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"Les mesures préventives sont plus pérennes que les procédures de sauvegarde"
Interview Gironde # Juridique

Olivier Bouru avocat spécialiste en droit commercial "Les mesures préventives sont plus pérennes que les procédures de sauvegarde"

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Depuis le début de la crise provoquée par l'épidémie de Covid-19, les avocats du barreau de Bordeaux se mobilisent pour venir en aide aux entreprises. Quelles solutions existent et pourquoi ne faut-il pas retarder le traitement des difficultés financières ? Olivier Bouru, spécialiste en droit commercial, des affaires et de la concurrence, fait le point.

— Photo : D.R.

Dans le contexte actuel de crise sanitaire et économique, est-ce que davantage d’entreprises en difficulté vous sollicitent ?

Olivier Bouru : Pour le moment non, et c’est bien ce qui m’inquiète. L’année 2020 va s’achever sur une baisse significative des procédures par rapport à 2019 ou 2018. Bon nombre d’entreprises vivent actuellement sous perfusion des aides de l’État, entre le PGE et les reports de charges, avec une illusion de bonne santé économique. Le niveau de trésorerie est souvent en décalage avec leurs résultats d’exploitation. Elles ont tendance à ne pas vouloir appréhender les pertes et ne pas anticiper l’assèchement de la trésorerie.

En Gironde, au troisième trimestre 2020, l’Insee a recensé 932 défaillances d’entreprises, en baisse de 28,4 % sur un an. Comment expliquer ce phénomène ?

Olivier Bouru : Cette baisse s’explique car les entreprises en difficulté ne reçoivent aucune des secousses habituelles venant des huissiers, des banques ou encore des Urssaf. Ces créanciers institutionnels ont pris le parti de ne pas poursuivre les entreprises qui ne sont pas à jour de leurs paiements. En Gironde, l’Urssaf n’a engagé quasiment aucune poursuite depuis le début du premier confinement, en mars dernier. Mais cette bienveillance ne durera qu’un temps, il y aura sans doute une cascade de défaillances mais il est trop tôt pour connaitre la date de cet évènement. Certains l’avaient prédit en septembre.

Comment prévenir ce phénomène ? Quelles sont les procédures à la disposition des entreprises qui rencontrent actuellement des difficultés financières ?

Olivier Bouru : Il existe d’abord des mesures préventives, comme le mandat ad hoc et la conciliation. Ces procédures sont confidentielles, souples dans leur mise en œuvre et rapides. Le Tribunal de Commerce ou le Tribunal Judiciaire nomme une mandataire ad hoc ou un conciliateur. Cela permet en quelques mois d’obtenir des accords avec des créanciers pour obtenir un délai, une remise de dettes, etc. Plus tôt on va chercher ces accords, plus on a de chances d’éviter une procédure de sauvegarde ou redressement. Ces mesures sont moins coûteuses que la sauvegarde et le redressement et aboutissent à des solutions statistiquement plus pérennes.

Idéalement, il faut se faire accompagner à la fois d’un avocat et d’un expert-comptable pour les questions de diagnostic et de prévisionnel. Le fait de bénéficier de cette double compétence permet d’aller se placer le plus vite possible sous la protection du tribunal et multiplie donc les chances de réussite.

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