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Jérôme Leleu (French Tech Bordeaux) : « On doit pouvoir dire à une start-up qu’elle n’est pas prête pour le CES »
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Jérôme Leleu président de French Tech Bordeaux Jérôme Leleu (French Tech Bordeaux) : « On doit pouvoir dire à une start-up qu’elle n’est pas prête pour le CES »

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Une année s'est écoulée depuis l'élection de Jérôme Leleu à la tête du réseau French Tech Bordeaux. Après avoir passé quelques mois à œuvrer dans l'ombre, avec les autres membres du comité, pour clarifier la stratégie de l'association, celui qui est par ailleurs le PDG de SimforHealth veut maintenant donner un coup d'accélérateur. Prochaine étape : le CES de Las Vegas.

Pour Jérôme Leleu, président de French Tech Bordeaux et PDG de l'entreprise SimForHealth. — Photo : Astrid Gouzik - Le Journal des Entreprises

Le Journal des Entreprises : Vous allez bientôt souffler votre première bougie à la tête de French Tech Bordeaux. Quel bilan tirez-vous de ces derniers mois ?

Jérôme Leleu : Ma nomination a été officialisée en décembre 2017, mais l'élection des six entrepreneurs du comité (cinq issus des start-up et PME et un des grands comptes) avait en fait eu lieu en juin 2017. Durant ce laps de temps, nous avons peu communiqué, c'était voulu. Il y avait eu des moments difficiles par le passé (avec le départ l'ensemble des membres du comité de pilotage, fondateurs historiques, NDLR). Il fallait réenclencher une bonne dynamique, revoir les statuts et diverses questions administratives. Nous avons structuré l’équipe de permanents, nous venons notamment de recruter Philippe Métayer en tant que directeur général délégué.

Justement, le poste est resté vacant quelques mois… Pour quelle raison ?

J.L. : Nous n’étions pas prêts avant. D'abord d'un point de vue financier, il fallait que l’on assainisse les comptes. On a pu lire que French Tech Bordeaux avait des problèmes financiers... Aujourd’hui tout cela est réglé. David Babin, le trésorier a fait un travail remarquable. Et puis ce recrutement était l'un des chantiers les plus complexes. Toutes les décisions sont prises collectivement. On soumet nos propositions aux collectivités (Bordeaux Métropole, Région Nouvelle-Aquitaine, CCI Bordeaux-Gironde).

On ne voulait pas un consensus mou. Je préférais prendre un peu plus de temps et que tout le monde soit convaincu de ce choix plutôt que de le faire en vitesse et que ce recrutement soit le terreau de nouveaux problèmes. Maintenant que nous sommes en ordre de marche, j’ai demandé au directeur général d’accélérer sur notre feuille de route.

« La French Tech n'est pas là pour distribuer de l’argent aux start-up ! »

Vous vous êtes aussi attachés à repositionner le rôle de French Tech Bordeaux. Pourquoi ?

J.L. : Beaucoup de choses ont été dites au lancement de la French Tech et certaines n’étaient pas claires. Par exemple, beaucoup pensaient que nous étions là pour distribuer de l’argent aux start-up ! Nous sommes un fédérateur : on essaye de diriger la bonne start-up vers la structure d’accompagnement adaptée. Nous travaillons avec les incubateurs, les structures d’accompagnement, de développement, mais on ne peut pas tout faire. Et pour ces acteurs-là, c’était important de comprendre que nous n'étions pas ici pour les court-circuiter.

Quels sont les prochains grands rendez-vous ?

J.L. : D'abord, le French Tech Day, le 5 décembre, à la CCI Bordeaux-Gironde. Ensuite, la Région, la CCI, Bordeaux Métropole et French Tech Bordeaux conduiront une délégation de 14 entreprises au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas.

Justement, elles étaient 40 entreprises à partir en 2018. La délégation est franchement réduite pour l'édition 2019. Comment l'expliquez-vous ?

J.L. : Pour une jeune entreprise, aller au CES, c'est trouver des occasions de se développer, de tester un marché… Cela nécessite une maturité suffisante. Nous avons sciemment sélectionné moins d’entreprises, mais qui sont dans une optique de développement à l’international. Dire à une entreprise qu’elle n’est pas encore prête pour le CES, ce n’est pas négatif !

Vous comprenez les critiques entendues après le dernier salon, arguant que les Régions emmenaient des délégations trop importantes et que les entreprises françaises étaient trop présentes ?

J.L. : Les Régions ont été fortement sollicitées financièrement, c’est normal qu’elles veuillent de la visibilité. Mon avis, c'est qu'il faut une approche thématique. Un industriel de Singapour qui vient au CES car il veut investir dans les drones, devrait trouver un espace dédié à la mobilité ou à la ville intelligente. Cela ne l'intéresse pas de savoir si l'innovation est développée en Nouvelle-Aquitaine ou en Occitanie !

L'arrivée à Bordeaux d'acteurs emblématiques comme Deezer, Betclic ou Ubisoft, est-ce un bon signal, selon vous ?

J.L. : Évidemment, ce sont des marques qui ont une connotation positive pour le territoire. C'est la preuve que, sur différents paramètres, l'écosystème est attractif. Chez Ubisoft, ils savaient, en venant ici, qu’ils trouveraient des compétences autour du jeu vidéo. Deezer a, lui, trouvé des collaborations avec des laboratoires de recherche.

Il faut en être fier mais cela ne doit pas se faire au détriment d’entreprises du territoire, qui sont tout aussi talentueuses, mais plus petites ou plus jeunes. Il ne faut pas que seules ces grandes marques soient valorisées. Et dans un contexte de tension sur le marché de l’emploi dans le numérique, cela peut rendre les recrutements plus complexes.

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