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Lectra avale son concurrent américain et renforce ses positions dans l'usine du futur
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Lectra avale son concurrent américain et renforce ses positions dans l'usine du futur

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Le groupe Lectra, spécialiste des logiciels et systèmes de découpe automatique de cuir ou textile, est en passe de racheter son concurrent américain Gerber Technology. Une acquisition pensée notamment pour accélérer la transition de ses clients vers l’industrie 4.0.

La seule usine de l'entreprise parisienne Lectra, installée à Cestas (Gironde), emploie 850 salariés — Photo : Lectra

C’est une acquisition rondement menée, qui ne reste soumise qu’au vote favorable des actionnaires et à l’approbation de l’autorité réglementaire américaine, prévue fin mai. Lectra devrait ainsi s’emparer de son concurrent, Gerber Technology, au terme d’un rachat ponctué d’un protocole d’accord le 8 février, puis d’un contrat d’acquisition paraphé le 25 mars. Et ce moyennant 175 millions d’euros, dont 140 financés par des emprunts auprès de trois banques, et 5 millions d’actions Lectra.

Spécialiste français des logiciels et systèmes de découpe automatique de cuir ou textile, principalement pour les marchés de la mode, de l’automobile et de l’ameublement, Lectra possède son siège à Paris et son unique usine à Cestas, en Gironde. Sur ce site travaillent 850 des 1 750 collaborateurs de l’entreprise. Pour eux, ce rapprochement avec Gerber Technology "n’aura aucune conséquence particulière", assure le PDG de la société, Daniel Harari, en réponse à des craintes de "mutualisation des savoir-faire" parfois consécutives à ce type d’opération.

Une acquisition offensive

"C’est une acquisition totalement offensive, pas défensive, rappelle-t-il. Nous étions en discussions depuis trois ou quatre ans. Nous disposerons de moyens supplémentaires d’investissements dans l’innovation et de nouvelles capacités technologiques qui seront très bénéfiques pour l’industrie. Nous pourrons créer de la valeur sur le long terme pour nos clients et nos actionnaires". Daniel Harari en est convaincu : "c’est le bon moment pour opérer ce rachat car la stratégie de Gerber s’est rapprochée de la nôtre. Son actionnaire l’a fait évoluer en profondeur, a recruté de nouvelles équipes, développé des activités de service et assuré une montée en gamme vers des solutions premium."

À la manœuvre, Mohit Uberoi, directeur général de Gerber Technology, qui a dirigé la transformation de l'entreprise américaine et créé une plateforme permettant à ses clients de prendre le virage de la transformation numérique. Les deux sociétés "partagent une longue histoire d’innovation et d’excellence du service client qui, associées, créeront une entreprise encore plus forte, capable de fournir les meilleures solutions technologiques et services à nos clients à travers le monde", clament-elles.

"Revenir plus forts après la crise"

Le PDG de Lectra l’assure, "les deux sociétés vont garder leur mode de production, à la fois pour l’usine de Cestas et pour les produits Gerber qui resteront sous-traités. Mais ce rapprochement va permettre de combiner et d’intensifier les actions de recherche, pour faire évoluer les produits actuels."

Évolution nécessaire, car même si Lectra "s’en est bien sorti en 2020 dans un environnement difficile", selon Daniel Harari, l’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires en baisse par rapport à celui de 2019 : 236,2 millions d’euros contre 280 millions. "Nous pensons retrouver le niveau de 2019 en 2022. D’ici là, nous ne remplacerons qu’un départ sur deux. Mais nous rouvrirons des postes dès que nous aurons renoué avec un chiffre d’affaires proche de 480 millions d’euros environ, soit le niveau cumulé des chiffres d’affaires de Lectra et Gerber Technology en 2019", promet Daniel Harari.

Le dirigeant affiche sa confiance pour les mois à venir : "cette crise nous a permis de prendre du recul et nous a convaincus de l’excellence de nos fondamentaux, de notre business model, de la valeur de notre offre. Nous mettons à profit cette période d’activité ralentie pour revenir plus forts."

