenir de l'électricité à bas coût. Explications.

À travers l’Arenh, la loi oblige EDF à vendre à prix cassé de l’électricité d’origine nucléaire. La baisse de son plafond en 2023 inquiète au plus haut point les industriels — Photo : Thieury

Une décision qui (re)met le feu aux poudres, et aux coûts de l’électricité. L’Union des industries utilisatrices d’énergie (Uniden) a vivement réagi, dans la nuit du 1er au 2 décembre, à la dernière délibération de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), parue quelques heures plus tôt. Un texte accusé de "jouer à la roulette" avec l’avenir des usines françaises, en alimentant la flambée de leurs factures sur les prochains mois.

Une baisse du quota Arenh fustigée par l’industrie

Le texte incriminé porte sur l’accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh). Un mécanisme qui impose à EDF, depuis 2010, de vendre à ses concurrents un quota d’électricité nucléaire à prix cassé. En janvier 2022, le gouvernement avait choisi de jouer sur ce levier en relevant le plafond de l'Arenh, afin de contenir la hausse des prix de l’électricité. Avant d'indiquer, fin octobre, mettre fin à cet assouplissement pour 2023.

Résultat, l’Arenh repassera à partir du 1er janvier à 100 térawattheures (TWh), revendu au prix de 42 euros le mégawattheure (MWh), au lieu de 120 TWh et 46,20 € cette année. Un retour en arrière que l'exécutif a justifié notamment par le volume actuel de production d’EDF, au plus bas en raison des problèmes de maintenance rencontrés par l’électricien sur ses réacteurs nucléaires (20 à l’arrêt aujourd’hui, sur 56). Il faut dire aussi que le dispositif de l'Arenh s'avère très coûteux pour le groupe en cours de nationalisation.

Ce resserrement des vannes avait déjà fait grincer des dents les représentants des industries textile et agroalimentaire. Mais le texte publié par la CRE, le 1er décembre, n’a fait que remettre de l’huile sur le feu. La Commission y révèle en effet avoir reçu, une demande d’Arenh de la part des fournisseurs d’électricité largement supérieure au plafond légal : 148,3 TWh. Ce dépassement du quota est habituel depuis 2019, mais, fait nouveau, le volume réclamé d’une année sur l’autre est en baisse pour la première fois (-7 % par rapport à 2021).

Des conséquences en cascade pour toutes les entreprises

Peu importe, ces chiffres ont fait bondir l’Uniden, représentante des secteurs les plus énergivores du pays (métallurgie, aciérie, verrerie, transports…) : "L’industrie découvre donc qu’elle devra s’approvisionner d’autant sur les marchés de gros, dans les conditions très défavorables que l’on connaît, soit un impact direct de […] +3,5 milliards d’euros", s’indigne l’organisation dans son communiqué. Ajouté à la flambée des cours depuis l’année dernière, elle évalue donc ce "choc de compétitivité global" entre 5 et 10 milliards d'euros. Autrement dit, "une nouvelle envolée des factures des industriels, dont certaines pourront doubler". D’autant plus que les aides de l’État ne permettraient d’amortir "qu’entre 30 et 50 % de cette hausse […] sans compter les plafonds applicables à chaque entreprise".

L’Uniden fustige également le calendrier très tardif de cette décision annuelle sur l'Arenh et l'"absence de visibilité" qui en découle. Cette "incertitude […] sur les conditions de [leur] approvisionnement électrique l’année suivante" conduit les entreprises, "qui ne sont par nature ni des traders ni des spéculateurs, à prendre des positions risquées" pour sécuriser leur approvisionnement en énergie.

Mais les effets pervers de cette annonce de dernière minute de la CRE ne s’arrêtent pas aux industriels énergivores, prévient l’organisation. Car, rationnées sur l’Arenh, les usines risquent "de se retourner massivement vers le marché de gros dans les prochains jours"… et donc d’entretenir la spirale inflationniste des cours, au détriment de toute l’économie.

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