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La Scobat veut devenir un groupe pluridisciplinaire
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La Scobat veut devenir un groupe pluridisciplinaire

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La Scobat, coopérative spécialisée dans le gros œuvre, développe un nouveau béton à base d’argile et de matériaux recyclés qu’elle utilisera pour une partie de l’extension qu’elle construit sur son site de Trégueux. L’entreprise cherche un terrain pour créer une plateforme de recyclage et produire son béton. Son ambition est d’acquérir des entreprises pour devenir pluridisciplinaire, tandis qu’elle commence une activité de promotion immobilière.

Hervé Maignen, DG de la Scobat, devant le chantier d’extension du bâtiment de la coopérative ouvrière basée à Trégueux — Photo : Matthieu Leman

La Scobat (68 salariés) a beau être née en 1978, elle ne s’en trouve pas moins dans une dynamique de jeune pousse. Avec, par exemple, une croissance remarquable, puisque la société coopérative spécialisée dans le gros œuvre a doublé son chiffre d’affaires entre 2018 et 2022, pour atteindre 20 millions d’euros. Et avec de nombreux projets qui ont pour objectif de lui permettre de grandir encore, d’assurer l’emploi de ses ouvriers avec le développement d’un nouveau béton plus respectueux de l’environnement, de créer un groupe pluridisciplinaire et de se diversifier dans un nouveau métier.

Le plus emblématique de ces projets, car il pourrait dépasser le cadre de l’entreprise et s’étendre au niveau de la profession, porte le nom de "Barbe". Cet acronyme pour Béton d’argile recyclé branché environnemental est développé depuis plusieurs années par la Scobat, en partenariat avec l’école d’ingénieur Insa de Rennes. "La réflexion est venue du béton de terre coulée", explique Hervé Maignen, directeur général de la PME. "L’argile est un matériau présent partout. Nous avons réfléchi à comment l’utiliser pour créer un matériau qui pourrait être utilisé dans les coffrages avec un coût et des délais raisonnables."

Une thèse et des brevets

Les recherches sur ce béton plus vertueux pour l’environnement aboutissent en juillet 2021 avec la construction d’un premier mur témoin puis avec un autre prototype en septembre 2022. Une thèse, avec l’ingénieur Jules Gombault, sera menée sur trois ans pour fiabiliser la formulation, qui mélange argile et matériaux recyclés comme du plâtre, du béton ou du sable.

Les premiers brevets et dossiers techniques devraient être déposés dès cette année, pour un produit qui enthousiasme le dirigeant. "Les matières sont disponibles facilement, il est utilisable avec le matériel existant, il est esthétique puisque la terre revêt différentes couleurs, il est très perméable à la vapeur d’eau et limite en conséquence l’humidité ambiante du local", commence Hervé Maignen. "Il ne nécessite pas de finition, de peinture, d’enduit, de plâtre : de l’huile de lin suffit. Son poids carbone est extrêmement faible, de l’ordre de 50 kilos de Co² par mètre cube, contre 150 kilos pour un béton bas carbone et 350 kilos pour le béton habituel. Enfin, si son coût devait être, au départ, 50 % plus cher que le béton habituel, avec l’industrialisation de sa fabrication, il descendra au même prix."

Une industrialisation qui est déjà prévue. "Nous recherchons un terrain entre Saint-Brieuc et Guingamp pour créer une plateforme de recyclage des matériaux de terrassement, démolition et excavation. Dès que nous aurons le terrain, nous déposerons le permis de construire", confie le directeur général. "Nous y produirons le Barbe. Il sera, dans un premier temps, produit sur le site des chantiers mais, à terme, il sera fabriqué sur ce site et livré par toupie."

Royalties et emplois

Le potentiel commercial du Barbe semble important, notamment pour ses coûts réduits dans les domaines environnemental et industriel et l’emploi de matières recyclées alors que la législation impose un recyclage de plus en plus étendu. Mais la Scobat y voit surtout le moyen de préserver l’emploi de ses coffreurs-brancheurs à l’heure où le béton a tendance à s’effacer dans les constructions, notamment au profit du bois. "Nous n’avons fait qu’une seule publication, sur le réseau social professionnel LinkedIn mais nous avons déjà beaucoup d’architectes et de clients intéressés. Si nous parvenons à récupérer quelques royalties en exportant cette technique dans d’autres régions via des partenaires, c’est une bonne chose. Mais notre premier objectif est de maintenir l’emploi. Nous sommes une coopérative ouvrière et n’avons pas de vocation d’expansion nationale. Mais nous voulons nous renforcer et pérenniser l’emploi."

La Scobat, qui est présidée par le chef de chantier Didier Hermessan, ne manque pas de projets pour atteindre ce but. En novembre 2020, elle a racheté la SATP (26 salariés), société de travaux publics basée à Saint-Connan, qui réalisait 2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020 contre 5 millions d’euros deux ans plus tard. "Elle était tournée vers la location, nous en avons fait un vrai acteur de TP, spécialisé dans les enrobés, avec un investissement d’un million d’euros dans son matériel", explique Hervé Maignen. La SATP déménagera sur le site de recyclage de matériaux et de production du Barbe.

Groupe pluridisciplinaire

Cette croissance externe préfigure la constitution d’un groupe pluridisciplinaire avec le rachat d’autres sociétés dans les métiers connexes au gros œuvre, comme la charpente, la menuiserie, le clôt et couvert. "Nous pourrions intervenir en tout corps d’état et répondre à des projets plus importants ou à des plus petits mais pour l’ensemble du chantier." L’un des marchés privilégiés sera celui de la réhabilitation, où la Scobat possède déjà de l’expérience avec les chantiers du Grand Hôtel de Perros-Guirec et du musée de Morlaix (Finistère). Une ambition notamment rendue possible grâce au trésor de guerre de la Scobat, qui en raison de ses statuts doit mettre en réserve 33 % de ses résultats annuels.

La coopérative trégueusienne s’est également lancée dans la promotion. "Les premiers projets sont en cours de contractualisation et devraient aboutir au premier semestre, avec des travaux à la fin de l’année ou en 2024", précise le DG. Ils concernent des logements ou bas de commerce, situés dans le département des Côtes-d’Armor ou à proximité. La Scobat a en charge la partie technique, de construction ou de réhabilitation, tandis que des partenaires pilotent la maîtrise d’ouvrage, l’aspect juridique et la commercialisation.

1,8 million d’euros d’investissement

Tous ces développements ont fini par mettre à l’étroit la coopérative dans ses locaux de Trégueux. Des travaux d’agrandissement sont donc en cours pour ajouter 250 m² de bureaux et 50 m² d'atelier au bâtiment existant. Les bureaux, qui partiront dans l’extension, laisseront place à du stockage. "Nous restructurons également l’existant avec une nouvelle distribution intérieure et des travaux d’isolation et le changement des fenêtres, pour un confort d’occupation aux dernières normes et même au-delà", se félicite Hervé Maignen. L’investissement se monte à 1,8 million d’euros. Le chantier, qui s’achèvera à l’été 2024, fait intervenir des partenaires de l’entreprise comme le cabinet MAArchitectes, à Plérin, Armor Ingénierie pour la partie thermique et fluides, à Langueux, le bureau d’études BSO, également à Plérin, et la… SATP.

À noter que la construction comprend une "salle de convivialité" de 60 m², qui pourra accueillir des anniversaires et événements festifs de salariés le week-end. Ses murs seront réalisés en Barbe.

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