Finistère
Fil & Fab : "Nous ne pensions vraiment pas que nous allions devenir des industriels"
Interview Finistère # Industrie # Innovation

Yann Louboutin co-créateur de Fil & Fab "Nous ne pensions vraiment pas que nous allions devenir des industriels"

La start-up Fil & Fab, spécialisée dans le recyclage de filets de pêche, a complètement revu sa stratégie après plusieurs rencontres marquantes. La jeune pousse se concentre désormais sur la création d’une filière de valorisation. Explications avec Yann Louboutin, l’un des cofondateurs de l’entreprise installée à Plougonvelin.

Yann Louboutin est l’un des trois associés à l’origine de la start-up Fil & Fab, spécialisée dans la valorisation de filets de pêche usagés — Photo : Samuel Grandchamp

Vous avez créé Fil & Fab en 2019 avec deux associés dans le but de créer des produits à partir de filets de pêche recyclés. Où en êtes-vous aujourd’hui ?

Nous nous sommes tous rencontrés en BTS design de produit, et l’idée de recycler les filets de pêche pour en faire des objets était le projet d’études de notre associé Théo Desprez. Au début, nous ne pensions vraiment pas que nous allions devenir des industriels, car nous raisonnions en designers qui créent des produits pour répondre à un besoin. Mais très rapidement s’est posée la question de la collecte, du stockage et du recyclage des filets de pêche. C’est à cette époque que nous avons rencontré Georges Canal, qui est spécialisé dans le coaching de start-up industrielles. Il nous a fait nous rendre compte que nous partions sur deux métiers bien distincts entre le recyclage et la création d’objets, et que notre priorité devait être de créer une véritable filière de valorisation pour produire des matières premières qui pourront ensuite être exploitées par d’autres entreprises. Aujourd’hui, nous avons noué des partenariats avec plusieurs ports du littoral français et des acteurs tels que Naturplast, Armor Lux, Rip Curl, l’horloger suisse Ulysse Nardin, ou encore le lunetier nantais Frédéric Beausoleil qui est entré au capital. Nous travaillons aussi sur le manche du couteau Le Glenn, de l’entreprise Ker, ou encore sur des dérives de planches de surf avec Tahe Outdoors (Ex-Bic Sport, NDLR).

À quels écueils vous êtes-vous heurtés depuis la création de Fil & Fab ?

D’une manière générale, le fait de perdre du temps en s’égarant sur un mauvais produit, un mauvais process ou une mauvaise information, et le fait que le cycle de vente soit très long dans notre domaine. Notre premier obstacle a été d’arriver sur un secteur que nous ne connaissions pas, avec des compétences en décalage avec le monde de l’industrie et de la pêche, et tout à créer en matière de recyclage des filets.

Comment avez-vous fait ?

Nous y sommes allés pas à pas, en commençant par contacter des acteurs locaux comme le port du Conquet, Guyot Environnement ou encore des laboratoires bretons pour analyser le contenu des bennes de collecte des filets. Nous avons ensuite testé les machines de différents fabricants européens afin d’assembler les briques d’une ligne de production. En parallèle, il a aussi fallu chercher des financements, ce qui n’est pas facile pour une start-up industrielle, car notre chiffre d’affaires est encore modeste (40 K€ en 2021, 100 K€ en 2022, NDLR) et que selon les interlocuteurs, on nous répond souvent qu’on vise trop haut ou trop bas. Nous avons tout de même obtenu 100 000 euros de prêt bancaire, 140 000 euros de subvention dans le cadre du FEAMP, et 150 000 euros de prêt participatif octroyé par France Active. Nous organisons actuellement notre première levée de fonds, avec l’aide de l’accélérateur Aaticka. Notre objectif est de lever une première tranche de 550 000 euros qui vont notamment nous permettre d’investir dans des machines et de chercher de nouveaux débouchés, notamment à l’international.

Finistère # Industrie # Innovation