Et ce grâce à un business model solide. "La marge dégagée couvre 90 % de nos frais généraux, y compris la R & D. Ce qui signifie que, dès février, nous avons passé notre point mort de l’année, plaide ainsi Daniel Harari. Par ailleurs nous avons un fonctionnement vertueux en cash et nos besoins en fonds de roulement sont négatifs, car nous sommes payés d’avance sur nos contrats et commandes, donc nous avons les moyens d’autofinancer notre développement. En termes de cash, rentabilité, sécurité, ce business model a bien résisté en 2020."

Un partenariat avec Microsoft

Stratégiquement, Lectra compte sur Gerber Technology pour mieux s’implanter sur le marché américain. "Nous sommes présents aux États-Unis dans l’automobile et dans l’ameublement, beaucoup moins dans la mode. Dans la période que nous vivons, ce rapprochement nous permet de préparer la sortie de crise de manière sereine. Nous voulons aussi asseoir notre position premium, avec une offre en la matière qui a déjà été adoptée par plus de 250 de nos clients. Nous souhaitons également accélérer la transformation numérique de nos clients, vers l’industrie 4.0." Sur ce dernier point, Lectra peut notamment compter sur un partenariat annoncé en février avec Microsoft, s’appuyant entre autres sur le cloud Azure pour l’utilisation qu’elle fait de l’intelligence artificielle, l’internet des objets (IoT), le big data et le cloud.

La pandémie de Covid-19 a ainsi été l’occasion, pour Lectra, de proposer à ses clients une série de mesures d’accompagnement allant au-delà de son engagement contractuel. "Nous avons tout fait pour qu’ils puissent travailler à distance, ce qui n’était pas si évident car la plupart des systèmes d’information de nos clients ne sont pas conçus pour cela", retrace Daniel Harari. "Cette proximité avec nos clients a créé un lien très fort. Nous avons aussi lancé une offre pour leur permettre de fixer leurs objectifs, puis nous les accompagnons dans le suivi avec des tableaux de bord quotidiens, hebdomadaires et mensuels. Cette démarche est un élément essentiel de notre stratégie et sera encore renforcée dans les années à venir", conclut Daniel Harari. Lectra entend également renforcer sa présence sur les activités de retail et de distribution, raison pour laquelle l’entreprise a acquis en 2019 la start-up belge Retviews, spécialiste du recueil et de l’analyse en temps réel des données du marché pour augmenter les ventes et améliorer les marges.

Encadré :

Lectra mise sur la personnalisation

Avec la crise sanitaire, de nombreux Français - et pas seulement - ont pris ou repris conscience de l’importance d’avoir un intérieur à leur goût, confortable et chaleureux. Une étude mondiale menée par Ikea montre ainsi que 78 % des consommateurs dans le monde ont considéré une maison comme leur refuge au plus fort de la pandémie, et deux consommateurs sur cinq ont apporté des modifications à leur domicile en 2020. Or un domicile qui nous ressemble, c’est de plus en plus un intérieur que l’on ne trouve pas ailleurs. Une autre étude, menée elle par Deloitte, montre ainsi qu’au Royaume-Uni près d’un acheteur sur deux est intéressé par des meubles personnalisés. Enfin un dernier sondage, conduit par le Conseil de développement du commerce de Hong Kong, montre que la Chine connaît une croissance de 18 % sur le segment des canapés personnalisés.

Dans ce contexte, Lectra a annoncé en mars 2021 le lancement de son offre "Furniture on Demand". Concrètement, l’entreprise offre la possibilité aux professionnels d’industrialiser la production de petites séries, donc de réduire leur coût et d’accélérer leur production. Ainsi, "les industriels de l’ameublement n’ont plus de compromis à faire entre qualité et profitabilité. Dans un contexte économique marqué par la nécessité vitale de maîtriser les coûts et le besoin de réinventer l’expérience client, ils peuvent produire petites séries et meubles personnalisés aussi rapidement que des produits standard et faire de la production à la demande un nouveau relais de croissance", assure Maria Modroño, directrice marketing et communication de Lectra.

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