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Sylvain Huchette : l’entrepreneur chercheur
Portrait Finistère # Agriculture

Sylvain Huchette : l’entrepreneur chercheur

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Ingénieur agronome et docteur en écologie marine, Sylvain Huchette est tombé dans l’élevage d’ormeaux par hasard, grâce à un séjour en Australie. De retour en France, il a créé France Haliotis avec un associé en 2004. Depuis, l’entreprise a connu des hauts et des bas, mais est passée, depuis deux ans, « du côté vert du bilan ». Portrait d’un entrepreneur passionné par son produit et son environnement, la mer.

Photo : © Isabelle Jaffré - Le Journal des entreprises

Si vous cherchez Sylvain Huchette, peu de chance que vous le trouviez en costume-cravate derrière un bureau. Pas son genre. En ce jour radieux de mai, c’est du côté des bassins de nurserie que l’on retrouve le gérant de France Haliotis à Plouguerneau (6 salariés, 400K€ de CA). « Je finis de nettoyer ce bassin et je suis à vous », s’excuse-t-il.

En t-shirt et tablier Guy Cotten, il s’affaire auprès des bébés ormeaux. « Ceux-là ont déjà un an. D’ici quelques mois, on les enverra en mer pour trois ans, à l’entrée de l’Aber Wrac'h. On est sur un cycle de production de quatre ans », explique-t-il en remettant les plaques abritant les mollusques en place.

Docteur ès ormeau

Le patron connaît son produit. Et pour cause, c’était son sujet de doctorat. « J’ai été contaminé par l’ormeau », sourit-il. En école d’ingénieur en agriculture à Lille, il part faire un stage en Australie. C’est là que la rencontre avec un professeur spécialiste de l’ormeau réoriente ses études vers l’aquaculture… et sa vie. « Puis j’ai obtenu une bourse de l’État australien pour un doctorat en écologie marine. »

De retour en France, il cherche un temps un poste dans la recherche. « Personne ne s’occupait des ormeaux en France. J’avais l’envie d’entreprendre, un certain savoir-faire grâce à mes recherches, avec des découvertes intéressantes sur leur reproduction notamment. » Il se lance donc, en août 2004, avec Guirec Rollando comme associé, dans la création de France Haliotis. Leur business plan ? Produire des naissains d’ormeaux qu’ils revendraient ensuite aux quelques éleveurs d’ormeaux et à des ostréiculteurs présents sur le territoire. « Quatorze ans plus tard, tout a changé !, s’amuse presque le dirigeant. Il y aujourd’hui encore moins d’éleveurs qu’à l’époque. On a donc changé d’optique et on est parti sur de l’élevage. Désormais, on vend nos ormeaux aux chefs des restaurants. »

Photo : © Isabelle Jaffré - Le Journal des entreprises

Collaborations scientifiques

Mais qui dit élevage, dit cycle long, avec les risques que cela comporte. « On a passé des années difficiles », avoue Sylvain Huchette. La pire ? « L’hiver 2013-2014 », dit-il sans hésiter. Un hiver de tempêtes successives sur la pointe bretonne qui anéantit une production qui s’annonçait très bonne. « On était en pleine accélération de la production. Je me suis posé beaucoup de questions. » L’entrepreneur décide de s’accrocher. « On a reconstruit quelque chose de plus sain, plus solide. On a supprimé tout ce qui était fragile sur l’élevage comme les cages en mer. On s’est aussi débarrassé de toute ce qui nous prenait trop de temps. » Efforts payants : « depuis deux ans, on est passé dans le côté vert du bilan ! », souffle-t-il.

Aujourd’hui, Sylvain Huchette veut prendre son temps pour développer son entreprise. On ne va pas plus vite que la Nature : « on dépend de la ressource », explique le patron, toujours scientifique dans l’âme. France Haliotis travaille d’ailleurs avec de nombreux organismes de recherche, d’Ifremer à la station biologique de Roscoff : sur un plan de gestion des algues, sur l’acidification des océans, etc. Le patron aimerait aussi voir se développer la filière de l’ormeau. « Pour l’instant, on est un peu seul avec un collègue à Groix. Des jeunes ont des projets mais cela reste compliqué malheureusement. »

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