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Pâtes Saint-Jean : "Nous vivons une crise des matières premières"
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Guillaume Blanloeil président du groupe Saint-Jean "Nous vivons une crise des matières premières"

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Entre la hausse des prix des matières premières et celle de l’électricité, le groupe Saint-Jean, spécialisé dans la fabrication de pâtes fraîches et de quenelles, a enregistré cette année un surcoût de plus de 20 millions d’euros. Guillaume Blanloeil, président de l'ETI basée à Dardilly (Rhône), revient sur les conséquences de l’inflation.

Guillaume Blanloeil, président du groupe Saint-Jean — Photo : Saint-Jean

L’envolée des cours des matières premières inquiète le secteur agroalimentaire. Quelles sont les conséquences de ces hausses pour le groupe Saint-Jean (500 salariés, 100 M€ de CA en 2021) ?

Nous avons commencé à enregistrer des hausses à partir de mars 2021. D’abord sur le colza, le tournesol, puis le blé. Habituellement, nous négocions le prix du blé une fois dans l’année, lorsque son cours se stabilise en fin de récolte. Cette année, nous avons été contraints de renégocier le prix du blé dix fois. Ces derniers mois, ce sont les prix des produits laitiers qui se sont envolés. Celui du beurre a été multiplié par deux et demi. Nous vivons une crise des matières premières, tant au regard de leur disponibilité que de leur prix. Entre mai 2021 et mai 2022, ces hausses ont généré un surcoût de 10,7 millions d’euros pour le groupe.

Comment avez-vous absorbé ces hausses ?

Elles nous ont conduits à accroître nos prix de 10 % environ en un an. D’abord dans le cadre des négociations annuelles avec la grande distribution. Puis lors d’une deuxième phase de négociation organisée par l’État, entre les représentants des acteurs de l’agroalimentaire et la fédération des distributeurs, pour faire face à ces hausses successives.

Qu’en est-il sur le marché de la restauration, qui compte pour 40 % dans votre activité ?

Les renégociations ont été un peu moins complexes. Les gros acteurs de ce marché sont plus attachés aux produits. Les restaurateurs avec lesquels ils travaillent recherchent des produits de qualité. S’ils ne les trouvent pas, ils vont voir ailleurs. Par ailleurs, dans la restauration, le prix des ingrédients est davantage noyé dans les coûts de main-d’œuvre, le loyer, etc.

À combien évaluez-vous l’impact de la hausse des prix de l’énergie pour votre entreprise ?

Cette hausse devrait générer un surcoût de 10 millions d’euros environ cette année. Et nous pensons qu’un certain nombre de services vont également augmenter, du transport à l’entretien, en passant par les cabinets de recrutement.

Disposez-vous d’une marge de manœuvre vous permettant de réduire vos dépenses énergétiques ?

Réguler les coûts énergétiques nécessite des plans d’investissements pluriannuels. Il y a beaucoup de sujets sur lesquels nous pourrions avancer. Même si, chaque année, nous réalisons des investissements pour améliorer l’optimisation de nos sites de production. Mais il est complexe d’investir massivement, au vu des incertitudes du marché et sur nos marges.

Les consommateurs subissent également l’inflation. Avez-vous constaté un impact sur les habitudes d’achat ?

De manière générale, la vente de produits de grande consommation a fortement chuté en début d’année, avant de repartir à la hausse ces derniers mois. Au sein de chaque famille de produits, des arbitrages sont faits. Les Français se tournent vers des produits moins chers. Dans notre secteur, nous avons un concurrent indirect : les pâtes sèches. C’est une année un peu compliquée pour les pâtes fraîches.

Cette conjoncture peu favorable vous contraint-elle à revoir vos ambitions de croissance à moyen terme ?

Non. Nous avons la chance d’avoir une entreprise bien gérée et solide d’un point de vue financier. Nous serons en croissance fin 2022. Même si, il est vrai, cette croissance sera tirée par une hausse des tarifs plus que des volumes.

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