Le port de commerce de Saint-Brieuc pourrait ne plus avoir que quelques mois devant lui avant de sombrer. C’est le cri d’alarme qui a été lancé le 22 septembre 2021, avec un calme apparent, par Thierry Troesch, président de la CCI des Côtes-d’Armor, titulaire de la concession de l’équipement.
En cause, l’ensablement du site, qui limite l’accès des bateaux et impose des travaux quotidiens, pour un coût d’un million d’euros par an. Tandis que le stockage du sable prélevé pose de plus en plus problème. "La construction d’un quatrième quai, qui aurait pu apporter une réponse à une partie du problème, pourtant validée, a été enterrée. La messe est dite, ne revenons pas dessus. On n’est pas dans la critique mais dans l’alerte, regrette le président. Il faut réunir tout le monde, Région, Département et Agglo, pour qu’une décision transitoire soit prise dans l’urgence avant de trouver une solution structurelle. On peut concilier le nécessaire respect de l’environnement avec le développement économique modéré mais régulier du port de commerce."
Des opérateurs "paniqués"
Parmi ces mesures d’urgence, pourrait figurer le retour des dépôts en milieu naturel des sédiments ramassés dans le port, autorisés un temps, interdits désormais. "Sur les 120 000 à 150 000 m² collectés, seuls 10 % sont valorisés pour recharger les carrières de clubs équins. On travaille pour arriver à valoriser les 90 % restants", souligne Yves Guirriec, responsable des équipements gérés par la CCI. Un sable "de bonne qualité, qui arrive avec les marées", précise Michel Lerat, vice-président de la chambre en charge des établissements gérés. Mais un sable chargé en sel, nécessitant des opérations de nettoyage coûteuses.
"Les opérateurs sont paniqués par l’envasement. Déjà, des bateaux ont été en attente et d’autres ont déjà dû aller ailleurs cette année", reprend Thierry Troesch, qui précise peser ses mots. "Il y a de l’anxiété mais aussi une vraie colère devant le manque de décision des politiques." Les deux exploitants (Agence Maritime Saint-Brieuc et Corbel Shipping Agency) ainsi que la vingtaine de clients, en import et en export, la plupart étant des coopératives comme la Cooperl, mais aussi des acteurs de la filière bois et kaolin, pour les plus importants, pourraient devoir, faute de solution, aller voir ailleurs. "J’ai fait le calcul. Si les utilisateurs du port, qui sont à 30 kilomètres autour, devaient aller à Brest, Cherbourg ou Le Havre, les camions devraient faire 450 kilomètres au lieu des 60 kilomètres aujourd’hui, ce qui reviendrait à une consommation supplémentaire de 1,5 million de carburants", estime Michel Lerat. La CCI craint également qu’un abandon du port du Légué entraînerait des délocalisations hors du département voire de Bretagne.
Nouvelles filières
En attendant, Yves Guirriec a présenté les résultats de l’équipement du Légué. Après une excellente année 2020, à 370 000 tonnes (dont 315 000 en import), qui a profité notamment des problèmes sociaux au port de Saint-Malo, l’activité à fin août 2021 a représenté 240 000 tonnes (dont 200 000 en import), sur les mêmes bases. L’agroalimentaire, et notamment l’alimentation animale, représente toujours la principale part de l’activité (170 000 tonnes en 2020, 95 000 tonnes en 2021). Suivent les filières bois (respectivement 60 000 et 45 000), en forte croissance, et kaolin (45 000 et 35 000). Deux nouvelles activités sont apparues en 2020 et sont présentes cette année, toujours uniquement en export : le bois broyé, porté par Guyot Environnement, et les combustibles solides de récupération, toutes deux dans le domaine environnemental. 146 bateaux ont fréquenté le port en 2020 et 99 à fin août 2021.
