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Zilli, à rebours de la crise mondiale
Lyon # Textile

Zilli, à rebours de la crise mondiale

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L'entreprise lyonnaise de prêt-à-porter haut de gamme pour hommes a connu ses plus belles années entre 2000 et 2013, enregistrant jusqu'à 20 % de croissance annuelle. Elle paye les frais depuis fin 2014 d'un contexte international et géopolitique tendu et d'une croissance mal gérée. Aujourd'hui, elle tente de restructurer sa dette pour rebondir.

— Photo : Le Journal des Entreprises

2007, 2008, 2009. Les carnets de commandes des usines se vident, l'industrie automobile marche au ralenti, le système bancaire est au bord de la faillite, tout comme la Grèce. Et pendant ce temps, quelques grands noms du luxe, Mont Blanc, Chanel... tirent leurs épingles du jeu. Tout comme Zilli. Cette très discrète PME lyonnaise, installée dans une bâtisse au fond d'une petite rue de Vaise. L'enseigne reprise par Alain Schimel à son père dans les années 70 prospère grâce à des clients richissimes qui chérissent la rareté des matières premières de Zilli ? (alligator, vison, belette, pierres précieuses...)- sa confection sur mesure, la garantie à vie des produits. Un blouson en cuir qui sort de l'atelier lyonnais n'est pas vendu en dessous de 9.000 euros, une chapka s'achète 1.300 euros, des costumes cachemire dix fois plus chers. La crise, quelle crise ? « Nous avons senti un léger frémissement à la baisse, entre 2008 et 2009, mais rien de catastrophique » tempère Laurent Schimel, fils d'Alain et directeur général depuis 2010. Un fléchissement qui ne remet pas en cause le mouvement des courbes. Pour preuve, entre 2002 et 2007, le chiffre d'affaires de l'entreprise passe de 13,5 à 50 millions d'euros, à la cadence folle de 20 % de croissance par an. En 2007, l'entreprise compte 250 salariés. Au faîte de son succès, en 2013, elle atteindra 400 collaborateurs avec 93 millions de chiffre d'affaires.

Œil du cyclone

La crise, Zilli la traverse bien après les autres entreprises plus « classiques ». « Nous sommes pris dans l'oeil du cyclone depuis 2014 » décrit le directeur général, qui revisite aujourd'hui l'histoire de l'entreprise familiale avec du recul. Selon lui Zilli paye les conséquences d'erreurs structurelles et de coups durs conjoncturels. « Nous avons grandi tellement vite entre 2000 et 2013 ! Nous avons multiplié les ouvertures de filiales, inaugurant jusqu'à quinze magasins dans le monde -Londres, Milan, Cannes, Monaco, New-York, Washington- comptant jusqu'à cinq sites de production. Nous avions alors une demande folle, on ne voulait pas rater des commandes ». La dégringolade s'est amorcée à l'aune du conflit géopolitique opposant l'Europe à la Russie, à cause d'un différend l'opposant à l'Ukraine, entraînant un embargo mutuel entre l'Union européenne et le pays de Vladimir Poutine. Là où résident nombre de clients fidèles à Zilli. « Nous avons à la fois souffert de la crise à l'Est, du ralentissement de la croissance chinoise, de la chute du prix des matières premières et, en Europe, d'un contexte très lourd, lié aux attentats. À Paris et à Cannes, notre chiffre d'affaires a chuté de 30 à 40 % en 2016 » rappelle Laurent Schimel. À l'été 2016, Alain et Laurent Schimel ont placé leur entreprise sous la protection du Tribunal de commerce de Lyon, menant simultanément un plan de sauvegarde de l'emploi avec 25 % de l'effectif touché. L'entreprise compte aujourd'hui 220 salariés, dont 150 en France, et 70 dans les filiales. En parallèle, les boutiques de Bruxelles, Montréal, Capri, Porto Cervo, et même Lyon, ont baissé le rideau. En coulisses, le management de la PME est renouvelé, avec un nouveau directeur commercial arrivé il y a 15 mois, un directeur des opérations (lié à l'achat de matières premières) nommé en janvier 2017 tandis qu'un nouveau DAF s'installera en septembre. Cet été, Zilli a présenté au Tribunal de commerce son plan de continuation, qui devrait être homologué fin septembre. Celui-ci consiste en un étalement de la moitié de la dette sur dix ans tandis que l'autre moitié serait rachetée par des « amis de la marque Zilli », lesquels prendraient jusqu'à 40 % du capital. Capital jusqu'alors détenu à 100 % par la famille Schimel.

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