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Caisse d'Épargne Aquitaine Poitou-Charentes : « Le flux continu de projets sur le territoire nous rend optimistes »
Interview Bordeaux # Banque # Conjoncture

Jérôme Terpereau président du directoire de la Caisse d’Épargne Aquitaine Poitou-Charentes Caisse d'Épargne Aquitaine Poitou-Charentes : « Le flux continu de projets sur le territoire nous rend optimistes »

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Optimiste et lucide, c’est ainsi que se définit Jérôme Terpereau en ces premiers jours de déconfinement. Le président du directoire de la Caisse d’Épargne Aquitaine Poitou-Charentes dresse un premier bilan de la crise. La banque régionale coopérative aux 2 500 collaborateurs et 1,4 million de clients réfléchit au déploiement du télétravail et aux dispositifs à actionner "par vague" pour soutenir les projets économiques locaux qui ne manquent pas.

Pour Jérôme Terpereau, président du directoire de la Caisse d'Epargne Aquitaine Poitou-Charente, un des grands enseignements de la crise réside dans le déploiement du télétravail. De 220 collaborateurs à travailler au moins un jour par semaine à distance, ils sont 1300 au sortir du confinement, soit 60 % des équipes. — Photo : Frédéric Guy

Le Journal des Entreprises : Quels impacts principaux ont eu ces deux mois de confinement sur votre organisation de travail ?

Jérôme Terpereau : Trois jours après le confinement nous avons décidé de diviser les équipes par deux, pour des rotations qui permettaient de mettre une équipe en réserve en cas de suspicion de contamination. Cela n’a pas été nécessaire. Nous avons maintenu 94 % des agences ouvertes et 100 % de nos centres d’affaires. Nous avons par ailleurs augmenté le nombre de collaborateurs pouvant travailler à distance, de 220 à travailler au moins un jour par semaine à distance, ils sont aujourd’hui 1 300, soit 60 % des équipes ! À ce jour, nous continuons de déployer des solutions de travail à distance, avec pour objectif de passer de la phase du télétravail subi, à celle du télétravail choisi. Cela se fera avec l’ensemble des métiers concernés, RH, informatique… et avec les partenaires sociaux. Ces prochains mois, nous négocierons sur ce que sera notre futur cadre de travail à distance. Il s’agit d’aborder le sujet sereinement, d’en définir toutes les conditions, car s’il est désormais certain que l’on va augmenter le nombre de personnes travaillant à domicile, on ne peut pas dire que les conditions sont actuellement optimales, il faut les retravailler. Cela prendra du temps. Cependant, il est aussi important de considérer que le travail commercial en agence ne peut pas faire l’impasse sur les rendez-vous en face-à-face.

Les dispositifs gouvernementaux ont-ils pris le pas sur votre activité auprès de votre clientèle d’entrepreneurs ?

Jérôme Terpereau : En un mois et demi de traitement de Prêts garantis par l’État (PGE), nous avons traité ce qui correspond environ à six mois de crédits classiques. Nous avons dédié une « task force » d’une soixantaine de collaborateurs, dont 40 formés à cette occasion. À date sur 5 000 demandes de PGE formulées, 4 000 sont traitées, pour 400 millions d’euros, selon un taux d’acceptation de 97,3 %.

Comment se répartissent les demandes de PGE par secteur d’activité sur notre territoire ?

Jérôme Terpereau : Au 25 mai, on observe que 67 % des demandes sont concentrées sur quatre secteurs : distribution commerce, BTP, tourisme hôtellerie-restauration et services. On trouve ensuite l’automobile avec les concessionnaires. Pour un client professionnel le montant moyen est de 57 000 euros et de 405 000 euros pour une entreprise.

Quels clients ont-ils été concernés par les reports d’échéances ?

Jérôme Terpereau : 22 000 reports ont été réalisés. Pour les clients des secteurs fortement touchés, ces reports ont été mis en place automatiquement à partir des codes NAF avant la fin du mois de mars. Nous avons ainsi pu alléger les trésoreries. Les ETI ont pris le temps de recalculer leur trésorerie, leurs demandes sont arrivées après celles des autres professionnels. Cinq secteurs représentent 50 % des demandes de reports d’échéances : l’industrie, le commerce et la distribution, les services, le BTP et le tourisme.

Vous évoquez des réponses par vague… Pouvez-vous préciser ?

Jérôme Terpereau : Nous allons voir comment va se dérouler la saison, voir dans quelles régions vont se rendre les Français, et si cela est suffisant pour compenser l’absence de touristes étrangers. Côté clients, il y aura ceux qui ne pourront pas rouvrir, ceux qui vont faire la saison et feront un bilan en septembre. Par vague successive, nous banquiers, nous devrons leur apporter des solutions. Nous accompagnerons le plus de clients possible vers la reprise, mais certains resteront au bord du chemin…

Quel est votre point de vue sur le risque de surendettement inhérent à ces différents dispositifs de soutien ?

Jérôme Terpereau : Au sujet du PGE, la possibilité de différer d’un an la mise en amortissement et celle d’amortir le prêt sur une période additionnelle de 5 ans donnent le temps de voir venir. Il n’y a pas véritablement de sujet si l’activité économique reprend. Il est certain qu’il y aura un problème si la reprise n’intervient pas. En ce qui concerne le secteur du tourisme, l’État va mettre en place le PGE saison qui se base sur les trois meilleurs mois de l’année précédente. Nous pourrions également renforcer le report d’échéance par secteur, par exemple de 6 à 12 mois pour le tourisme. Parmi les solutions pour développer de la trésorerie, nous disposons aussi de la technique de lease back immobilier qui permet de récupérer de la trésorerie pour renforcer ses fonds propres. La financière Aquitaine Poitou Charente est dotée de 120 millions et peut se porter acquéreur des murs. S’il faut restructurer, l’acquisition des fonds est une réponse, en intéressant l’exploitant.

Quel est votre état d’esprit au sortir du confinement et comment estimez-vous le moral des troupes ?

Jérôme Terpereau : Mon état d’esprit est à l’image de celui des équipes. Nous avons le sourire. Selon un sondage, 82 % des salariés sont en forme. Nous avons l’énergie et l’envie d'être au service de la relance de l’activité économique du territoire. L’optimisme et la lucidité me conduisent ; nous n’avons jamais eu d’arrêt total des projets d’investissements. Que ce soit dans les énergies renouvelables, les infrastructures de loisirs et de santé, dans les nouvelles technologies autour de la fibre notamment, ce sont des centaines de millions d’euros de projets à construire qui nous ont renforcés dans notre conviction d’être des acteurs essentiels tant en période de confinement que de déconfinement.

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