Finistère
Travaux publics : « Une embellie depuis 2017 dans le Finistère »
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Claude Boussard président Travaux publics : « Une embellie depuis 2017 dans le Finistère »

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Après deux années de crise en 2015 et 2016, le secteur des travaux publics repart depuis 2017. Ce qui n’empêche pas les chefs d’entreprise d’avoir quelques craintes liées aux coûts de production en augmentation, au manque de personnel et aux élections municipales qui arrivent. Le point avec le président, Claude Boussard, et le vice-président, Daniel Cotten, de la Fédération des travaux publics du Finistère (TP29).

Daniel Cotten, vice-président de TP 29 depuis un an et directeur de centre Marc SA à Brest, et Claude Boussard, président de la fédération de travaux publics du Finistère (TP29) depuis 5 ans et directeur de l'agence Colas à Brest. — Photo : © Isabelle Jaffré

Le Journal des Entreprises : Quelle est la conjoncture pour les travaux publics en Finistère ?

Claude Boussard : Il y a deux ans, nous étions dans une période de crise. 2015 et 2016 sont les deux pires années que la profession ait connues. On peut dire qu’aujourd’hui, on connaît une amélioration du volume d’activité. Une embellie qui a démarré en 2017. 2018 sera une année de stabilité. La visibilité est assez faible, à 3,7 mois en moyenne en Bretagne.

Y a-t-il une spécificité finistérienne dans les travaux publics ?

C.B. : Les travaux sont plus variés qu’ailleurs. Le polder de Brest est le plus gros chantier du moment. Nous avons aussi beaucoup de génie civil, de travaux ferroviaires, maritimes et fluviaux. 30 % de notre activité est lié à la voirie au sens large. Entre 15 et 18 % aux travaux d’assainissement et aux canalisations ; 15 à 17 % aux réseaux électriques et gaziers ; 10 % au terrassement. Le reste est dédié à des travaux divers. Les TP dépendent à 60 % de la commande publique : les gros donneurs d’ordre sont les collectivités, mais aussi les syndicats d’eau et, à Brest, la Marine.

Et cela pose des problèmes ?

Daniel Cotten : Il y a des cycles qui correspondent aux cycles électoraux. Les prochaines élections municipales auront lieu en 2020. Nous ne sommes pas inquiets pour 2019, mais pour 2020 et 2021. Les années électorales ne sont pas propices aux grands investissements. Ce que l’on demande aux maîtres d’ouvrage, c’est de mieux lisser les travaux. Sinon, tout le monde se précipite sur les appels d’offres, il y a un appel d’air, de la forte concurrence puis plus rien à se mettre sous la dent ensuite, comme en 2014-2015.

Le regroupement des communes vous aide-t-il ?

D.C. : Il y a une incertitude dans le Finistère, qui a été peu touchée par le regroupement de communes. La préfecture nous dit qu’il y aura sans doute une seconde vague. Ce qui peut entraîner une perte de temps.

« Dans le Finistère, les entreprises de travaux publics recherchent entre 200 et 300 personnes. Cette pénurie de compétences créé des tensions sur le marché. »

C.B. : A contrario, la constitution d’EPCI plus fortes, avec des services techniques plus importants, peut entraîner une continuité dans la programmation des travaux. C’est un point positif.

Le président national de votre fédération a écrit au ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin. Pourquoi ?

C.B. : Nous avons un problème global de coût de production : +5 % en un an sur les matériaux, +7,3 % en un an pour l’énergie. Dans le même temps, dans le cadre du projet de loi de finances, le gouvernement prévoit de mettre fin au taux réduit de TICPE (la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) sur le gasoil non-routier. Or, les TP sont en plein dans la cible, vu le nombre d’engins de chantier. Nous demandons que les TP soient une exception pour que nos entreprises puissent garder leur dynamique.

La profession fait également face à un problème de recrutement…

C.B. : Sur toutes les fonctions, que ce soit ouvrier qualifié, chef d’équipe, chef de chantier, conducteur de travaux, du CAP à l’ingénieur, les entreprises recherchent du monde : entre 200 et 300 personnes dans le Finistère. Il y a une pénurie de compétences qui créé des tensions sur le marché. Les établissements qui forment dans nos filières font le plein, mais les effectifs qui sortent sont insuffisants pour répondre à la demande des sociétés actuellement. Il n’y a pas assez de monde, y compris en intérim, car, avec la dernière crise, les gens sont passés à d’autres métiers.

D.C : L’autre inquiétude, c’est que l’on forme aujourd’hui, alors qu’on anticipe un ralentissement en 2020 et 2021. On risque de voir des courbes en effet ciseaux.

C.B. : Nous avons aussi besoin de travailler sur l’attractivité de nos métiers, car souvent nous ne sommes pas visibles ou les jeunes ont une mauvaise image des TP.

Les TP sont-ils concernés par la transformation numérique ?

C.B. : Bien sûr ! On fait de l’innovation constamment. Le BIM (Building Information Modeling ou modélisation des données du bâtiment, ndlr) commence à arriver. Il s’agit, entre autres, de maquettes numériques en trois dimensions. C’est de l’innovation dans la conception, avec une méthode de travail partagée par le maître d’ouvrage, le maître d’œuvre, qui permet de visualiser l’ensemble du chantier par tous ces intervenants

Fin août, on a vu s’effondrer un pont à Gênes, en Italie. Est-ce que le Finistère pourrait être concerné par un tel drame ?

C.B. : Je ne pense pas. Les ponts de l’Iroise, de Terenez et de Cornouaille, sont relativement récents et très contrôlés. Les seuls problèmes que j’ai pu voir, c’était après des crues, des inondations et c’était très surveillé.

D.C. : Plus largement, c’est la question du renouvellement du patrimoine qui se pose. Les routes, les canalisations ne sont pas assez entretenues.

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