Yvan Borgne (Laïta) : « Le Brexit rajoute des coûts et de la complexité »
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Yvan Borgne directeur export de Laïta. Yvan Borgne (Laïta) : « Le Brexit rajoute des coûts et de la complexité »

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Yvan Borgne, directeur export de Laïta (2 960 salariés), la coopérative laitière de l’Ouest, a vu le travail de son équipe se compliquer au 1er janvier avec le Brexit et l’apparition de nouvelles lourdeurs administratives. L’accord trouvé qui n’impose pas de droits de douanes a cependant limité les dégâts.

— Photo : © Laïta

Que pensez-vous de l’accord du Brexit ?

Yvan Borgne : C’est un moindre mal. Le marché anglais est l’un de nos principaux marchés à l’export. Nous avons également une filiale, Eurilait, située près de Bristol, qui emploie une centaine de salariés. Nous y avons un atelier de transformation et une équipe commerciale qui cible aussi bien la GMS que l’industrie.

Je n’ai cependant jamais vraiment douté que le Royaume-Uni et l’Union européenne trouvent un accord. Aucune des deux parties ne pouvait s’en passer. L’Angleterre importe 50 % de ses besoins, dont 40 % viennent de l’UE. Et les chiffres sont encore plus hauts concernant les produits laitiers. Avec le contexte sanitaire actuel, il n’était pas concevable de rajouter une crise à la crise.

Quelles sont les conséquences pour Laïta en France ?

Y.B. : Point essentiel pour nous : les droits de douane. Il n’y en a pas et c’est important. Néanmoins, le Brexit nous rajoute beaucoup de coûts et de complexité. Il y a désormais une lourdeur administrative avec des déclarations douanières à respecter. En moyenne, nous avons 6 à 8 camions par semaine de produits transformés (fromages) qui transitent entre la France et le Royaume-Uni. Nous devons désormais anticiper davantage les commandes. Plus question de les ajuster au dernier moment. Au 1er avril, il y aura également des certificats sanitaires. Nous nous intéressons à la question de la frontière intelligente qui doit permettre de garder un peu de fluidité pour ne pas perdre trop de temps.

Est-ce aussi plus compliqué pour votre filiale Eurilait ?

Y.B. : En France, nous faisons déjà de l’export en dehors de l’UE donc nous savons faire. Le Royaume-Uni est passé dans une catégorie d’export un peu à part. Mais les équipes d’Eurilait ont dû faire l’apprentissage des règles d’import !

Comment se sont passés les changements au 1er janvier ?

Y.B. : Les premiers camions ne sont partis que le 6 janvier à cause de la fermeture des frontières avant Noël due à la nouvelle forme du coronavirus qui frappe le Royaume-Uni. Nous avions donc décidé d’interrompre le transit car nous avons eu six camions bloqués. Le Brexit est de toute façon un projet sur lequel nous avons travaillé depuis longtemps. Nous étions près dès fin 2019 en cas de "no deal". Tout cela s’est fait par étapes. L’une des difficultés pour notre équipe export est d’arriver à fournir les papiers nécessaires à J + 1, alors que pour le grand export, nous avons environ 7 jours, le temps du transport en bateau, pour les faire parvenir.

Êtes-vous inquiet pour votre marché en Europe face à la concurrence ?

Y.B. : Le respect des règles et des normes européennes était un autre point essentiel pour nous. L’UE est restée ferme sur ce point donc il n’y a pas d’inquiétude. Si les Britanniques veulent l’accès au marché commun, il faudra qu’ils respectent ses règles, c’est normal. Ils ne peuvent pas avoir le beurre et l’argent du beurre.

Quel est votre sentiment par rapport à ce Brexit ?

Y.B. : Il apporte une rigidité de la chaîne logistique, une complexité. On sait s’adapter mais personne n’avait besoin de ça !

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