Gironde
Le skipper Yves Parlier veut donner des ailes aux cargos
Gironde # Naval # Innovation

Le skipper Yves Parlier veut donner des ailes aux cargos

S'abonner

Yves Parlier, l’ancien navigateur en solitaire, est aujourd’hui chef d’entreprise. À la tête de Beyond the Sea, il développe une voile de kite pour économiser sensiblement le carburant sur les cargos.

— Photo : DR

« Je me suis toujours intéressé au vent et aux bateaux, » retrace Yves Parlier, ingénieur en matériaux composites et surtout skipper au palmarès impressionnant. À presque 60 ans, il ne dévie pas de sa route initiale avec son entreprise Beyond the Sea, créée en 2014 à La Teste de Buch (Gironde).

Associé à Pascal Waldmann, il a jeté ses économies et trouvé quelques alliés dans le financement d’un projet qui devrait se concrétiser en 2021 par un test grandeur réelle sur un cargo. Au cœur du projet, des voiles de kite qui ont déjà fait leurs preuves pour assister la navigation des voiliers de plaisance. Leur adaptation en cours à la navigation des cargos devrait permettre aux armateurs de réaliser des économies de carburant. Encore faut-il résoudre de nombreux détails techniques pour l’arrimer sur des bateaux qui n’ont pas été prévus pour ça et aussi convaincre et former la grande famille de la marine marchande.

Les cargos de CMA-CGM

Les premiers échanges avec le géant du transport maritime CMA-CGM sont prometteurs. « La compagnie affirme que si le kite parvient à réduire de 5 % la consommation d’un cargo, ils équiperont leurs bateaux, » retrace Yves Parlier. Or à ce stade, les sept collaborateurs de Beyond the Sea ont déjà évalué à 20 % l’économie réalisable avec l’utilisation de ce drôle de cerf-volant sans mât ni drisse. Pour l’heure, il ne s’agit toutefois que d’estimations sur le papier.

Beyond the Sea fabrique déjà des kites jusqu’à 50 m² pour des bateaux de pêche et de plaisance. En préparant le saut d’une application à la marine marchande, on parle cette fois d’une toile de 800 à 1 600 m², voire beaucoup plus.

Une législation favorable

Des flottes entières de l’Ifremer ou du service des Phares et Balises (30 bateaux) pourraient aussi être équipées. L’organisation maritime internationale ayant légiféré et fixé une feuille de route de réduction par sept des émissions de sulfur, les jours de ce composant du mazout lourd qui sert de carburant pour la propulsion des navires sont comptés. « Le principe est de proposer un mixte de moyens de propulsion pour se mettre en conformité avec la future réglementation, » relate Yves Parlier, qui doit faire face à plusieurs concurrents. Si les Allemands de Skysails ont finalement délaissé le secteur de la marine marchande, Airseas, né à Toulouse, mise aussi sur des voiles pour équiper des cargos.

Si le contexte paraît opportun, la réalité économique ne permet pas encore à Beyond the Sea d’assurer sa pérennité sans les subventions de l’Ademe et de la Région Aquitaine. « On commence à avoir du chiffre d’affaires, 25 000 euros avec la voile qui équipe les bateaux de plaisance, vendue environ 2 000 euros pièce. » Une production sortie du petit atelier de couture de la Teste et d’un peu de sous-traitance. « Nous avons aussi signé des contrats de recherche avec des armateurs pour 20 000 euros. »

L’avenir pourrait se jouer sur un autre format. Si la performance est avérée, CMA-CGM pourrait signer un premier bon de commande à Beyond the Sea pour équiper 80 cargos, à raison de 2 millions d’euros par bateau. Yves Parlier espère réaliser des essais en situation en 2021 sur un cargo CMA-CGM. « C’est un sacré challenge qui nous oblige à lever des fonds en 2020 pour accélérer notre recherche et développement ».

Gironde # Naval # Innovation