Pour nombre d’entreprises, le retour du confinement fin octobre a été synonyme de désastre économique. Pour Wizaplace, la tendance est inverse. « À chaque confinement, nous avons enregistré un afflux de demandes des commerces locaux », décrit Eric Alessandri, fondateur et PDG de cette entreprise créée à Lyon en 2012 et spécialisée dans la création de places de marché (ou marketplaces), ces sites de e-commerces multivendeurs. Les commerçants de proximité, en temps normal très peu concernés par cette tendance à l’hyper-numérisation, se sont tournés massivement vers ces places de marché en ligne dès le printemps 2020. Wizaplace a ainsi enregistré 200 demandes de la part de commerçants de proximité, acteurs dans l’alimentaire, les jouets, les livres, les vêtements…
Cet automne, les collectivités se sont organisées pour soutenir financièrement ces initiatives, comme vient de le faire la Région Auvergne Rhône-Alpes (25 M€ pour accélérer la digitalisation, la livraison et/ou le retrait sur place). La semaine qui a suivi le deuxième confinement, Wizaplace a reçu 50 appels. Résultat, entre le premier semestre 2019 et le premier semestre 2020, le chiffre d’affaires de cette success story – qui ne souhaite pas le communiquer – a triplé. Et pour cause : aujourd’hui les places de marché pèsent pour un peu plus de 50 % des transactions en ligne. Une croissance qui se répercute sur les effectifs. Il y a 18 mois, la société comptait une trentaine de collaborateurs. Ils sont désormais « entre 60 et 65 ». « Je préfère donner une fourchette tant nos effectifs augmentent rapidement. Nous devrions atteindre la centaine d’ici un an », précise Eric Alessandri.
Centres commerciaux et franchises
La croissance de la société s’explique par un marché florissant. « La hausse du nombre de transactions en ligne (+ 13 % par an en moyenne) est très largement tirée par les places de marchés. Si on les retire, on constate plutôt un e-commerce en perte de vitesse », explique le dirigeant.
Wizaplace a aussi développé une stratégie de conquête permanente de nouvelles "cibles". Après s’être lancée auprès de PME et de start-up, la société est allée frapper à la porte des ETI à partir de 2017 et négocie désormais des contrats avec de grands comptes, comme Engie, Veolia ou OVH. « Nous sommes aussi en contact avec des promoteurs et des entreprises qui gèrent des centres commerciaux, qui voudraient ouvrir une marketplace regroupant leurs enseignes ». La pépite lyonnaise pousse aussi son offre en direction des réseaux de franchises. « C’est un marché que nous commençons tout juste à développer mais qui représente un gros potentiel selon nous, car la France compte 6 000 réseaux de franchise et l'Europe 40 000 ».
"Le confinement pourrait contribuer à changer les habitudes vers des achats en ligne"
Ultime corde à son arc, l’e-commerce pour le BtoB. Les demandes portent sur les marketplaces “verticales”, c’est-à-dire spécialisées sur un segment ou un métier. Et les acheteurs sont au rendez-vous. Les sites tels que Warmango, dédié aux produits du bâtiment, ou Pharmédistore, plateforme d’achat pour les pharmaciens, « fonctionnent par exemple très bien », glisse Eric Alessandri. Qui a aussi identifié un gros mouvement de fond auprès des grossistes, qui approvisionnent magasins et industrie. « En temps normal, ils font 80 à 90 % de leur activité en rendant visite à leurs prospects. Le confinement pourrait contribuer à changer les habitudes vers des achats en ligne ».
Un pôle conseil pour accompagner les nouveaux clients
Pour ces nouveaux clients, parfois plus réticents au commerce en ligne mais très fortement encouragés par la conjoncture à passer le cap, Wizaplace a lancé au printemps 2020 un pôle de conseil et d’accompagnement. « Jusque-là, les entreprises qui lançaient des marketplaces étaient assez mûres en termes de maîtrise de l’outil numérique. Aujourd’hui, certains ont besoin de davantage d’accompagnement », justifie Eric Alessandri. Le pôle propose des ateliers sur "Comment séduire des vendeurs", "comment construire un catalogue", "comment créer une arborescence", etc. Une activité en forte croissance, qui représente déjà 10 % du chiffre d’affaires.
" En 2021, nous passerons à la vitesse supérieure "
Seul le projet de développement international de Wizaplace a pris du retard avec la crise du Covid. C’était l’une des ambitions affichées par la société au moment de sa levée de fonds de 13 millions d’euros il y a un an. “Nous avons signé nos premiers contrats en Allemagne, en Pologne, en Suisse et aux Pays-Bas, cette année. En 2021, nous passerons à la vitesse supérieure”, assure Eric Alessandri, confiant.
