Rue Minvielle, dans le très prisé quartier des Chartrons à Bordeaux. Une banale porte de garage qui, si elle n'était pas peinte en rouge pétard, n'accrocherait pas le regard. En tout cas, pas suffisamment pour distinguer, derrière les portes vitrées, quelques bureaux et une curieuse installation : un trampoline trône fièrement, annonçant la couleur. Ici, c'est le siège de l'entreprise familiale France Trampoline, spécialiste des trampolines de loisirs depuis 1971. Les locaux sont calqués sur la devise de son discret patron Hervé des Horts : pour vivre heureux, vivons cachés ! « Nous sommes prudents, car rien n'est jamais acquis. Et les concurrents veillent », défend le PDG. Des précautions justifiées par les embûches rencontrées sur son parcours de chef d'entreprise.
Faire des choix
En 2005, Hervé des Horts, ingénieur mécanique de formation, occupe un poste confortable chez BMW à Poitiers. « Deux options s'offraient à moi : continuer sur la voie de cette carrière toute tracée ou me lancer dans la reprise d'entreprise », raconte Hervé des Horts. Avec son épouse Sophie, ils décident finalement de saisir une opportunité et de racheter la marque France Trampoline, créée en Vendée en 1971 par un ferronnier. « C'était un vrai coup de poker. Nous avons embarqué nos trois enfants, nous nous sommes installés à Bordeaux », raconte-t-il. Aidés par les personnes qui leur ont vendu leur fonds de commerce, ils commencent par implanter un atelier de production à Pessac et embauchent quatre personnes.
Deux ans plus tard, Hervé des Horts prend finalement la décision d'arrêter la production pour se concentrer sur un seul métier : le commerce et le marketing. « La saisonnalité des produits nous posait un véritable problème au niveau de l'atelier », commente-t-il. « Nous avons dû nous séparer des deux métalliers et des deux couturières. Mais c'était ça ou tout arrêter carrément ». La société décide alors de sous-traiter la fabrication de ses produits en France, en Slovénie mais surtout en Chine. Un choix périlleux pour la PME qui a fait de son positionnement haut de gamme sa force. « Nous travaillons avec une usine qui appartient à une entreprise familiale en Chine. Nous les avons choisis pour la qualité et la fiabilité des produits », justifie Hervé des Horts.
Magasin virtuel
La question de la fabrication réglée, l'entreprise peut se focaliser sur son métier principal : le commerce et particulièrement l’e-commerce. Car les trampolines sont des produits imposants, compliqués à vendre sur des points de vente physiques. Une partie des 15 salariés est dédiée au conseil de vente à distance, l'autre partie est occupée au développement des sites web. Développeurs, web marketeurs et graphistes sont à pied d'œuvre pour faciliter le parcours des clients en ligne. « Notre grand chantier en 2018 a été le développement en interne d'un outil permettant de créer son filet et de faire un devis en ligne », se félicite le dirigeant.
Diversification par produits et par marché
Mais la clé de voûte du modèle France Trampoline, c'est la diversification. Et l'entreprise a le flair pour dénicher les nouvelles tendances. Après avoir fabriqué des trampolines de toutes les formes et de toutes les dimensions, pour les particuliers et les professionnels, elle s'est attaquée aux filets d'habitation (tendus à l'horizontal pour combler un vide en prolongement d'une mezzanine par exemple), aux hamacs suspendus ou encore au nautisme. D'ailleurs, France Trampoline a équipé le multicoque de 50 pieds « Solidaires en peloton » du skipper Thibaut Vauchel-Camus qui prendra le départ de la Route du Rhum, le 4 novembre prochain.
Tant qu'il est question de toile tendue ou de filet sur-mesure, l'entreprise bordelaise ne recule pas. Son prochain axe de développement, c'est le marché allemand ! Un commercial basé à Bordeaux est dédié à la conquête de ce marché prometteur et un site web en langue germanique a été développé pour satisfaire les ambitions de France Trampoline à l'export. L'entreprise disposait déjà de sites en anglais, en espagnol et en italien.
La variété de produits et des marchés visés a permis à France Trampoline de pallier la saisonnalité de son business et de s'assurer une croissance modérée (entre 5 et 7 % par an) mais pérenne. Malgré tout, Hervé des Horts ne semble pas pleinement satisfait… L'arrêt de la production en 2007 lui a laissé comme un arrière-goût d'inachevé. À demi-mot - prudence oblige - il finit par avouer : « Nous réfléchissons à relocaliser la production à Bordeaux… cela me plairait évidemment ! »
