Modetic crée une filière française de recyclage de coton denim
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Modetic crée une filière française de recyclage de coton denim

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Six mois après la reprise de la manufacture textile vosgienne Valrupt Industries, l'entreprise drômoise Modetic, propriétaire de la marque de jeans made in France 1083, se donne les moyens de créer une filière de recyclage de coton denim.

— Photo : 1083

Depuis Romans-sur-Isère, dans la Drôme, l’entreprise Modetic et sa marque de jeans 1083 remontent, fil à fil, la chaîne du « made in France ». Thomas Huriez, gérant de la SARL, a repris, en septembre 2018, la manufacture de tissage, filature et confection vosgienne Valrupt Industries (103 salariés, CA 2017 : 10,5 M€). L’une des quatre dernières filatures de coton en France qui fournit le denim bio de deux modèles de jeans de 1083.

« Pour demeurer 100 % producteur français, nous n’avions pas d’autre choix que de sauver Valrupt », souffle le dirigeant, adepte du deux-roues (il a parcouru 1 083 km à vélo pour traverser la France). Pour y parvenir, sa PME de 35 salariés consent à un investissement de 700 000 euros, financé par une levée de fonds de 1,6 M€, bouclée à l’été 2018. Au total, 35 emplois de l’activité tissage et filature ont été préservés au sein de la manufacture, rebaptisée depuis « Tissage de France ». Mécaniquement, le chiffre d’affaires de Modetic va bondir de 2 M€ en 2018 à 8 M€ en 2019, grâce au carnet de commandes de sa filiale vosgienne.

Faire du neuf avec du vieux

Cette acquisition industrielle permet à Modetic de lancer la création d’une filière de coton « made in France ». Et ce sans aucun champ de coton à l’horizon ! Après quelques centaines de milliers d’euros dépensés avec le soutien de Bpifrance (30 000 €) et Eco TLC pendant quatre ans, Modetic a mis au point en laboratoire des procédés d’effilochage et défibrage lui permettant de produire du fil de coton à partir de vieux jeans.

« Au lieu d’acheter pas cher en Asie, j’utilise un modèle de production et distribution sans intermédiaire, pour redonner de la compétitivité au "made in France". »

Modetic, producteur de coton ? La petite SARL de la Drôme y croit. Fidèle à sa vision « locale », elle entend pour cela s’appuyer sur un gisement énorme : le recyclage des 88 millions de jeans achetés chaque année dans l’Hexagone, soit 1,5 par Français et par an. Elle compte répondre à ses propres besoins (30 000 jeans vendus en 2018) mais aussi à la demande « entrante » : housses de siège auto, doublures de sac à main, toile de paillage pour l’agriculture… Des applications « innombrables », selon Thomas Huriez.

Un modèle sans intermédiaire

D’ici à 2020, un investissement de 2 millions d’euros, financé par la dette, doit permettre d’ouvrir une première unité de production. Le projet a été reconnu comme innovant et stratégique par l’Ademe, qui l’accompagnera financièrement. La première machine traitera 2 à 3 tonnes de coton par jour, avec une organisation « agile » pour monter en puissance en fonction de la demande. « Demain, notre chiffre d’affaires devrait reposer à 50 % sur la vente en BtoC et 50 % en BtoB », anticipe le gérant, avec un prix d’achat « forcément plus cher que le coton bio », mais fixé avec ses futurs clients.

Thomas Huriez, qui pilote l’entreprise avec son frère Grégoire, croit à l’engagement des « consom’acteurs ». Et à sa propre capacité à tenir des tarifs acceptables. Pour preuve : le prix de revient des jeans 1083 oscille entre 30 et 35 euros. Ils sont revendus 89 euros. « Je me contente d’une marge « fois trois ». Mais au lieu d’acheter pas cher en Asie, j’utilise ce modèle de production et de distribution sans intermédiaire pour redonner de la compétitivité au « made in France ». En innovant commercialement, on parvient à rester compétitif ! »

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